La cour d’appel perplexe face à la régularisation de la piscine de Samia Ghali

Actualité
le 7 Déc 2016
8
La cour d’appel perplexe face à la régularisation de la piscine de Samia Ghali
La cour d’appel perplexe face à la régularisation de la piscine de Samia Ghali

La cour d’appel perplexe face à la régularisation de la piscine de Samia Ghali

L’affaire de la piscine de Samia Ghali et de son époux, construite en espace boisé classé et régularisée ensuite par la Ville de Marseille, passait ce mardi 6 décembre 2016 devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence. L’ex-propriétaire, condamné en 2005 à la démolir, demande à être dispensé des 193 900 euros d’astreinte dus à l’Etat. Si la cour confirme l’exécution de la peine, il pourra se retourner vers la sénatrice et son mari.

En mars 2010, comme nous l’avons révélé ce mardi avec Mediapart, la sénatrice PS Samia Ghali et son époux Frank Dumontel achètent pour 1,3 million une villa avec piscine sur la colline du Roucas Blanc, face à Notre-Dame de la Garde. Construit dans un espace boisé classé par l’ex propriétaire, le bassin est promis à la destruction par un arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 15 novembre 2005. Celle-ci a condamné l’ex-propriétaire à démolir piscine et mur de soutènement, avec une astreinte de 75 euros par jour de non-exécution. La maire des 15e et 16e arrondissements et son mari obtiennent ensuite de la Ville de Marseille une modification du PLU votée le 28 juin 2013, suivie d’une régularisation en juin 2014, par le dépôt d’une déclaration préalable de travaux.

193 900 euros à payer

L’astreinte, contestée ce jeudi, continue à courir jusqu’à cette “régularisation” il y a deux ans. Au 29 juin 2014, elle s’élève à quelque 193 900 euros, réclamés par l’Etat au retraité, seul visé par cette condamnation pénale. L’acte de vente notarié précise cependant que le couple Ghali-Dumontel a fait sienne cette astreinte. À compter d’aujourd’hui, l’acquéreur s’engage à prendre en charge le paiement de ladite astreinte et à restituer au vendeur, le cas échéant, les sommes qui viendraient à être recouvertes sur ledit vendeur pour une astreinte postérieure à aujourd’hui”, détaille l’acte signé le 12 mars 2010.

L’ex-garagiste, qui commence à trouver l’ardoise lourde, a déposé le 10 février 2015, une requête pour une dispense totale de cette peine et le reversement des sommes déjà réglées, arguant de difficultés financières. À l’audience, seul son avocat Me Jean-Louis Bonan se présente. Ce dernier connaît à plus d’un titre le dossier puisqu’il est aussi conseiller métropolitain (DVD) au titre de la Ville de La Ciotat. L’avocat a de ce fait participé au vote de la communauté urbaine de Marseille sur le plan local d’urbanisme qui a déclassé l’espace boisé classé sur lequel est installé la piscine et permis sa “régularisation”.

Me Jean-Louis Bonan décrit son client comme un modeste retraité, âgé de 74 ans et touchant 1600 euros par mois. L’avocat oublie ainsi de mentionner que dans l’acte de vente de la villa, les nouveaux propriétaires, peut-être plus solvables, se sont portés garants du paiement des astreintes à partir de mars 2010. Pour lui, l’objectif est d’effacer l’ardoise de son client et il ne faudrait pas donner à la cour l’impression de pouvoir payer, d’une manière ou d’une autre. Le président de la Cour Éric Cibiel l’interroge sur l’existence d’une telle clause. L’avocat l’admet mais tente de la décrédibiliser :  “Quelle valeur a cette clause ?”, s’interroge Me Bonan. “Dans les rapports entre parties, elle a quand même toute sa valeur”, tranche le président.

“Une déclaration préalable… a posteriori”

Le portrait ne convainc pas non plus l’avocate générale, qui tient à ce que l’ex propriétaire règle les sommes dues “jusqu’au dernier centime”. Elle rappelle qu’il a été déjà condamné à six mois de prison avec sursis et 5000 euros d’amende pour soustraction frauduleuse à l‘établissement de l’impôt et qu’il n’est pas exactement sur la paille, ayant vendu sa villa 1,3 millions d’euros. “Donc ce monsieur a des revenus qu’il cache, […] il est bien conseillé, il doit avoir des dividendes lui permettant de régler”, assure l’avocate générale.

