Sous le plus grand chapiteau du monde

Idées de sortie
le 21 Jan 2017
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Minuit. Photo : Géraldine Aresteanu
Minuit. Photo : Géraldine Aresteanu

Minuit. Photo : Géraldine Aresteanu

Le projet de Guy Carrara est plus qu’ambitieux : faire de la Biennale internationale des Arts du Cirque le plus grand festival de cirque du monde.

Forts du succès de Cirque en Capitales (MP 2013), de la première Biennale (85 000 spectateurs) et de l’Entre-Deux Biennales, Raquel Rache de Andrade et Guy Carrara (directeurs d’Archaos, du Pôle cirque et de la Biennale) se sont donné pour mission de créer l’événement cirque qui manquait en France, et ainsi offrir enfin à Marseille une manifestation emblématique de renommée internationale. À force de batailles avec ses mauvaises images, Marseille cherche désespérément à redorer son blason.

L’idée de faire rayonner la Biennale (BIAC) sur un territoire plutôt que sur une ville (ce que fait le festival CIRCA à Auch) a donc suscité l’implication d’un plus grand nombre de collectivités et de structures, en l’occurrence quarante-quatre partenaires culturels sur vingt-sept communes, qui sont lieux de représentations mais aussi, pour certains, coproducteurs de créations. Un choix qui intéressait forcément aussi les collectivités en termes de tourisme, d’économie locale, d’accueil de sponsors et d’offre d’emplois. Cent mille spectateurs sont tout de même attendus durant cette nouvelle édition…

Un rassemblement d’énergies assorti d’une mutualisation des moyens qui permet la venue de grandes compagnies et la tournée de plusieurs spectacles tels que le très remarqué Halka du Groupe Acrobatique de Tanger (Châteauvallon, La Colonne à Miramas, Le Merlan). Et grâce à l’existence d’un important maillage, des compagnies de renommée mondiale comme NoFit State Circus viennent effectuer leur résidence de création dans des lieux repérés, à l’instar du Citron Jaune à Port-Saint-Louis-du-Rhône. En collaboration avec les danseurs de Motionhouse, ils présenteront leur petit dernier, Block, un ballet hallucinant autour d’une construction-déconstruction de vingt blocs de béton. Un show extérieur, gratuit, à suivre de La Seyne-sur-Mer à Ensuès en passant par le Vieux-Port…

Un esprit fédérateur

Au cirque, sans l’autre, tu n’es rien. Que ce soit en haut d’une pyramide humaine ou dans un numéro de voltige : “Si un te manque, tu te manques”. Le main à main semble être l’une des spécialités de l’équipe de la BIAC, qui a réussi le tour de force de rassembler des forces vives autour du travail réalisé toute l’année par le Centre de recherche européen des arts du cirque (CREAC) et le Pôle Cirque, en termes d’accueil de compagnies, d’accompagnement, de résidence et de création, mais aussi d’actions artistiques et éducatives en milieu scolaire, tout en s’appuyant sur les structures porteuses (Territoire de cirque, La Cirk’Mosphère, Le Pôle Jeune Public du Revest…).

Plutôt que de se positionner en solo, Raquel et Guy se sont inscrits dans le paysage existant en incluant dans la Biennale les festivals ou structures qui présentaient déjà des temps fort cirque comme le Théâtre du Gymnase, le Théâtre d’Arles (Des cirques indisciplinés), le Daki Ling (Tendance Clown)… Et la riche idée est d’y avoir aussi associé le réseau des scènes nationales (Les Salins, Châteauvallon, La Garance), friandes d’écritures contemporaines novatrices, qui s’intéressent et suivent le cirque depuis que, devenu contemporain, il se situe de plus en plus à la croisée des disciplines et d’une écriture dramaturgique. Sur le fil entre danse et cirque, des circassiens comme Yoann Bourgeois y sont même artistes associés, en bénéficiant également du soutien de la Fondation BNP Paribas, l’un des sponsors de la BIAC. Une alternative financière pour compléter des subventions culturelles de plus en plus aléatoires et restrictives…

La mise en partage laisse ainsi chaque structure libre du choix de sa programmation, tout en s’intégrant dans un projet d’envergure offrant une forte visibilité vitale à tous.

