Environnement et transports à Marseille

RECOMPOSER L’ESPACE URBAIN PAR LES TRANSPORTS EN COMMUN

Billet de blog
le 17 Juin 2018
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Sans doute faut-il aller plus loin que dans les réflexions que nous avons proposées à « Marsactu » les dernières semaines au sujet des transports en commun : en effet, c’est tout l’espace de la ville que les réseaux de transports en commun concourent à recomposer.

UNE NOUVELLE APPROCHE DE L’ESPACE DE LA VILLE

Les transports en commun n’ont pas seulement une fonction dans la ville, on ne peut pas les réduire à des instruments permettant aux habitants et aux visiteurs de se déplacer dans l’espace de la ville : c’est une véritable recomposition de l’espace urbain que les réseaux de transports en commun mettent en œuvre. N’oublions pas, d’abord, le sens des mots : ce mt, réseau, est issu d’une racine qui désigne le filet de pêche : c’est pourquoi on parlait, au dix-septième siècle, des « rets », et c’est de là que vient le mot « résille ».Les réseaux désignent, en réalité, ce qui structure l’espace en le quadrillant par une structure, en l’organisant par une logique qui le recouvre en le rendant pensable : c’est pourquoi les réseaux ne désignent pas seulement les structures des transports et des déplacements, mais désignent aussi les structures de distribution d’énergie ou d’eau dans l’espace public. Repenser les réseaux de transports en commun ne signifie pas seulement que l’on recherche une meilleure couverture, une desserte plus efficace des lieux de la ville, mais, plus loin, que l’on cherche à engager une nouvelle approche de l’espace de la ville, notamment dans trois directions : l’égalité (il importe que tous les lieux de la ville, et, donc, tous ses habitants, soient desservis de la même façon), l’économie (il importe que les transports en commun soient accessibles à tous et que leur gestion soit aussi rationnelle que possible) et l’aménagement de l’espace (les réseaux de transports en commun font partie des logiques qui permettent de prévoir la structure des espaces en devenir).

 

DE NOUVEAUX USAGES DE L’ESPACE URBAIN

Si les réseaux de transports en commun n’ont pas une simple fonction, ne se réduisent pas à des services offerts aux habitants d’une ville, c’est qu’ils concourent à imaginer de nouveaux usages de l’espace urbain. D’abord, c’est l’usage social de l’espace qu’ils proposent : au lieu de se déplacer seul, comme quand on marche ou quand on se déplace en voiture particulière, quand on se déplace en transports en commun, on se trouve en relation avec d’autres habitants de la ville, on peut parler avec eux, on peut observer les autres et adopter leurs pratiques de l’espace urbain, on peut commenter leurs usages de l’espace, pour soi-même ou pour les autres, bref : les transports en commun permettent de mettre en œuvre du langage et de la communication autour de la ville. Par ailleurs, les transports en commun offrent de nouveaux espaces, parfois des espaces inconnus du grand nombre, aux pratiques des habitants de la ville : c’est en organisant la desserte de nouveaux lieux et de nouveaux espaces que les réseaux de transports en commun font naître dans l’espace urbain des lieux et des sites qui en étaient jusqu’alors exclus ou ignorés. C’est ainsi, par exemple, que les quartiers Nord peuvent être pleinement insérés dans l’espace marseillais. Enfin, les réseaux de transports en commun peuvent offrir aux loisirs des espaces qui étaient jusqu’alors destinés exclusivement au travail – et inversement, de la même façon qu’une bonne desserte des espaces urbains le soir ou la nuit permettent d’étendre le temps d’usage des sites et des lieux de la ville.

 

RÉSEAUX ET CITOYENNETE URBAINE

C’est pour toutes ces raisons que les transports en commun concourent, finalement, à construire une nouvelle logique de la citoyenneté urbaine. C’est que la logique du filet, qui domine la figure du réseau, est aussi celle de la solidarité : habiter une ville, ce n’est pas seulement choisir d’y habiter ou d’y travailler, c’est aussi engager une solidarité avec les autres habitants. C’est cela, la citoyenneté urbaine : habiter une ville, c’est aussi s’y engager dans une politique de la solidarité avec les autres habitants. Les transports en commun permettent d’élaborer une façon solidaire d’habiter la ville et d’y travailler : ils permettent de participer à la construction d’une économie politique, d’en être acteur et responsable avec tous les autres, avec tous ceux avec qui on partage les mêmes transports en commun. C’est bien la raison pour laquelle une véritable politique de la ville, c’est-à-dire une politique de la ville qui construit et exprime une identité urbaine, ne peut pas se fonder sur une forme d’individualisme à la petite semaine, mais ne peut se fonder que sur des réseaux, c’est-à-dire sur un temps long et sur une économie partagée. À Marseille, il y a urgence dans ce domaine.

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