Bugeaud, JO et Airbnb : les dossiers chauds du conseil municipal

Décryptage
le 21 Mai 2021
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Ce vendredi se tient le 3e conseil municipal de l'année à Marseille. Il devrait s'étirer sur toute la journée et se pencher sur quelque 150 délibérations. Marsactu décrypte certains des rapports qui feront débat.

Le groupe du Printemps marseillais au conseil municipal du 4 juillet 2020. (Photo : LC)
Le groupe du Printemps marseillais au conseil municipal du 4 juillet 2020. (Photo : LC)

Le groupe du Printemps marseillais au conseil municipal du 4 juillet 2020. (Photo : LC)

Le troisième conseil municipal de l’année, ce vendredi 21 mai, s’ouvre – en présentiel, mais sans public – dans une ambiance toute particulière. Les élections départementales et régionales se profilent à l’horizon et le contexte pré-électoral ne manquera pas de s’inviter dans les débats municipaux. L’opposition, par la voix de Pierre Robin (LR), s’agace déjà de “la com’ permanente” de la majorité emmenée par Benoît Payan. “À un mois des élections certaines ficelles sont un peu grosses, pointe-t-il. Cinq ou dix délibérations sont toujours choisies à dessein pour dérouler un discours politique ou lancer une polémique et masquer ce qui n’est pas fait”, pique-t-il. Quand la majorité se félicite, par exemple, de renommer l’école Bugeaud (lire ci-dessous), la droite s’étonne, elle, d’un “timing opportuniste”.

Lors de la présentation des quelque 150 rapports du jour (disponibles sans les annexes sur le site de la Ville), Joël Canicave, président du groupe majoritaire et par ailleurs en lice pour les élections régionales sous la bannière du “Rassemblement écologique et social” a annoncé que le prochain conseil municipal aurait lieu le 9 juillet, histoire “d’enjamber la période électorale.” La campagne a commencé, pourtant, et ses premiers coups se jouent à fleurets mouchetés. Nul doute que plusieurs dossiers, dont ceux que Marsactu a choisi de mettre en lumière, permettront aux forces en présence de croiser le fer.

La facture des JO 2024 remonte de 2,6 millions

Un surcoût de travaux, c’est assez courant. C’est plus ennuyeux quand l’enveloppe grossit de 2,6 millions d’euros pour atteindre 11 millions, soit + 30%. Ça l’est encore plus quand le chantier en question porte sur la marina olympique du Roucas Blanc, dont le maire a fait un symbole de sa politique d’économies sur les grands événements. En réduisant la voilure aux besoins strictement nécessaires, une délibération présentée en octobre 2020 affirmait que le coût seraitramené de 15 millions d’euros à 9 millions d’euros”.

Mais la contamination des sédiments, révélée par des analyses, a généré un surcoût de 850 000 euros, qualifié “d’imprévisible”. Paradoxalement, l’autre surcoût est une conséquence de “la modification des ouvrages prévus initialement”, qui nécessite l’installation d’un dispositif pour éviter un envasement trop rapide. La Ville mise cependant sur un taux de subventions de 80 % pour limiter cette charge à 1,8 million d’euros, à laquelle s’ajoute la participation de plusieurs millions d’euros aux nouveaux bâtiments de la marina.

Valse des directeurs

La valse des directeurs continue. Après le recrutement express de nouveaux directeurs généraux adjoints, la Ville poursuit son renforcement des effectifs. Et elle choisit de le faire par voie contractuelle, justifiant ce choix par une “importante concurrence sur le marché de l’emploi territorial” et “le déficit de candidatures adaptées à certains postes” comme le relève le rapport n° 91. Parmi les profils recherchés, on trouve quelques postes clefs comme ceux attachés à la direction de la prévention et de la gestion des risques et à la sécurité des immeubles – le service chargé de déclarer les immeubles en péril. Pour mémoire, ces postes étaient attendus de longue date par les cadres, remerciés de façon cavalière, il y a quelques semaines. On trouve également les directeurs des ressources humaines, des finances, des sports, de la sécurité. Après les hauts gradés de l’administration municipale, la Ville poursuit donc son recrutement à marche forcée.

