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Rio, bravo !

Billet de blog
le 22 Août 2016
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Les Jeux sont faits. Le bilan est satisfaisant, sans être parfait, pour l’organisation et l’ambiance. Le niveau sportif s’est avéré remarquable, pour ce qu’il a été possible d’en juger grâce à une couverture TV somptueuse. La quinzaine vécue en apnée, qui a éloigné un temps les fracas de la vie quotidienne, a atteint son terme sans incident majeur. On va attendre Tokyo, en rêvant à Paris et Marseille.

Rio, bravo !
Rio, bravo !

Rio, bravo !

La quinzaine olympique, quand elle se déroule à un autre bout du monde, c’est deux semaines de sollicitations haut de gamme pour l’organisme. Couché très tard, levé trop tôt, on pourrait presque se croire athlète de haut niveau, avec tendinite de la zapette, et début d’escarre sur le popotin.

Le dernier jour était un moment de routine, il était temps que cela s’arrête. Les Français favoris ont perdu, comme au hand. Le public est déçu, sans mesurer que c’est un exploit gigantesque que d’arriver trois fois de suite en finale, et de n’en perdre qu’une.

Toute série qui dure s’approche de sa fin, on est d’accord. Sauf pour les Américains en basket, qui n’ont pour seul travail que de nettoyer leurs maillots, tâchés des débris de toutes les sélections qu’ils ont successivement écrabouillées. La Serbie, en finale, n’a pris que trente points parce que c’était jour de fête.

Un superbe boxeur français, Tony Yoka (91 kg), a apporté la dixième médaille d’or pour la délégation tricolore, la deuxième dans sa discipline, autant que le judo et l’équitation. On espère vraiment pour les six médaillés de boxe, et les cinq autres combattants valeureux, qu’ils profiteront bientôt du vent de renouveau nettoyant un sport qui sentait vraiment le moisi. Ce sont des ambassadeurs magnifiques du mérite, de la bonne éducation, de la modestie et du travail. En France, ils sont bien entendu chez eux. Mais à l’étranger, eux, ils ne nous font pas honte.

Un vététiste méritant, Maxime Marotte, a porté son écot dans la Chocolaterie de France, échouant au pied du podium, comme dit la rengaine à la mode sur les plages de Rio.

La France a obtenu son record de breloques, autant de médailles que l’Allemagne (42), mais un bon tiers de titres en moins (10 contre 17), ce qui la place en 7e position au classement général. Depuis la fin des boycotts, elle n’avait fait mieux qu’à Atlanta en 1996 (5e) et Sydney en 2000 (6e). La concurrence est plus large et plus rude. Il faut donc redoubler d’efforts. On y reviendra demain.

Le Brésil s’est offert une dernière douceur avec le titre masculin de volley, tandis que les Etats-Unis et la Russie se mettaient une splendide peignée pour la médaille de bronze, que les Gringos ont obtenu après avoir été menés deux sets à rien. Même magnifique bagarre pour la 3e place en basket, où l’Espagne a devancé d’un souffle l’Australie.

Le marathon s’est couru sous la pluie, pour rappeler que les vacances étaient finies, et c’est un Kényan, Eliud Kipchoge, qui a coupé la ligne en solitaire. Depuis 20 ans, l’or n’a échappé qu’une fois au continent africain, quand l’Italien Baldini s’est imposé en 2004.

Parmi les nouveaux sports, le golf est resté discret. Il n’est palpitant que si l’on suit la compétition de bout en bout, ce qui est impossible pendant les Jeux, même avec six chaînes dédiées. Le rugby à VII semble avoir trouvé d’emblée sa place, avec son format ingénieux et son rythme effréné. Il a eu la délicatesse d’honorer pour sa première apparition les îles Fidji, réservoir inépuisable de talents dont le pays ne profite jamais en Coupe du monde de XV, tant la faim pousse ses meilleurs joueurs à s’exiler.

Les sports issus du marketing d’jeun ont des succès divers : le BMX tourne inévitablement à la pagaille, il n’y manque plus que des vachettes landaises. VTT et triathlon sont en revanche de vraies réussites. Ils couronnent les meilleurs du moment sans discussion, ni  intervention des juges ou des arbitres, sur des parcours spectaculaires qui n’engraissent pas les rois du béton.On espère qu'a Tokyo l'escalade se pratiquera au mont Fuji, en l'honneur d'Hokusai, et que le karaté ne comportera pas de katas, car le Japon a déjà été bien servi.

