En réa pour les fêtes, “les soignants qui restent sont ceux qui n’ont pas fait de burn out”
Pendant que les fêtes de fin d'année se préparent, l'épidémie de Covid-19 et sa cinquième vague sont bien là. Reportage en texte, sons et images dans les services de réanimation de l'hôpital Nord, auprès des soignants qui n'ont pas d'autres choix que de continuer à lutter malgré l'épuisement.
Dans le service de réanimatin du professeur Papazian à l'hôpital nord. Photo : Emilio Guzman
Voilà bientôt deux ans que le monde vit au rythme de l’épidémie de coronavirus. Certains plus que d’autres. Dans les services de réanimation, fêtes de fin d’année ou pas, des hommes et des femmes sont au cœur de la crise et accueillent les malades dans l’état le plus grave de la maladie. Les soignants du service de réanimation médicale et détresses respiratoires de l’hôpital Nord reçoivent depuis avril 2020 les patients atteints de Covid-19 les plus lourds de la région. Affaiblis par un fort taux d’absentéisme, par une forme de lassitude, mais surtout par une fatigue extrême, ils tentent tant bien que mal de “tenir le coup”. Plongée aux côtés de ceux qui n’ont pas le droit de flancher, même à Noël.
“On n’arrive pas à comprendre pourquoi les gens ne veulent pas se faire vacciner”
16 heures. L’ambiance autour des “boxes” de réanimation semble plus détendue qu’il y a un an, les gestes plus sûrs, les précautions moins drastiques. On fait des blagues, des rires éclatent parmi les “bip” des machines qui maintiennent en vie les patients entre la vie et la mort. Mais les apparences sont parfois trompeuses. Sur les 24 lits de réanimation dont dispose le service, aucun n’est vide. Difficile, dans ces conditions, de raconter son quotidien sans être interrompu. Seize lits sont occupés par des patients Covid. La plupart d’entre eux n’ont pas reçu deux doses du vaccin, voire, ne sont pas vaccinés du tout. Tout en enfilant sa blouse, Anissa Hamel, étudiante en cinquième année de médecine, confie ce qui la tracasse le plus en ce moment.
Dans l’incompréhension comme un bon nombre de ses confrères et la voix tremblante, elle ne peut s’empêcher de penser à ceux qui ne sont pas ici, mais sur qui l’épidémie aura aussi des conséquences.
“Le nombre de places disponibles se réduit (…) on touche le fond”
L’admission de patients Covid, qui augmente de 10 % chaque semaine depuis le début du mois au sein de l’AP-HM, a inévitablement des répercussions sur tout l’hôpital. Depuis cette semaine, les opérations non-urgentes sont déprogrammées afin d’assurer des places dans les lits de réanimation pour cet afflux de malades. Cette semaine ont aussi eu lieu les premières évacuations sanitaires de patients de la cinquième vague vers d’autres régions. Dans son bureau, entre deux coups de fils, le chef de service, le professeur Laurent Papazian, doit faire des choix. Il doit évaluer la gravité des patients, pour ne garder que les cas les plus graves et proposer un transfert pour les plus stables. Mais il rencontre un problème de taille : beaucoup de familles refusent ces transferts.
Au bout de deux ans, les gens sont épuisés.
Ajouter des lits pour recevoir plus de monde ? Encore faudrait-il avoir assez de personnel pour s’occuper des patients qui les occupent. L’AP-HM a lancé plusieurs campagnes de recrutement. Sans succès pour le moment. Sans compter un fort taux d’absentéisme, qui s’élève à plus de 20 % dans ce service de réanimation, pourtant l’un des plus réputés. Du jamais vu. Estelle Delaunay, médecin, sait qu’elle ne pourra pas compter sur autant de soutien que lors de la première vague.
“À aucun moment on a l’impression d’être dans le creux de la vague”
Mais elle sait aussi qu’elle n’est pas la plus à plaindre. Car cette crise repose beaucoup sur les infirmiers et infirmières des services de réanimation, qui ont une formation particulière et sont peu nombreux. Clément Diarra est infirmier réanimation depuis cinq ans. Il était là avant la crise, aime son travail, mais le Covid lui fait éprouver une forte lassitude.
Le professeur Papazian ressent forcément cet état de lassitude dans ses troupes. Malgré le doublement du paiement des heures supplémentaires, il sait que les conditions ne sont pas normales et s’inquiète de voir ses équipes ne même plus avoir l’énergie de porter des revendications.
Ceux qui luttent aujourd’hui encore contre l’épidémie n’ont donc pas vraiment le choix. En juillet, de nouveaux infirmiers réanimateurs termineront leurs études et pourront venir prêter main forte. D’ici à là, il faut continuer à soigner les patients qui arrivent au fil des vagues successives. Pour cette cinquième vague, les soignants espèrent qu’elle ne se conjuguera pas avec une éventuelle “vague Omicron”, du nom du nouveau variant, visiblement plus contagieux. Comme le formule Clément Diarra, dans une forme de résignation, chacun tente de trouver des raisons de continuer à se battre :
Le point sur la situationD’après les dernières données communiquées, le taux de positivité au Covid-19 est de 7,9% dans les Bouches-du-Rhône, avec un taux d’incidence de 890 dans ce département, contre 170 à la même période il y a un an. D’après l’ARS, 521 personnes étaient hospitalisées au 21 décembre, dont 233 en réanimation. La moyenne d’âge des personnes hospitalisées pour Covid à l’AP-HM est actuellement de 69 ans, et de 58 ans pour ceux en réanimation.
Commentaires
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Et que nous disent maintenant les soignants qui ne voulaient ou qui ne veulent toujours pas de faire vacciner ?
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Est ce qu’il est possible de faire gérer les patients en réanimation covid par les soignants anti vaccins?
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Excellent article Violette Artaud, en quelques petites audio et un peu de texte, on comprend tout le problème. Je pense qu’on devrait passer ce reportage en boucle à la TV et sur les chaines info 24/24.
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Bravo violette pour ce reportage immersif !
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