Les critiques d’Olivier Véran à Didier Raoult valent aussi pour Jean-François Delfraissy
Les critiques d’Olivier Véran à Didier Raoult valent aussi pour Jean-François Delfraissy
Portrait officiel d’Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé – 24 février 2020. Nicolo-Revelli-Beaumont – Ministère sociaux / DICOM / Sipa press
Questionné sur BFM samedi 5 septembre, Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé, a reproché au professeur Didier Raoult d’avoir dit « des trucs qui étaient factuellement faux et qui ont pu semer du trouble. Il a dit il n’y aura pas de deuxième vague, ensuite que la deuxième vague viendrait de Nouvelle Zélande, ensuite que le virus mourra pendant l’été ».
Ces reproches pourraient aussi bien s’adresser à Jean-François Delfraissy, président du « conseil scientifique » sur mesure que le gouvernement a mis en place au début de l’épidémie, officiellement pour l’éclairer, mais peut-être aussi d’abord pour le protéger, alors que le gouvernement aurait pu s’appuyer sur des institutions préexistantes, à commencer par le Haut conseil de la santé publique, le comité consultatif national d’éthique et le Conseil économique, social et environnemental, la problématique dépassant largement les seules questions sanitaires.
Car depuis le déconfinement, Jean-François Delfraissy a martelé sa crainte d’une deuxième vague épidémique à l’automne. Ce faisant, il a aussi conforté l’idée que la première vague était passée, que la baisse des hospitalisations et le recul apparent des cas résultaient plus d’un mouvement naturel, typique à de nombreux coronavirus, que du respect des gestes barrières et du maintien de contraintes légales et règlementaires privatives de certaines libertés publiques.
A ceux qui, hier, cherchaient à se rassurer à bon compte pour passer un été normal, il a donné l’impression que les gestes barrières n’étaient pas l’explication principale du recul épidémique, tout en suggérant aussi que ces mêmes gestes barrières seront, demain, de peu d’efficacité face à un mouvement naturel inéluctable.
Il a donc lui aussi semé le trouble !
L’affirmer n’est pas exagéré puisque ce trouble, que Jean-François Delfraissy a semé avec persévérance, semaine après semaine, jusqu’à devant la mission d’information de l’Assemblée nationale, chacun peut le voir en œuvre, au plus haut sommet de l’Etat, en revisionnant la conférence de presse d’Edouard Philippe, donnée le 28 mai pour annoncer la deuxième phase du déconfinement. A la cinquante-neuvième minute, la question d’une journaliste sur la possible saisonnalité du virus, initie ainsi un curieux pas de deux entre, d’un côté, un premier ministre rassurant, qui se réfère explicitement au président du conseil scientifique, « qui lui, est médecin, et donc s’y connaît », pour dire, que « dans les pays à climat tempéré, 80% des virus de ce type, avait tendance à disparaître pendant l’été, ce qui est plutôt une bonne nouvelle », et de l’autre côté, Olivier Véran, beaucoup plus prudent, qui rappelle que le virus continue de circuler activement. Sans être médecin, quiconque pouvait se dire qu’au même moment, la situation épidémiologique des Etats-Unis suffisait à ranger au placard les enseignements construits sur les autres coronavirus connus.
Jean-François Delfraissy devrait aussi nous expliquer sur quelles sources il se basait début juin pour estimer à un millier le nombre de nouveaux cas par jour, quand les statistiques des tests PCR annonçaient de 500 à 1000 nouveaux cas, alors que les spécialistes expliquaient dans le même temps que ce nombre sous-estimait grandement les cas réels, évoquant, pour certains, un rapport de un à cinq. Une simple règle de trois basée sur le nombre quotidien des nouvelles hospitalisations et sur l’estimation du taux d’hospitalisation publiée par l’Institut Pasteur en avril (3,6%), suggérait elle aussi que le chiffre de 1000 cas par jours était largement sous-estimé.
S’il est normal de demander à un chercheur qui promeut un traitement particulier de la rigueur et de la transparence dans ses méthodes de travail, l’exigence vaut aussi pour les statistiques avancées par le conseil scientifique et son président. Elle vaut d’autant plus que ce conseil scientifique se doit d’être exemplaire du fait de son statut et en raison du rôle exorbitant que le gouvernement lui a donné dans la détermination des restrictions aux libertés fondamentales que chacun d’entre nous connait depuis plusieurs mois et pour encore, sans doute, de nombreux mois encore, peut-être un autre été.
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En résumé, personne ne sait ce qui se prépare. On assite depuis des mois à un combat de “coqs” qui en dit long sur la solidarité qui devrait être un principe à la tête de nos services de santé. Les seules données exploitables sont les données statistiques. Le problème c’est que la probabilité d’avoir des tests performants est d’autant plus réduite que l’on veut les utiliser en grand nombre. Comme pour les tests sérologiques, les PCR peuvent aussi produire jusqu’à 20% de faux négatifs ou faux positifs. Avec de telles variations le seul espoir reste l’immunité collective; mais pour cela, il aurait mieux valu éviter les gestes barrière pendant la phase de “léthargie” du virus. Maintenant, il est peut être trop tard.
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Votre analyse MalMass est très pertinente. Merci.
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