Marseille, ni n’oublie, ni ne pardonne
Marseille, ni n’oublie, ni ne pardonne
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Cette semaine, trois ans plus tard, Marseille se souvient
Trois ans après le 5 novembre, un autre 5 novembre pour pleurer ses morts et se souvenir des vivants. Marseille se souvient de ses immeubles qui s’effondrent sur Julien, 30 ans, Taher, 58 ans, Chérif, 36 ans, Fabien, 52 ans, Simona, 30 ans, Niasse, 26 ans, Ouloume, 55 ans, et Marie-Emmanuelle, 55 ans.
Trois ans après le 5 novembre, ce 5 novembre est l’occasion de juger, d’une municipalité à l’autre, le rôle de la ville. À l’ancienne, la honte et l’indignité fruits de plusieurs décennies d’incuries dans l’entretien de l’habitat et qui a fait de Marseille la capitale de l’insalubrité tandis que les arrêtés de périls ne cessent de s’empiler. Bientôt, les cadors de l’ancien pouvoir municipal devront en répondre devant la justice avant de retourner dans les décombres de l’histoire. Il faudra bien que l’État et ses services déconcentrés assument leur part. Et avec eux les politiques d’austérité qui ont affamé les ressources publiques et goinfré quelques propriétaires. La nouvelle municipalité, quant à elle, poursuit sa politique mémorielle en dévoilant une plaque commémorative inaugurant officiellement la « place du 5-novembre 2018 ». Les collectifs attendent maintenant qu’elle aille plus loin dans les engagements pris, sur le dossier de l’habitat comme sur d’autres.
Trois ans après le 5 novembre, ce 5 novembre poursuit le formidable élan de solidarité né alors. Il en est de cet émouvant projet porté par Noailles Debout qui patrimonialise le quartier en le maintenant vivant. Il en est aussi de ce bouleversant discours des parents de Simona lors de la cérémonie de dévoilement de la plaque. Il raconte comment la jeune femme avait été protégée par un voisin alors qu’elle subissait un harcèlement de rue : « tu vois maman, avait conclu Simona, ne t’inquiète pas, rien ne peut m’arriver, le quartier m’a intégré ». Tout au long de ces commémorations, c’est bien cette ville vivante et solidaire qui s’est exprimée au nom et en défense des quartiers populaires meurtris.
Trois ans après le 5 novembre, ce 5 novembre continue de poser les mêmes questions. Le drame est-il irréductible aux spécificités de la ville, aux responsabilités des élus incapables d’entretenir son parc et faisant payer aux quartiers populaires leur mépris de classe ? Ou, au contraire, est-il le miroir grossissant de politiques déficientes à l’échelle nationale, d’un État local rendu si maigre qu’il en est devenu incapable de lire ses propres rapports ? Marseille capitale des taudis ou laboratoire de l’habitat indigne ? Trois ans après le 5 novembre, le 5 novembre n’en a pas fini.
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