Elle relève au passage la “position complexe de la DDTM [Direction départementale des territoires et de la mer, ndlr] à l’égard de la Ville de Marseille”. Un poil gênée par la tournure prise par le dossier, la représentante de ce service de l’État, a en effet demandé une exonération de 99,99 % de l’astreinte au vu de la “régularisation” par la Ville de Marseille de la piscine “par suppression du PLU de l’espace boisé classé”.“Moi je tiens des propos libres. On ne reviendra pas sur la régularisation, dont chacun appréciera la teneur juridique et la valeur”, lance l’avocate générale, tout en sous-entendus. Le président Eric Cibiel abonde : “Je ne sais pas ce que cet arrêté régularise”. Avant d’ironiser sur la “déclaration préalable qui n’était pas préalable mais… a posteriori” qui a permis au couple Ghali-Dumontel de conserver sa piscine. Le délibéré aura lieu le 17 janvier 2017.

Jean-Marie Leforestier et Louise Fessard (Mediapart)

Ajout à 18 heures : Suite à la publication de cet article, Jean-Louis Bonan nous a appelés pour préciser que s’il a bien participé au vote du PLU en juin 2013 en tant que conseiller communautaire “sans étiquette”, il n’était pas encore à cette période avocat de l’ex propriétaire de la villa qu’il ne connaissait pas. “Je suis devenu son avocat en mai 2014 pour une affaire personnelle, et en mai 2015 dans le cadre de ce dossier d’urbanisme, détaille-t-il. Je n’ai pas pour habitude de mélanger les étiquettes.”

Cet article vous est offert par Marsactu

À vous de nous aider !

Vous seul garantissez notre indépendance

JE FAIS UN DON

Si vous avez déjà un compte, identifiez-vous.

Commentaires

L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.

  1. one live one live

    Tout le monde ne le fait pas, régulariser, mais beaucoup le font, voir autour de la buzine , les régules intervenues une fois dénoncés les terrains de boules, boxes à chevaux, local piscine et potagers confortablement installés sur le domaine public. On signe alors un bail, ou comme en bas de la gineste pour les cabanons en hauteur devenus des résidences pour étudiant ou b and b avec la passivité de tous et l’accès par la dfci, en fait partout ou les biens jouxtent le domaine public qu’il est tentant de s’approprier sans conséquences immédiates.

    Signaler
    • barbapapa barbapapa

      Sabrina, c’est Samia ?

      Signaler
    • one live one live

      Et non mais force est de constater que la pratique est courante et répandue quelque soient les secteurs, ce qui n’enlève rien à la gravité des faits.

      Signaler
    • Regard Neutre Regard Neutre

      La pratique de rectifier les Espaces Boisés Classés (EBC) sur les PLU est extrêmement rare. Dans les PLU ce zonage est considéré comme figé .Lors de révisions ou de modifications du PLU, des fenêtres peuvent y être ouvertes —mais à la marge— pour l’implantation d’un ouvrage d’intérêt général.

      Signaler
  2. N SV N SV

    Délibéré en janvier 2017 non ?

    Signaler
    • Jean-Marie Leforestier Jean-Marie Leforestier

      oups, oui 😉

      Signaler
  3. corsaire vert corsaire vert

    La cour d’appel ne sera pas perplexe bien longtemps ! Samia Ghali ou autre sont trop bien placés pour qu’une décision soit prise à leur encontre !
    On modifie le PLU et le tour est joué !

    Signaler
  4. guillaume coste guillaume coste

    Haaaa les «services de l’état» dans notre département… DDTM DREAL etc que ce soit pour les EBC les espaces verts naturels ou le gibier et les chasseurs …. ils doivent avoir de braves torticolis à force de tourner leurs têtes …

    Signaler

Vous avez un compte ?

Mot de passe oublié ?


Ajouter un compte Facebook ?


Nouveau sur Marsactu ?

S'inscrire