Au programme de la culture : grandes ambitions et flous budgétaires

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le 28 Fév 2014
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Au programme de la culture : grandes ambitions et flous budgétaires
Au programme de la culture : grandes ambitions et flous budgétaires

Au programme de la culture : grandes ambitions et flous budgétaires

"Il serait dommage de laisser retomber l'élan de 2013. Clairement, en 2014, le spectacle est dans les urnes", formule Daniel Hermann, adjoint à la culture de Jean-Claude Gaudin. A droite, le candidat qui titre son programme culturel "capitaliser sur les succès de l'année capitale" part du postulat de la réussite totale de 2013 et souhaite poursuivre sur cette lancée. A gauche, si le regard sur Marseille-Provence 2013 est plus nuancé, les candidats mettent en avant un projet culturel aux ambitions équivalentes. A l'exception notable du Front national – qui évoque un festival des jeux vidéos dans son programme économique mais ne nous a pas répondu – tous les programmes font la part belle à la culture. Et, malgré le contexte de restriction budgétaire générale, notamment des crédits d'Etat, aucun candidat ne prône fermement une baisse des budgets. Au contraire, on trouve dans les programmes de nouveaux rendez-vous et des équipements supplémentaires. Sans détail sur leur financement. 

Ainsi, à droite, le programme annonce "une sanctuarisation des crédits budgétaires de l'action culturelle de la ville de Marseille", que reprend à son compte l'adjoint sortant. Avec la liberté de celui qui ne sera probablement pas à ce poste dans la prochaine mandature, il souligne qu'"évidemment nous ne disposerons pas en 2014 du même budget que pour l'année capitale de la culture." Sous entendu, la droite souhaite donner une suite à l'année 2013 par le biais d'une biennale "d'arts urbains et contemporains" ou d'une rencontre de sculptures monumentales mais avec des moyens pour l'instant… inconnus.

Ces moyens dépendent aussi des partenaires (publics et privés), qui avaient mis au pot pour MP2013. "Après les élections, nous organiserons des réunions avec ceux qui veulent continuer l'aventure. Pour l'instant on ne sait pas qui voudra continuer. Il faut avancer à petits pas", modère-t-il avec prudence. "On fait plein de propositions parce qu'on est en campagne. On est suspendu aux élections. Mais ce que l'on peut dire, c'est que la Ville a dépensé 171 millions d'euros en 2013, [hors budget dédié à Marseille-Provence 2013 – ndlr] et qu'elle dépensera la même chose en 2014, voire même, ce budget sera légèrement augmenté." Déjà entre 2012 et 2013, le budget de la culture avait connu une augmentation de 13 millions d'euros dans le cadre de la montée en charge de la capitale culturelle. Quoi qu'il en soit, cela signifie que l'effort nécessaire à la poursuite de l'évènement pourrait être inclus dans ce budget, rognant d'autant les subventions accordées au fonctionnement des structures culturelles.

Coquilles vides

Cela n'empêche pas les candidats de promettre de nouveaux équipements en s'appuyant notamment sur les manques de la capitale culturelle. Cette dernière a oublié le hip-hop et les cultures urbaines ? Jean-Caude Gaudin annonce une maison du hip-hop et des musiques actuelles "à la Belle de Mai" et Patrick Mennucci un "centre des cultures urbaines" sans qu'aucun des deux n'évoque un quelconque financement. Au Front de gauche, on est plus critique avec cette course à l'équipement. Fondatrice du magazine culturelle Zibeline, Agnès Freschel est porte-parole du candidat Coppola sur ces questions. Elle tacle sérieusement les projets dispendieux de Jean-Claude Gaudin, comme "beaucoup d'équipements culturels qui ont été construits et qui sont des coquilles vides, qui n'ont pas les moyens de fonctionner, comme la Minoterie ou encore la Nouvelle Friche".

