Spectateur de soi-même
Du 15 février au 11 avril, la salle de cinéma phocéenne le Gyptis dévoile une programmation ambitieuse et passionnante, au sein de laquelle s’inscrit, comme à l’accoutumée, une thématique principale. Ce trimestre, place à la performance !
Au-delà de sa fonction fédératrice de divertissement de masse (et cela n’est en rien péjoratif), applicable dès ses origines, le cinéma a de tous temps alimenté ce vivier d’expérimentations qui ouvrit un champ transgressif à l’image en mouvement. Un vivier au sein duquel la notion de performance, ou d’acte performatif, s’inscrit dans celui de filmer, ou d’être filmé. Non pas systématiquement comme l’induit, par exemple, la performance sportive, mais bel et bien dans la notion des effets que produisent — ou provoquent — les actions sur le réel.
Une pratique qui alerte, comme le rappelle Gérard Mayen, “sur le fait que les représentations, loin de se contenter de rendre compte du monde tel qu’il est, ont en même temps pour effet de produire ce monde même.”
Au sein d’un magnifique programme, le cinéma le Gyptis de la Belle de Mai accorde une large part de sa programmation à cette déclinaison cinématographique de la performance, multipliant les angles de vues, à commencer par un focus bienvenu sur l’un des grands cinéastes de la performance — souvent transgressive —, l’Allemand Werner Herzog. Son œuvre, fictions et documentaires cumulés, s’est attachée à repousser les frontières du réel, pour revisiter la place de l’homme dans la nature, et le chaos qui s’y installe, laissant à penser qu’il n’y a pas de fusion entre ces deux entités. Les films programmés ici — d’Aguirre, la colère de Dieu à Petit Dieter doit voler, en passant par le passionnant Les Ailes de l’espoir — sont emplis d’une cosmogonie instable entre ses composantes.
Mais de nombreux films, au sein de cette thématique, témoignent également de quotidiens de personnages qui font des choix hors du commun, se plaçant ainsi dans le champ de la performance. À l’instar du bouleversant Entre les frontières d’Avi Mograbi, du sublime Brothers of the Night de Patric Chiha, de l’intrigant Sac la mort d’Emmanuel Parraud ou de La Femme qui est partie de Lav Diaz. Enfin, soulignons les deux cycles qui entrent dans cette thématique, celui proposé en partenariat avec le Printemps du film engagé (et la projection de La place publique de Natacha Samuel, accompagnée de la fine équipe de Primitivi), ainsi que les séances festives s’inscrivant dans le cadre du fameux festival Latcho Divano.
Emmanuel Vigne
Thématique Performance : du 15/02 au 11/04 au Cinéma Le Gyptis (136 rue Loubon, 3e). Rens. : 04 95 04 96 25 / www.lafriche.org
Le programme complet de la Thématique Performance ici : http://www.journalventilo.fr/#recherche=gyptis
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