Les locations meublées saisonnières dans le viseur

Il fallait d’urgence prendre des mesures pour clarifier les choses. Toutes les grandes villes les ont prises”, justifie Patrick Amico, adjoint en charge de la politique du logement et de la lutte contre l’habitat indigne. Il porte lors de ce conseil une délibération sur la régulation des locations meublées saisonnières, de type Airbnb, qui devra être approuvée par la métropole afin d’être applicable. Sont ciblés les propriétaires qui transforment des appartements en meublés saisonniers, plutôt que les louer à l’année.

“Sur Marseille, on pouvait louer jusqu’à cinq résidences meublées sans avoir à compenser” par la création d’une surface équivalent en logement familial, comme le prévoit la loi, reprend l’élu de la majorité. Désormais, un propriétaire ne pourra transformer en location saisonnière qu’un seul logement. Au-delà, une compensation devra être mise en place. La durée de l’autorisation de location pour les particuliers passe, en outre, de 6 à 4 ans, et ne sera plus renouvelée automatiquement. La délibération indique que plusieurs centaines de logements sont concernées chaque année.

Un deuxième débat sur le bilan de la Soleam

Quatre minutes, réponse comprise. C’est le débat auquel a donné lieu ce rapport de la chambre régionale des comptes, le 15 avril en conseil métropolitain. Très critique sur la gestion de la Soleam, en particulier son bilan en matière d’habitat indigne, ce même document revient devant le conseil municipal, la Ville étant actionnaire minoritaire de cette société publique.

Alors qu’il y a un mois, l’adjointe au maire Mathilde Chaboche (Mad mars) avait été cadrée de près par la présidente de la métropole Martine Vassal (LR) quand elle avait voulu élargir la critique, les échanges pourraient être plus nourris sous la houlette du maire Benoît Payan (PS). Une vingtaine d’associations et collectifs ont appelé dans un courrier à refondre la gouvernance de ces politiques, estimant insuffisante la proposition d’audit de son président Lionel Royer-Perreaut (LR).

Le RN veut reloger les policiers au collège

Une fois n’est pas coutume, l’assemblée municipale devra plancher sur une délibération portée par le sénateur du Rassemblement national Stéphane Ravier. Lors de sa visite au début du mois de mars dernier, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin a fait part de sa volonté de créer un “grand commissariat” dans le 7e secteur de Marseille pour remplacer les deux postes de police nationale des 13e et 14e arrondissements vétustes et peu adaptés. Cette réalisation toutefois, n’est pas encore officiellement planifiée. Les élus d’extrême-droite demandent néanmoins que les fonctionnaires de police soient accueillis de manière transitoire dans les locaux de l’ancien collège Giono qui regroupe, selon eux, “toutes les caractéristiques recherchées afin d’y créer le nouveau commissariat”. Aujourd’hui désaffectés les locaux ont accueilli en 2019 des délogés après la catastrophe de la rue d’Aubagne.

L’école Bugeaud devient Ahmed-Litim

C’est Benoît Payan himself qui présentera la délibération n°13. Hautement symbolique et à forte portée politique, elle acte le changement de dénomination de l’école Bugeaud (3e arrondissement). Elle portait jusqu’alors – comme la rue qui l’accueille – le nom de ce Maréchal de France qui reste comme l’un des artisans particulièrement brutaux de la colonisation de l’Algérie dont il fut nommé gouverneur général en 1840. Et honorera, après la ratification de l’assemblée municipale, le nom du caporal Ahmed-Litim, tirailleur algérien, mort en août 1944 sur la colline de Notre-Dame de la Garde, lors de la libération de Marseille.