Mais comme les promesses ne coûtent rien, le Front de gauche annonce à son tour vouloir décupler l'effort financier en favorisant les investissements croisés entre les différents partenaires : "Nous partons du constat que l'investissement pour la culture est très faible. Jean-Marc Coppola s'est engagé à le doubler par habitant. Nous devrions atteindre 200 euros par Marseillais" annonce Agnès Freschel sans toutefois préciser de quelle manière le candidat compte y parvenir. Et même si Jean-Claude Gaudin martèle lui le chiffre des 183 euros, Marseille arrive loin derrière en comparaison avec d'autres grandes métropoles qui ont toutes dépassé ce seuil : Lyon est à 229 € par habitant, Nantes à 222 €, Bordeaux à 265 € et Lille à 264 €.

Pour donner du corps à ses promesses de maintien de l'offre culturelle en 2014 et durant le reste de la mandature, la plupart des candidats remettent sur la table les recettes de l'année capitale : recherche du mécénat d'entreprise, appel à la mutualisation des moyens des collectivités et serrage de ceintures çà et là. Fondateur de l'association d'aide aux musiques innovatrice (Ami) à la Friche, Ferdinand Richard, est un de ceux qui portent le volet culturel du programme de Pape Diouf. Lui qui sait ce que la baisse des crédits publics veut dire prône une "critérisation des aides". "Car la culture est un secteur hautement subventionné mais il faut voir de quelle manière les subventions sont distribuées", ajoute-t-il. "On se battra pour reconduire le budget de la culture mais surtout on posera les questions de la répartition. Par exemple, la culture est une affaire de mairie centrale et les mairies de secteur sont très peu dotées".

"Besoin de concertation"

Pour la liste de Patrick Mennucci, Nathalie Pigamo insiste également sur le "besoin de synergie, de concertation. C'est pour cela que l'on fera une conférence de consensus entre les différents partenaires où nous nous attarderons sur la répartition des subventions qui devront être sécurisées pour ne pas bloquer la création. Les financements retenus seront pérennisés sur trois ans."

Mais, là encore, malgré un florilège de propositions, pas de chiffrage pour le moment. Même si la candidate précise qu'"il ne s'agit pas de projets qui coûtent cher. Il y a énormément d'équipements culturels aujourd'hui, il n'y a pas besoin de plus". Pour elle, la sanctuarisation des fonds doit avant tout concerner les efforts en faveur de la création. Et pour cela, "nous ferons en sorte de trouver les moyens" notamment, en réservant 1% des budgets des opérations d'urbanisme pour des actes artistiques spécifiques.

Quant à la place du privé dans le financement de la culture, elle fait quasiment l'unanimité. Logiquement, la droite en fait l'axe central de la poursuite de l'effort de 2013 en attendant que le think tank lancé par la chambre de commerce accouche de solutions. Au parti socialiste, on est sur une ligne similaire : "On a pas de souci avec ça. On est tous d'accord pour dire que la participation des entreprises dans la capitale culturelle s'est révélée positive en termes de dynamisme. Le but de la Ville est d'être un facilitateur, faire en sorte par exemple que des festivals comme Aires Libres et Marsatac n'aient plus de problèmes." Une petite pierre dans le jardin de l'équipe sortante dont les tergiversations avaient forcé ces deux évènements à une errance dans la ville.

Au-delà des promesses, pour chacune des listes en lice, il est urgent d'attendre de quoi l'après 2013 sera fait. Les villes et agglomérations alliées dans la capitale ne seront pas toutes partantes pour un prolongement commun. Si la capitale avait joué le rôle de préfiguration de la métropole à cette échelle, la culture ne sera pas une compétence métropolitaine. On ne sait pas au sein de quelle instance tout ceci sera discuté. Le sentiment partagé par tous peut être résumé par la formule de Nathalie Pigamo : "la culture ne doit pas être une option mais une obligation". Quant à la question complexe de son financement, elle reviendra sur la table une fois dissipée l'ivresse de la victoire.

