L’IMAGINAIRE ÉCONOMIQUE ET LE SOUVENIR DE LA PROSPÉRITÉ DU PORT

Billet de blog
le 5 Avr 2020
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(Photo : Violette Artaud).
(Photo : Violette Artaud).

(Photo : Violette Artaud).

Un article récent de V. Artaud (« Marsactu », 26 mars) fait état des incohérences de la politique du Port autonome de Marseille qui laisse entrer des bateaux de croisière, parfois gigantesques, qui menacent de faire entrer dans le port et la ville des touristes porteurs du coronavirus, malgré les interdictions décrétées par le premier ministre. C’est l’occasion de réfléchir à ce que représente aujourd’hui le port, à Marseille.

 

Le souvenir de la prospérité

Dans la politique du port qui consiste à laisser entrer les bateaux de croisière, au risque d’aggraver la contamination de la ville par le coronavirus et au mépris des impératifs exprimés par le gouvernement, une place importante est, sans doute, occupée par le souvenir d’une prospérité passée. C’est la mer qui a fondé la prospérité, la richesse, de Marseille et qui lui a, ainsi, donné sa place dans l’espace économique et politique de la France, mais aussi dans l’espace économique de la Méditerranée. C’est aussi la mer qui a permis la ville de devenir ce qu’elle est aujourd’hui : la deuxième ville de France par sa population. Mais, aujourd’hui, cette prospérité, cette grandeur, même, ne sont, sans doute, plus que des souvenirs, elles ne sont, sans doute, plus que des figures, comme si Marseille ne vivait, aujourd’hui, que dans un monde de souvenirs, de récits, de légendes. Dans une période de crise sanitaire comme celle que nous vivons aujourd’hui, tout se passe comme si la ville, à défaut de soigner et de guérir ses habitants, se réfugiait dans un espace imaginaire peuplé de figures de l’histoire. À défaut de retrouver la richesse, à défaut de redevenir une ville riche, Marseille se débat, ainsi, dans sa mémoire, ce qui est une forme de déni de la réalité.

 

La place du port de Marseille dans l’espace méditerranéen

Il importe de repenser la place de Marseille et de son port dans l’espace de la Méditerranée. Cette place peut être importante dans trois domaines. Le premier est celui de la politique : Marseille joue un rôle important dans les conflits qui se déroulent dans le monde méditerranéen, par exemple en accueillant des réfugiés, mais elle pourrait devenir un lieu, en quelque sorte neutre, d’échanges entre les acteurs de ces conflits. Le second rôle que pourraient jouer Marseille et son port dans l’espace de la Méditerranée pourrait être celui d’un lieu de réflexion prospective sur ce que pourrait être l’avenir économique méditerranéen. Enfin, le port de Marseille pourrait jouer un rôle important dans l’élaboration de nouveaux modes d’échanges, de nouvelles logiques de transport maritime et de nouvelles pratiques logistiques tournées vers le monde de demain.

 

Le port de Marseille et la mondialisation

Ne nous trompons pas : tout le monde commence à s’accorder, aujourd’hui, sur l’idée selon laquelle la mondialisation a une place majeure dans la propagation du coronavirus dans le monde entier. En ce sens, l’activité de Marseille peut lui assurer une place majeure dans l’économie du monde – mais aussi dans la diffusion du coronavirus. Il importe, dans ces conditions, de mettre en œuvre une réflexion approfondie et d’engager une politique active dans l’élaboration d’une politique économique de la métropole marseillaise lui permettant de retrouver une place importante dans un espace économique devenu mondial, mais il faut, pour cela, penser une économie d’échanges et de circulation dans le monde qui ne se confonde pas avec une mondialisation qui semble dominée par le libéralisme au lieu de l’être par une politique d’échanges de nature à assurer une véritable prospérité aux habitants des pays du monde qui ont fini par être livrés par leurs dirigeants à ce qui est devenu le totalitarisme libéral de la mondialisation.

 

Le port dans l’économie de la ville et de la métropole

Si le port fut la source de la richesse de Marseille et de sa grandeur, il y a quand même une grande différence entre la situation du passé et celle du présent. À la lecture de l’article de Violette Artaud sur les croisiéristes, je me disais qu’il y a tout de même une différence entre la peste de 1720 et les croisiéristes d’aujourd’hui : à la limite, même si elle fut dramatique et même si l’arrivée du bateau chargé de la peste dans le port de Marseille a entrainé l’arrivée de la mort, on peut dire que ce bateau jouait un rôle réel dans l’économie de la ville et dans celle de la France et dan celle de l’espace méditerranéen, alors que les croisiéristes apportent le risque de la maladie pour un projet économique de simple tourisme, pour une activité économique qui ne sert à rien dans le développement de la ville et dans son futur – sauf à penser que Marseille se décide à devenir une ville livrée au loisir et au tourisme, comme tant de villes des pays du monde du Sud.

Pour que Marseille retrouve la prospérité, il faut qu’elle cesse de se complaire ainsi dans l’évocation des figures devenues mythiques d’un passé révolu et qu’elle retrouve une activité réelle dans l’économie et dans les échanges du monde contemporain.

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