Cette école en préfabriqués de la Belle-de-Mai bénéficiera par ailleurs de travaux de réorganisation et de sécurisation ainsi que de locaux supplémentaires. La rue Bugeaud, quant à elle, verra-t-elle également son nom changer dans le futur ? Joël Canicave répond : “Il n’est pas interdit que cela se fasse.” Pour peu que la commission des noms de rues valide ce changement.

Deux ventes d’immeubles symboliques annulées au Panier

17, place de Lenche, le 17 février 2021. Casque de chantier vissé sur la tête, entouré de trois adjoints et du maire des 2/3, Benoît Payan rejoue son thème de campagne de longue date sur le “loto du patrimoine municipal”. Acheté 750 000 euros par la Ville, cet immeuble dégradé devait être revendu pour 250 000 euros, moyennant un engagement de rénovation. Pas très loin au Panier, le 48 rue Sainte-Françoise, exproprié en 2007 pour 245 000 euros, devait partir pour 80 000 euros.

Dans les deux cas, le délai de rénovation est expiré, ce qui permet au maire d’appliquer le “gel” annoncé en février : la vente est annulée. Reste à faire mieux que la précédente équipe en rénovant ce patrimoine. Pour l’heure, la délibération se tient à promettre “de lancer une réflexion sur le futur de cet immeuble. L’objectif fixé est d’arriver à un projet qui
soit en adéquation avec les besoins des habitantes et habitants.”

Coralie Bonnefoy, Benoît Gilles et Julien Vinzent

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Commentaires

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  1. Citoyen-ne-s-de-marseille.fr Citoyen-ne-s-de-marseille.fr

    Merci Marsactu de diffuser les rapports qui vont être présentés,même s’ils sont sans les annexes.

    Petite précision : un rapport qui n’est pas voté est toujours considéré comme un document de travail, des modifications pouvant être apportées jusqu’au dernier moment du vote (nous l’avons vu avec les MGP). Donc la ville n’a pas obligation à le communiquer. Bien entendu une fois que le rapport est voté, délibéré, celui est communiquable y compris les annexes.

    Nous entendons que la ville et ses 14000 agents n’ont pas les ressources en interne pour “anonymiser” au sens rgpd les annexes, mais ça devient de plus en plus pénible à entendre.

    Encore merci pour votre travail, à tout à l’heure….

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  2. Andre Andre

    Il faudrait que Marsactu cesse de se placer du côté de ces pauvres malheureux cadres dirigeants qui auraient été débarqués de manière cavaliêre selon l’article. Ces cadres, recrutés par l’ancienne municipalité sur des critères et des conditions financières que l’on aimerait connaître et eux mêmes contractuels méritaient ils leur place?…. Certains revocations ont parfois du bon,

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    • Benoît Gilles Benoît Gilles

      Bonjour monsieur, nous ne nous plaçons pas d’un côté ou de l’autre et nous ne portons pas de jugement sur leurs qualités professionnelles réelles ou supposées. Vous pouvez contester le choix du mot, nous aurions pu choisir le terme “abrupte” pour qualifier leur départ. Quoi qu’il en soit, il est un fait certain et recoupé que ces ouvertures de poste étaient attendues de longue date.

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  3. Alceste. Alceste.

    Marrant que les LR se plaignent des méthodes de la gaudinie appliquées à l’opposition pendant des années et qu’ils se voient appliqués de temps en temps.Etonnant cette pollution des sédiments qui apparait dans une ville qui bénéficie soit disant d’un un traitement des eaux remarquablement effectué par la SEM. Vivement que la phase mémorielle se termine car le nombre d’âneries qui va être dite va nous saouler. Que le changement d’administration se termine , que les directeurs partisans soient changés pour que les réformes démarrent enfin.
    Après, pour le reste, face aux bras cassés de la SOLEAM, pas grand chose à faire sinon à les éviter grâce à l’Etat.
    Enfin attendons nous à une scéance type cour de récréation.

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