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Commentaires

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  1. Agnès Freschel Agnès Freschel

    Je suis très étonnée par la teneur de cet article qui sous entend clairement que je n’aurais pas répondu à une question sur les financements…. qui ne m’a pas été posée. Le financement du fonctionnement des établissements culturels de la ville est très en dessous de celui des autres villes européennes comparables, et vouloir le doubler sur l’exercice d’une mandature n’a rien à voir avec le commentaire déplaisant de “comme les promesses ne coutent rien” qui assortissent des propos plus que tronqués. J’ai par ailleurs, même si la question je le répète ne m’a pas été posée, indiqué lors de mon entretien téléphonique les pistes de financements possibles, en particulier avec la fin des DSP et partenariats publics privés, ou l’affectation au fonctionnement des établissements culturels d’une taxe liée aux bénéfices touristiques.
    L’investissement massif dans la culture n’est pas une vue de l’esprit, ou un caprice, ou une promesse électorale. elle est nécessaire dans un secteur économique qui représente 3.2 % du PIB, crée des emplois non délocalisables, coute très peu eu égard à ce qu’elle rapporte, et surtout participe à l’émancipation des citoyens. Rapporter mes propos en les vidant de tout contenu, sans mentionner que nous avons un programme précis, dont vous disposez et dont nous avons parlé, qui est finançable, réaliste et facteur de développement pour la ville, me semble dommageable, et peu fidèle à la réalité de notre entretien.
    je suis à votre disposition pour un entretien plus complet, et fidèle au sérieux de nos propositions, dont vous semblez douter, pour je ne sais quelles raisons …
    Agnès Freschel, porte parole du Front de gauche, pour les municipales marseillaises, pour les questions culturelles

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  2. jeje jeje

    blabla bla, laissons faire ceux qui savent et qui nous l’ont prouvé en 2013.

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  3. Peuchère Peuchère

    “Confier une mise en scène à Bob Wilson pour l’Opéra de Marseille ou monter une exposition Bill Viola au Palais Longchamp est inconcevable. L’inconsistance et le conformisme des choix de programmation des lieux institutionnels proviennent d’une inculture chronique des décideurs.

    Qu’un adjoint à la culture, kinésithérapeute de profession, d’une métropole de cette importance n’ait jamais entendu parler de Mario Merz ou de Gilberto Zorio pose problème. L’offre culturelle ne peut être que de second choix vu qu’il n’y a pas de nécessité à créer, à déplacer des forces.”

    Emmanuel Loi – Le Monde 25 février 2014

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  4. Alter Off 2013 Alter Off 2013

    Bonjour

    Nous vous invitons à assister à l’événement.

    Pensez à vous inscrire pour être sûr d’avoir une place
    Merci de diffuser l’info.

    La liste des invités évoluant de jour en jour vous serez informé par des communiqués ultérieurement.

    Le débat public : Marseille 2013 capitale européenne de la culture, réussite ou échec ? Avant, pendant et surtout après…

    Le 7 mars 2014 à 19 h précises au théâtre Toursky (Entrée libre)
    16 Promenade Léo Ferré 13003 Marseille
    Tél: 04.91.02.58.35

    https://www.facebook.com/events/703982586290979/

    http://www.marseilleprovence2013alteroff.org/site2/le-debat-marseille-2013-reussite-ou-echec-avant-pendant-et-surtout-lapres/?doing_wp_cron=1393765783.6152529716491699218750

