Retour à Marseille

Billet de blog
le 15 Juil 2016
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Je viens de revenir habiter Marseille, après l’avoir quittée en 1993. J’en étais parti à la fois pour des raisons personnelles et pour des raisons professionnelles. J’ai eu envie de faire part aux lecteurs de Marsactu de ms impressions en revenant, de leur donner ce que je pourrais appeler quelques notes de lecture de cette ville et de son paysage, dont je retrouve les lieux, les sites, formes, les signes. C’est que Marseille, plus peut-être que d’autres villes, est une ville qui se lit, qu’il faut apprendre à lire, dont il faut prendre l’expérience des codes et des langages qui l’expriment. Habiter Marseille, ce n’est pas seulement vivre dans un lieu urbain particulier, c’est véritablement lire la ville.

 

Peut-être, d’ailleurs, justement, est-ce la première impression que j’ai eue en revenant : alors que, quand j’avais quitté cette ville, une sorte de bouillonnement politique, intellectuel, culturel, mais aussi environnemental, donnait à Marseille un élan et un dynamisme rare dans une ville de cette importance, j’ai le sentiment que la ville n’est plus habitée par ceux qui y vivent. Cela se traduit, d’abord, par une dégradation de l’environnement et de l’espace urbain : les rues sont mal entretenues, elles sont sales, il y a des amoncellements d’ordures et de détritus dans certaines villes, les maisons, qui pourraient être magnifiques pour certaines d’entre elles, ne sont pas nettoyées ni ravalées, leurs façades n’ont pas les couleurs et les formes qu’elles devraient avoir. C’est comme si le patrimoine urbain de Marseille, pourtant proclamée il y a quelques années « ville européenne de la culture », était laissé à l’abandon, sans que s’en soucient les habitants ou les pouvoirs publics.

 

Sur les transports et les déplacements dans Marseille, on peut se rendre compte que les voitures prennent trop de place et que le métro, les tramways et les bus sont, sans doute, insuffisants. Le réseau des transports en commun est mal conçu : les métro et les tramways se doublent, certains quartiers ne sont pas desservis, il n’y a pas de réseau métropolitain articulant les transports marseillais et les transports des villes comme Aix ou d’autres communes, qui s’articulent aux transports urbains de Marseille.

 

Sur l’environnement et l’espace marseillais, je remarque, d’abord, que les jardins sont en nombre insuffisant : en-dehors du Parc Borély et du Parc Zoologique, il y a peu d’espaces verts dans la ville de Marseille. Il y  a peu d’arbres dans la ville, et l’espace urbain est touché par une pollution importante liée à la fois à la circulation des voitures et des camions et à l’absence d’entretien des sites et des lieux de l’espace urbain. Par ailleurs, on peut remarquer que l’espace urbain ne s’articule pas à la mer. Sans doute serait-il important de mieux lier l’espace urbain de Marseille et la mer qui se situe près d’elle.

 

La culture semble absente de Marseille: si le M.U.C.E.M. et d’autres musées sont présents dans l’espace urbain, on a le sentiment que les cinémas, les théâtres, les opéras, ne sont pas pleinement actifs dans la ville. Si l’on compare Marseille à des villes de semblable importance comme Lyon, on a le sentiment que la vie culturelle n’est pas présente dans cette ville de la même façon que ces villes comparables. La pollution dans l’espace urbain s’accompagne d’une dégradation de la vie culturelle marseillaise.

 

C’est que la ville donne l’impression d’être une ville pauvre, ou d’être une ville dans laquelle la séparation entre habitants riches et habitants pauvres est particulièrement sensible. Les constructions des quartiers pauvres sont mal entretenues, les tours et les grands ensembles font apparaître une division sensible entre quartiers riches et quartiers pauvres, le chômage et la précarité des situations sociales se lisent dans le paysage urbain. Peut-être est-ce une des raisons qui expliquent que les habitants de Marseille ne s’approprient pas pleinement l’espace urbain et semblent vivre dans la ville sans l’habiter.

 

Sans doute faut-il trouver à cette situation qui semble une situation de crise ou de dégradation une explication dans la politique urbaine menée par la municipalité de J.-C. Gaudin, maire depuis 1995. Sans doute conviendrait-il de commencer à penser un renouveau de la ville et de l’espace urbain dans des projets destinés à préparer la prochaine élection municipale, en 2020. Quatre points me semblent devoir orienter les projets de développement urbain des candidats aux élections municipales : l’élaboration d’une véritable politique environnementale, le développement du réseau urbain des transports en commun, la mise en œuvre d’une véritable politique du patrimoine urbain, l’engagement d’une politique de la ville qui en soit une, à la fois sur le plan économique et sur le plan social, destinée à l’intégration de tous les quartiers de la ville dans une véritable métropole urbaine.

Commentaires

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  1. LaPlaine _ LaPlaine _

    Ce texte est curieux. Vous semblez non pas revenir à Marseille mais découvrir la ville pour la première fois, tous les points négatifs listés sont récurrents quasiment depuis les années 70. La ville n’a d’ailleurs fondamentalement pas changé depuis cette période. Il n’y a jamais eu de réelle propreté ou d’espaces verts significatifs à Marseille. Que la situation se soit peut-être dégradée ces dernières années avec une gestion complaisante et plus ou moins laxiste de la ville, on peut le dire sans trop de risques. Ce texte me fait penser cependant à un catalogue des problèmes récurrents de la ville plutôt qu’à une description comparative et évolutive des deux époques que vous citez.

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    • VitroPhil VitroPhil

      Tout à fait moi qui ait déposé mes valises en 1992 à Marseille, je dressai un tableau très similaire. J.C Gaudin n’a pas fait grand chose de bien. Mais le problème est tout à la fois plus ancien et plus profond.

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  2. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    Votre description est une sorte de bilan de ce que vous appelez “la politique urbaine menée par la municipalité de J.-C. Gaudin”, élue sensiblement depuis votre départ. Mais appeler “politique urbaine” ce qui n’est en réalité que du laisser-faire, c’est un peu excessif…

    Les quatre axes que vous suggérez pour l’horizon 2020 relèvent en effet de l’urgence. Le retard pris sur tous ces sujets est sans doute en partie irrattrapable. Et il y a tant d’autres sujets sur lesquels il faudrait mettre en oeuvre une politique digne de ce nom : un politique de développement du sport, une politique scolaire exigeante pour lutter contre les fractures sociales monstrueuses qui décomposent cette ville…

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  3. Lecteur Electeur Lecteur Electeur

    Entièrement d’accord avec Electeur du 8e ci dessus :

    “Et il y a tant d’autres sujets sur lesquels il faudrait mettre en oeuvre une politique digne de ce nom : un politique de développement du sport, une politique scolaire exigeante pour lutter contre les fractures sociales monstrueuses qui décomposent cette ville…”

    et pour le sport, précisons, sport pour les habitants, sport-loisir, sport-santé.

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