Penser global, agir local

La programmation, hétéroclite, séduisante, gaie, privilégie la diversité et un fort ancrage local avec onze compagnies d’ici (Attention Fragile, La Mondiale Générale, Le Centaure, Cahin Caha, la compagnie Fanny Soriano…). Elle s’articule entre répertoire avec les compagnies marquantes du cirque contemporain (Les Colporteurs, Les Nouveaux Nez, la compagnie Jérôme Thomas, le Cirk Vost…) et la création, nationale et internationale, avec des focus scandinaves (avec les fous finlandais de Race Horse Company, Limits de Cirkus Cirkör…), brésiliens et québécois. Conservant par là même le côté populaire et familial du cirque…

Fait notable : le côté pratique du programme papier, avec une classification alphabétique des spectacles qui gomme l’importance des structures, mettant à égalité petits et grands. A l’exception de Johann Le Guillerm, sorte de parrain de la BIAC, étendard de cette transversalité des disciplines, des genres et des lieux. L’artiste, chercheur insatiable sur la matière, déploie un univers entre cirque d’objet, performance et arts plastiques. Son projet Attraction, issu d’un observatoire sur le « pas grand-chose », est une manière de faire un point sur ses croyances et connaissances dans une sorte d’inventaire du monde. Un spectacle en mutation constante, Secret (Temps 2) et des installations démentes (Les Imaginographes, Les Imperceptibles…) présentées à la Friche, ainsi qu’une revisite des collections du Mucem (Evolutions élastiques), donneront un large aperçu de la poésie délirante de cet artiste (dont on vous reparle très prochainement).

Les rencontres professionnelles, où cinq cents programmateurs du monde entier sont invités, transformeront la BIAC en « marché » géant et place incontournable du cirque.

Regroupant cinq chapiteaux sur les plages du Prado, il sera à la fois un lieu identifiable pour le public, un espace convivial et le centre névralgique de la manifestation. Le tout avec le désir de recréer ce qui faisait le succès du festival Janvier dans les étoiles de La Seyne, dans cet aspect familial du cirque, où le vivre ensemble et le mélange d’artistes favorisera rencontres, échanges et, peut-être, l’opportunité de futures créations.
En ces périodes électorales, la Biennale est une belle vitrine que la couverture médiatique internationale va faire étinceler. Reste à savoir si les collectivités locales et territoriales vont continuer à parier sur la culture de manière pérenne.

Marie Anezin

Biennale internationale des Arts du Cirque : du 21/01 au 19/02 à Marseille et en PACA. Rens. : www.biennale-cirque.com


Week-end d’ouverture : Quel cirque !

En partenariat avec la Capitale européenne du Sport, un week-end circassien musclé est proposé en guise d’ouverture à la Friche. Du sport, il n’en manquera pas avec cette mise en bouche gratuite de la Biennale menée par un Monsieur Loyal prenant les traits de Félix Tampon (Alain Reynaud des Nouveaux Nez & Cie), incroyable commentateur sportif.

Tout le monde sera à la fête, petits et grands, avec des ateliers acrobatiques et urbains, des spectacles, des installations et des expositions qui feront émerger les émerveillements de l’enfance, la douce folie de l’extraordinaire, l’esprit compétitif et les lois de l’apesanteur. Il sera en effet surtout question d’équilibre(s), avec l’exposition du même nom de Yohanne Lamoulère, celui, précaire, sur trampoline, de Yoann Bourgeois, ou sur deux pattes du chien savant de la compagnie Azeïn (Cave Canem), le pas à pas sur agrès de bois de la Mondiale Générale (Sabordage) ou encore les vols planés tout foot à la bascule de Colokolo Cirque.

Mais aussi, celui, difficilement tenable, face aux affres du hasard auxquels se confronteront les étudiants du Centre National des Arts du Cirque et de Piste d’Azur. Un match historique initié par Gulko (compagnie Cahin-Caha), et l’impossible équilibre entre ombre et lumière qui peuple l’existence de l’acrobate Sandrine Juglair dans Diktat. Quant aux Installations du « savant fou » Johann Le Guillerm, elles sont à tomber à la renverse…

Hors les murs mais à ne manquer sous aucun prétexte : Barons Perchés, le duo composé de Mathurin Bolze et Karim Messaoudi, le deuxième ayant repris le rôle du premier dans la pièce devenue de répertoire Fenêtres. Prenant le même cadre de la cabane en bois, Barons Perchés illustre en quelque sorte cette passation, une histoire de double et de trouble de la personnalité, d’une beauté époustouflante.

Quel cirque ! : les 21 & 22/01 à la Friche La Belle de Mai (41 rue Jobin 3e). Rens. : www.lafriche.org

Barons perchés par la Cie MPTA : les 20 & 21/01 à la Salle Guy Obino (Vitrolles). Rens. : www.vitrolles13.fr

Le programme complet de la Biennale internationale des Arts du Cirque ici: http://www.journalventilo.fr/#recherche=biennale

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