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  5. JL41 JL41

    Pourquoi ne parle-t-on de la culture qu’en termes de financements ? Je lis plus bas (Agnès Freschel) une suite d’arguments qui me laissent pantois : « L’investissement massif dans la culture n’est pas une vue de l’esprit, ou un caprice, ou une promesse électorale. elle est nécessaire dans un secteur économique qui représente 3,2% du PIB, crée des emplois non délocalisables, coute très peu eu égard à ce qu’elle rapporte, et surtout participe à l’émancipation des citoyens. »
    Le postulat d’une culture « nécessaire », qui « participe à l’émancipation des citoyens » est posé sans être argumenté, avec comme sainte ambition un « investissement massif ». Ne serait-il pas intéressant, avant tous ces vœux de renouvellement de subventions, de prudente langue de bois d’une partie des candidats aux municipales, de s’interroger sur la production culturelle elle-même, sur le public infime qui bénéficie de « l’émancipation des citoyens » ? Comme si les autres restaient des cons. N’y a-t-il pas un hiatus entre cette culture subventionnée et le public infime qui s’y intéresse ? Je ne veux pas dire par là que la bonne culture serait ce que certains appellent la culture de masse. Mais on trouvera plus facilement un spectacle sur l’incommunicabilité à la Criée, rassemblant les intellectuels du coin, qu’on a trouvé une mise en lumière du hip hop à l’occasion de MP 2013, pour ne citer que cet oubli révélateur.
    Un récent article du Monde donnait une vision un peu provocatrice du climat local sur le sujet : http://www.lemonde.fr/idees/article/2014/02/25/la-cite-phoceenne-reste-une-republique-bananiere_4373177_3232.html
    « Prenons deux secteurs : le théâtre et les arts plastiques. Douze théâtres subventionnés et homologués, où 60 % du budget est consacré au fonctionnement au détriment de la production et donc de la création. La durée de mandat des directeurs de salle est de dix-huit ans en moyenne.
    « De même qu’à l’école d’art un nombre ahurissant de professeurs y étaient déjà élèves. Que peut-il sortir de novateur de plateaux où les roitelets gèrent leur rente de situation ? »

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  6. Morituri te salutant Morituri te salutant

    Dans cette fausse bataille pour les voix, les candidats n’ont plus qu’à demander à ceux qu’ils ont privilégiés de venir enfin habiter Marseille plutôt que jouer les proxénètes sur le dos des structures culturelles existantes, grandes oubliées de l’année dernière.
    Puisqu’il est de fait que MP 2013 est un échec, les déficits sont là pour le prouver ainsi que le bilan d’activité de l’aéroport de Marignane qui annonce fièrement un bilan stable. Où sont donc les neuf millions de touristes annoncés dans ces comptes?
    Enfin, confier ses affaires à une direction qui truffe ses lettres officielles de fautes de Français et veut s’occuper de Culture sans savoir compter sinon sur les mensonges éhontés de journaux à la solde me semble révélateur d’un ignoble détournement d’esprit et peut être de fonds.

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  7. Morituri te salutant Morituri te salutant

    Dans cette fausse bataille pour les voix, les candidats n’ont plus qu’à demander à ceux qu’ils ont privilégiés de venir enfin habiter Marseille plutôt que jouer les proxénètes sur le dos des structures culturelles existantes, grandes oubliées de l’année dernière.
    Puisqu’il est de fait que MP 2013 est un échec, les déficits sont là pour le prouver ainsi que le bilan d’activité de l’aéroport de Marignane qui annonce fièrement un bilan stable. Où sont donc les neuf millions de touristes annoncés dans ces comptes?
    Enfin, confier ses affaires à une direction qui truffe ses lettres officielles de fautes de Français et veut s’occuper de Culture sans savoir compter sinon sur les mensonges éhontés de journaux à la solde me semble révélateur d’un ignoble détournement d’esprit et peut être de fonds.

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  8. Electeur du 8e Electeur du 8e

    Pour réellement comparer le budget culturel de Marseille à celui des autres grandes villes citées, ne faudrait-il pas y inclure le gouffre financier du stade Vélodrome ? Après tout, il paraît que c’est aussi du spectacle vivant. Et visiblement, on dépense sans compter pour lui…

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  9. savon de Marseille savon de Marseille

    Pour décoller en Culture, il faut d’abord un maire qui aime l’Art et posséder une Ecole Nationale d’Art. Ce qui n’est pas le cas à Marseille. Ici, on n’est pas à Lille ou à Lyon. Faut pas rêver.

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  10. savon de Marseille savon de Marseille

    Pour décoller en Culture, il faut d’abord un maire qui aime l’Art et posséder une Ecole Nationale d’Art. Ce qui n’est pas le cas à Marseille. Ici, on n’est pas à Lille ou à Lyon. Faut pas rêver.

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  11. Dazibaos Dazibaos

    A quoi sert l’adjoint à la culture (ainsi que tous les services culturels) pour donner la gestion de 2013 capitale européenne de la culture à la CCI …l’art et gaudin sont deux entitèes qui se repoussent

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