SIGNIFICATION DU LIBÉRALISME

Billet de blog
le 27 Jan 2019
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Une initiative révélée par « Marsactu » le 24 janvier nous engage à réfléchir aux significations politiques du libéralisme et à la place de l’engagement dans la culture néolbérale.

 C’était jeudi. Comme tous les matins, je m’apprêtais à lire tranquillement les titres de Marsactu, l’œil encore un peu ensommeillé, quand une information m’a brutalement éveillé. Pierre Coronas écrivait : « Courant décembre, en pleine mobilisation lycéenne contre la réforme du bac, le directeur départemental des services de l’Éducation nationale dans les Bouches-du-Rhône a écrit aux proviseurs des lycées du département. Il leur demandait alors d’empêcher des réunions entre professeurs, parents et élèves ». Le débat est interdit dans les lycées qui devraient, au contraire, les lieux dans lesquels il s’apprend, les lieux dans lesquels les élèves, citoyens ou futurs citoyens, font l’apprentissage du débat public. Au-delà de l’autoritarisme de l’exercice du pouvoir sous la présidence de M. Macron, cet événement nous interroge sur les significations du libéralisme.

L’économie est une science politique

Rappelons-nous ce qu’explique Marx en 1857, en écrivant la Critique de l’économie politique, puis, un peu plus tard, en engageant la rédaction du Capital : l’économie ne peut être que politique. Quand Marx écrit la Critique, c’est justement pour dénoncer la séparation, voulue par le libéralisme, de l’économie et du politique, c’est pour rappeler que l’économie n’a de signification que dans le politique, alors que le libéralisme cherche à l’en séparer pour que l’économie ne soit pas soumise au pouvoir politique. L’économie est là pour penser la manière dont les politiques pensées et mises en œuvre par les pouvoirs peuvent améliorer la condition de ceux qui habitent leurs pays, qui y travaillent, qui y vivent, pour penser la façon dont une politique économique peut garantir la sécurité de l’emploi, la sécurité des habitants, leur santé, leur avenir et celui de leurs enfants. Séparer l’économie et le politique, comme le fait le libéralisme encore naissant à l’époque de Marx, revient à s’assurer que les pouvoirs politiques ne puissent pas imposer leurs choix aux entreprises, aux acteurs financiers, aux autres pouvoirs, c’est-à-dire aux pouvoirs des acteurs économiques. En effet, l’urgence, pour le libéralisme, est de faire en sorte que les pouvoirs démocratiquement institués, issus des choix des peuples, ne puissent pas s’imposer aux pouvoirs des entreprises, des banques et des capitaux. Or c’est bien la montée du libéralisme à laquelle nous assistons aujourd’hui : la mondialisation des échanges économiques et des flux financiers entraîne que les acteurs économiques échappent aux pouvoirs nationaux. À cet égard, l’évolution contemporaine de l’Union européenne est une illustration de cette montée en puissance des pouvoirs des acteurs économiques, grâce, notamment, à l’indépendance de la Banque centrale européenne qui décide la politique qu’elle mène indépendamment des pouvoirs politiques. C’est bien pourquoi il faut repenser aujourd’hui cette critique de l’économie politique, afin que l’économie retrouve sa dimension pleinement politique.

Significations contemporaines de la séparation de l’économie et de la politique

C’est que, si Marx s’exprime clairement, au milieu du XIXème siècle, sur la dimension politique de l’économie, sans doute faut-il repenser aujourd’hui les significations du retour de l’économie dans le politique. En effet, les enjeux des relations entre économie et politique ne sont peut-être plus les mêmes. On peut donner quatre significations à la séparation de l’économie et du politique et, en même temps, à l’urgence de les faire se réunir, de faire en sorte que l’économie s’inscrive dans un projet politique. D’abord, nous en avons parlé au commencement de ce texte, la mondialisation des rapports sociaux a fini par permettre aux pouvoirs économiques d’échapper au contrôle des pouvoirs politiques. Devenues internationales à la fois par leurs capitaux et par leurs dirigeants, les entreprises peuvent ne plus être soumises à l’autorité des pouvoirs politiques. Par ailleurs, l’accroissement de la place de l’énergie dans les politiques économiques rend d’autant plus urgent que les acteurs politiques retrouvent la pleine maîtrise de leurs choix en matière de politique énergétique et de politique climatique. D’autre part, la politique de l’emploi est un des domaines dans lesquels il est particulièrement urgent que les pouvoirs politiques, démocratiquement choisis, retrouvent la maîtrise des engagements des pays. En outre, c’est dans le domaine de la formation que le rôle de l’État devrait retrouver son importance : les choix politiques comme celui de « Parcoursup » montrent bien comment les pouvoirs politiques consentent, aujourd’hui, dans le libéralisme, à se soumettre aux acteurs économiques, ce qui est grave parce que cela consiste à dénier les choix des citoyens. C’est qu’enfin, s’il devient urgent que le politique retrouve le pouvoir sur l’économie, c’est que ce sont les acteurs politiques qui sont choisis par les citoyens, par les peuples, alors que les acteurs économiques et financiers, dans les cultures libérales, ne fondent leur pouvoir que sur les fortunes dont ils disposent et sur les inégalités qu’elles entraînent. Pour retrouver le sens du mot « liberté »et celui du mot « égalité », il est plus que temps de manifester le rejet des politiques libérales des pouvoirs contemporains.

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