On attend sans impatience l’arrivée du baseball (softball dans sa version féminine), qui n’y sera au pays du Soleil levant que pour réjouir les Japonais et les TV américaines, et qui n’est pas près de faire rêver les gamins népalais. Même prédiction venimeuse pour le surf et le skateboard, mais bon, si les pontes de l’olympisme, pratiquants qu’on imagine peu assidus, pensent que cela va leur attirer les faveurs des ados…

Le foisonnement des images TV, qui tournait au concours de clips, nous a un peu privés de grands moments d’émotion. Mais on n’oubliera pas l’étreinte entre Dimitri Bascou et son entraîneur Giscard Samba ; les sifflets brésiliens qui ont fendillé la carapace de Renaud Lavillenie ; le podium du 100 m papillon avec trois gaillards, dont le Dieu Phelps, sur la deuxième marche ; le masque de sparadrap qu’arborait la judokate Audrey Tcheuméo lors d’un combat victorieux ; les relayeuses américaines du 4 x 100 m disputant seules un repêchage au temps, avant de s’imposer en finale ; les terribles gamelles des cyclistes dans les courses sur route ; Sandra Perkovic, la gagnante croate du lancer du disque (devant notre Mélina à nous), qui balance cinq fois l’engin dans les filets de la cage, et ne réussit qu'un seul essai à 69,21 m, deux mètres et demi devant toutes les autres ; et puis des chutes, des buts, des blessures, des points de tennis de table, les mimiques des arbitres de taekwondo, les peluches lancées par les entraîneurs de lutte, et toute cette sorte de choses futiles et tellement importantes…

 

On se sent obligé de citer Phelps et Bolt, bien entendu, dont c’étaient sans doute les dernières apparitions. Et on garde pour la fin Teddy Riner, souverain incontesté du sport français, intimant le silence d’un simple geste au public brésilien, et souriant à la Terre entière après y avoir planté tout ce qui se présentait devant lui vêtu d’un kimono.

On ne voit plus passer le temps, et les cheveux s’arrêtent de tomber pendant quinze jours tous les quatre ans, sauf si on les arrache. Les Jeux ont pourtant bien changé. Les sprinteurs n’ont plus d’appareils dentaires, et les nageurs plus de combinaisons, la mode évolue. Et les Jeux n'ont pas changé, on grince toujours en entendant les commentaires des cérémonies d'ouverture.

On n’a rien vu du trampoline, est-il encore en vogue ? Il paraîtrait que la Canadienne Rosannagh Mc Lennan (27 ans ; 1,59 m ; 55 kg) et le Biélorusse Uladiszlau Hancharou, appelé par les Russes Vladislav Goncharov (20 ans ; 1,73 m ; 66 kg ) se soient imposés avec respectivement 425 et 210 millièmes de point d’avance. Ce devait être excitant. On les prend plutôt petits pour qu’ils ne touchent pas le plafond. Mais est-ce bien une bonne idée, se demandent les télés.

La politique arrive à petits pas dans l’espace olympique où elle n’est pas bienvenue depuis ses dernières tentatives d’intrusion. Ce n’est même pas la peine d’en parler.

Si on cherche un lien avec les chroniques du passé, on y ajoute étrangement des souvenirs peronnels, jaunis mais vivaces. Les buts inscrits par un footballeur kanak, Marc Kanyan, dans le stade olympique de Mexico, celui où Bob Beamon semble n’être jamais retombé. Ou d’autres buts inscrits par un Zambien inconnu, Kalusha Bwalya, désintégrant à lui seul l’équipe d’Italie à Séoul.  Mais aussi l’affrontement Coe-Ovett du demi-fond à Los Angeles. La nageuse hongroise Krisztina Egerszegi et l’Allemand de l’Est Roland Matthes, les plus beaux talents jamais vus dans une piscine.

Et au-dessus encore, une étoile filante : le Néo-Zélandais Peter Snell, se retirant invaincu à seulement 26 ans, après avoir calciné les pistes de cendrée ou d’herbe entre 1960 et 1964. Plus personne n’a réalisé après lui le doublé 800 m -1 500 m (Tokyo 1964), et seul le Kényan David Rushida a égalé (à Londres et Rio) ses deux victoires consécutives sur 800 m (Rome, puis Tokyo).

Il y a au moins un ancien petit garçon dans le monde qui pense encore à Peter Snell, inconnu éblouissant vite rentré dans l'obscurité, et qui le remercie toujours pour lui avoir inoculé le virus de l’athlétisme.

 

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