Effectifs réduits et missions limitées, la plateforme asile poursuit sa route
Début janvier, la plateforme asile, chargé d'orienter et d'accompagner les demandeurs d'asile, changeait d'association gestionnaire. HPF avait refusé de candidater jugeant inacceptables les conditions financières proposées par l'État. Trois mois plus tard, des critiques se font entendre, mais la nouvelle équipe de Forum réfugiés se veut optimiste.
Effectifs réduits et missions limitées, la plateforme asile poursuit sa route
La plateforme asile est sortie de la tempête. L’équipe qui a repris au pied levé cette structure de premier accueil des demandeurs d’asile veut y croire. Après que l’association HPF (Hospitalité pour les femmes) a jeté l’éponge devant l’impossibilité de voir augmenter ses moyens fin décembre, le défi était important pour Forum réfugiés qui a repris un dispositif de première nécessité au bord de l’implosion.
L’arrivée de ce mastodonte de l’asile, implanté au niveau national – et au centre de rétention du Canet depuis 2010 – pour remplacer une association locale présente depuis 11 ans n’a pas manqué de faire se soulever quelques sourcils parmi les acteurs de l’immigration à Marseille. Un collaborateur régulier d’HPF voit dans les premiers mois de la nouvelle équipe l’application d’une “logique discount”, notamment à travers l’allongement des délais pour obtenir des aides financières, le manque d’interprètes en langues étrangères ou l’abandon de certaines missions de la plateforme. “Je n’ai pas de certitudes, mais je suis très inquiet”, confie-t-il avant d’ajouter “les demandeurs d’asile ne connaissent pas leurs droits, alors ils prennent sur eux”.
Un autre témoignage vient d’une membre d’un des groupes d’aide aux migrants nés au cours des derniers mois, le “groupe de soutien et de solidarité aux réfugiés de Marseille”. Elle se dit par exemple “choquée” du peu de documentation transmise à une demandeuse d’asile syrienne, “des informations griffonnées sur des bouts de papier”. Cette bénévole ressent dans le suivi de cette jeune femme beaucoup de “rétention d’information et l’opacité des procédures”. Elle reconnaît toutefois manquer de recul pour comparer avec le travail de la précédente association.
La plateforme a “pris le rythme”
La nouvelle chef de service pour Forum réfugiés, Manon Tervel, faisait partie de cette ancienne équipe. Elle ne cache pas sortir de “trois mois où nous n’avons pas compté les heures”, pour rattraper le retard pris au cours d’une dizaine de jours de fermeture, le temps de s’installer dans de nouveaux locaux et mettre en place tous les outils. Elle assure aujourd’hui que la nouvelle plateforme a “pris le rythme”.
Huit salariés, contre dix environ auparavant, s’activent dans des locaux provisoires, boulevard d’Athènes. Ces locaux étaient jusqu’ici uniquement dédiés à la réception des courriers des personnes domiciliées par la plateforme. Forum réfugiés est encore en recherche d’un lieu plus adapté, “en rez-de-chaussée et avec une énorme salle d’attente” explique Manon Tervel. Située dans les étages d’un immeuble, cette implantation oblige les accueillis à monter par groupe de trente pour ne pas saturer la salle d’attente ou les escaliers, “mais en cas de pluie on fait monter tout le monde, on n’a pas le choix”. Les files d’attente devant les portes de l’immeuble ne manquent pas d’attiser la curiosité des Marseillais descendant de la gare Saint-Charles.
Une nouvelle feuille de route
“Heureusement que l’équipe est motivée. Bien sûr, comparé à avant c’est un peu plus compliqué. Il y a des choses qu’on faisait et qu’on ne fait plus” reconnaît Manon Tervel. La plateforme version 2016 a bien dû renoncer à certaines missions. Comme l’accompagnement pour déposer un recours devant la cour nationale du droit d’asile en cas de rejet de la première demande par l’OFPRA (l’Office de protection des réfugiés et apatrides), ou l’accompagnement des mineurs demandeurs d’asile. En revanche, elle assure continuer à s’occuper de l’accès aux aides comme la couverture maladie universelle (CMU).
Car la feuille de route a changé. Non pas du fait de Forum réfugiés, mais en raison du nouveau marché public passé avec l’État, et auquel HPF avait refusé de répondre. “L’accompagnement des mineurs ne fait pas partie du marché, on aimerait pouvoir le faire, mais tant que nous n’avons pas le feu vert et le financement on ne peut pas s’engager” regrette la cheffe de service qui précise que les négociations avec les autorités sont directement faites par la direction de Forum réfugiés.
Pour “combler” l’absence de suivi des recours devant la cour nationale du droit d’asile, à Paris, l’équipe a mis des sessions d’information en petits groupes avant de faire le lien avec l’avocat parisien chargé de les défendre. Manon Tervel justifie également le moindre recours aux interprètes extérieurs par le fait que plusieurs salariés maîtriseraient l’arabe et l’albanais. En clair, la nouvelle organisation a été pensée pour moins dépenser.
300 personnes par jour
Ces missions laissées de côté ne signifient pas pour autant un gain de temps. La loi asile entrée en application à l’automne 2015 confie de nouvelles attributions aux plateformes. Tous les demandeurs d’asile de la région (hors Alpes-Maritimes et Var) doivent en effet y passer pour obtenir un premier rendez-vous en préfecture. De même, ils doivent y être domiciliés au moins tant qu’ils n’ont pas accédé à un logement du dispositif d’État. Une charge considérable qui induit un flux constant : 300 personnes passent chaque jour, le plus souvent en matinée, pour récupérer leurs courriers.
Et la demande ne faiblit pas. La plateforme peine encore à donner des chiffres précis, mais pour Manon Tervel, au moins 400 demandes d’asile ont été déposées depuis janvier, une quinzaine en moyenne chaque jour. Et le printemps apportera avec lui un tristement habituel pic de primo-arrivants, encouragés par le ciel plus clément à entreprendre le grand voyage.
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