Confusions autour de la plaque aux victimes du terrorisme dégradée à la gare Saint-Charles
Lundi 11 novembre 2024, jour de commémoration nationale, la presse locale s’emballe, suivie de la presse nationale, des autorités et des élus à la suite de la prise de connaissance de la dégradation de la plaque commémorative installée à la gare Saint-Charles en mémoire des victimes des attentats terroristes : “Marseille : la plaque commémorative de l’attentat de la gare Saint-Charles dégradée” annonce La Provence. “La Stèle commémorative de l’attentat de la gare Saint-Charles vandalisé” reprend La Marseillaise, le lendemain.
Face à cette dégradation, l’émoi est légitime et rassurant. L’oubli et l’indifférence ne semblent pas encore de mise, pour l’instant. Toutefois, les confusions entretenues par la presse locale, les élus et les autorités locales interrogent sur la perte de conscience du sens des monuments mémoriels installés dans la ville, même lorsqu’ils sont récents. Et derrière cette perte de sens, pointe la certitude de l’oubli.
Car, contrairement aux affirmations des uns et des autres, la plaque volée et le monument dégradé ne commémoraient pas spécifiquement la mémoire des victimes de l’attentat de la gare Saint-Charles, dont le souvenir est entretenu par une plaque commémorative spécifique toujours en place à proximité, sur le mur de la gare Saint-Charles, plaque d’ailleurs reprise par erreur par La Croix, pour illustrer l‘annonce de la dégradation dans un article du 11 novembre.
La plaque dégradée avait une vocation mémorielle beaucoup plus large, en souvenir de toutes les victimes de tous les attentats terroristes. “A la mémoire des victimes des attentats terroristes”, indiquait-elle d’ailleurs sobrement, “attentats” étant au pluriel, malheureusement. Le 12 mars 2022, La Marseillaise rendait ainsi compte d’une cérémonie devant ce monument, en présence du préfet de Région et du maire, Benoit Payan, “en mémoire des Français morts suite à des attaques terroristes en métropole et à l’étranger“.
A l’origine, cette plaque mémorielle était ailleurs, sur le Rond-Point du Prado. Profitant de sa rénovation, Martine Vassal avait voulu une plaque commémorative à toutes les victimes des attentats de novembre 2015. Son emplacement originel était encore visible il y a peu (et l’est peut-être encore), sur le mur d’un local technique ou d’une bouche d’aération qui fait face au passage clouté que les piétons empruntent pour traverser le Boulevard Rabatau devant l’entrée du parc Chanot. La plaque avait été ensuite déplacée devant la gare Saint-Charles, dans un lieu plus visible et plus apte à la commémoration, mais dans un dispositif qui tenait plus du mobilier urbain que du monument commémoratif.
D’une certaine manière, l’oubli de la raison d’être de la plaque dégradée nous dit donc aussi quelque chose de la sincérité mémorielle de ceux qui l’ont mise en place, en privilégiant l’économie de moyens et la médiocrité des emplacements et des supports. Elle nous dit aussi quelque chose de notre société qui privilégie l’instant. La Troisième République n’est plus depuis longtemps. Finis les monuments solides qui traversent le temps. L’époque est à la communication, à l’évènement, à l’éphémère.
Quant à la date réelle de la dégradation, si comme moi, vous avez pris le train avant le week-end du 11 novembre, vous avez peut-être remarqué que la plaque n’était déjà plus là. Plusieurs jours pour repérer l’absence. C’est aussi le signe d’un “monument” qui n’est pas perçu comme tel, dont le sens n’existe plus.
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