La gare Saint-Charles, ce désert à fourchette

Dès que j’y pense (ce qui arrive un peu), dès que j’y suis (ce qui arrive beaucoup), mes nerfs se tendent. Ça m’irrite, m’angoisse, m’indigne (pas nécessairement dans cet ordre). Au sein de la seconde cité de France, tant vantée pour son renouveau culinaire, rien à faire : sur l’échelle-popote des neuf enseignes du lieu, ce qui s’avale gare Saint Charles intra-muros va du gentiment médiocre au franchement infect. Avec vingt-cinq allers-retours vers ou depuis Paris ces douze derniers mois, j’ai pourtant retenté ma chance histoire de dire mais non, rien n’y fait. Même (surtout) autour, c’est à pleurer. Certes, il y eut bien une ou deux tentatives pour doper l’offre avec des néo-camions à manger mais ce fut dans le cadre d’évènements. Dans la durée, c’est la cata.

Ailleurs, des grands noms de la gastronomie ont investi les quais. Les grandes (et moins grandes) toques marseillaises devraient elles aussi songer à s’y mettre.

Marseille n’est pas l’unique cas gastro-ferroviaire désespérant du pays. Encore que, de Bordeaux (tartare soigné et préparé devant vous à la brasserie du Levant) à Saint-Brieuc (excellentes galettes pommes de terre à 3,05 euros pièce à la crêperie La Guérande) en (re)passant par la gare de Lyon (le plateau-repas du Train Bleu à commander une demi-heure à l’avance se défend) ou Reims (moment hors du temps chez Jérôme, à six petites minutes en marchant vite), sans parler de Roanne ou Tarascon (tables étoilées), il est possible de se taper correctement la cloche dans un certain nombre d’endroits de l’Hexagone. Ailleurs, des grands noms de la gastronomie ont investi les quais : Eric Fréchon à Saint-Lazare (Paris), à Saint-Pancras (Londres), Metz prochainement. Les grandes (et moins grandes) toques marseillaises devraient elles aussi songer à s’y mettre.

Je suis sévère (à raison, si si, je vous assure) parce que la situation l’exige mais en bon joueur, j’accepte de vous ouvrir mon (maigre) carnet d’adresses où déplier sa serviette ne présente pas de grands risques : le Comptoir Dugommier (4 minutes à pied) et sa cuisine de marché à petits prix (plats 7-16 euros), Torréfaction Noailles (6 minutes) pour un encas et un expresso buvable, Chez Noël (7 minutes) et sa pizze mozzarella (du moins avant le re-lifting récent), La Boite à Sardine (8 minutes), poissonnerie-resto où se rendre les yeux fermés, Chez Sauveur (9 minutes) qu’on ne présente plus, O Pakistan (13 min) et ses thalis dispos jusqu’à minuit, le Pavillon Thai (15 min), son riz vert et ses desserts banane réconfortants.

Un jour peut-être, les 11 518 840* voyageurs qui transitent chaque année par la gare Saint-Charles s’éclateront le gosier avant de composter leur billet. D’ici, notez bien la poignée d’endroits mentionnés plus haut, vous éviterez bien des déceptions et bobos gastriques.

A défaut de vous souhaiter bon appétit, bon voyage !

*chiffres 2013