Après un an de crise sanitaire, la demande d’aide alimentaire n’en finit pas d’augmenter
Dans les Bouches-du-Rhône, la demande d'aide alimentaire progresse inexorablement depuis le confinement de mars dernier. Confrontées à cette hausse, les associations voient leurs stocks se réduire et lancent des appels aux dons.
Préparation de colis alimentaire à l'Après M, la plateforme solidaire installée dans l'ancien McDonald's du 14e. (Photo VA)
“Si on maintenait difficilement à flot des familles jusque-là, beaucoup sont désormais en dessous de la ligne de flottaison”. À l’instar de Bernard Nos, président de l’association marseillaise Vendredi 13, les acteurs de l’aide alimentaire s’alarment de la hausse continue de la demande dans les Bouches-du-Rhône. “Tous les voyants sont au rouge, constate le Secours populaire dans un communiqué ce lundi. Le nombre de familles inscrites dans nos antennes et comités s’élève aujourd’hui à des seuils jamais atteints”.
Selon l’association la hausse de fréquentation de 45% du premier confinement n’a pas décru. “On note une explosion de la demande ces dernières semaines, on distribue entre 30 et 40% de colis en plus par rapport au deuxième confinement, confirme Salim Grabsi, porte-parole de l’Après M, le McDonald’s de Saint-Barthélemy reconverti en plateforme solidaire depuis mars 2020. La queue s’allonge semaine après semaine. Le troisième confinement fait mal“. Comme la plateforme de Saint-Barthélémy, le Secours populaire appelle aux dons pour faire face à cette demande alimentaire inédite.
Un nouveau public touché
Officiellement, il n’y a pas d’estimation précise du nombre de personnes qui dépendent de l’aide alimentaire dans le département. “Rien n’est clairement objectivé“, souligne, prudente, la direction départementale de l’emploi, du travail et des solidarités des Bouches-du-Rhône (DDETS). Mais ce service déconcentré de l’État confirme la tendance : “on a bien une augmentation de la demande depuis le deuxième et surtout le troisième confinement, avec notamment un nouveau public“. Dans les files d’attente apparaissent désormais “des étudiants bien sûr, mais aussi des auto-entrepreneurs et de jeunes diplômés”, y confirme-t-on.
Le problème, c’est la durée, les factures s’accumulent pour des populations qui n’arrivent pas à revenir à l’emploi.
La prise en charge concerne principalement les quartiers précarisés du centre et du Nord de Marseille. “On constate des hausses de fréquentation surtout dans les zones de précarité traditionnelle comme le 3e, 14e et 15e arrondissements“, indique Virginie Bursi pour le Secours populaire. Nos permanences notamment à Saint-Jérôme, à la Blancarde ou la Belle-de-Mai enregistrent des augmentations de 70% par rapport à la normale. Les gens n’ont plus honte de venir à l’aide alimentaire.”
La crise sociale s’installe et rien ne semble donc l’enrayer. “On voit difficilement le bout du tunnel”, lâche-t-on du côté du Secours Populaire. “Le problème, c’est la durée, les factures s’accumulent pour des populations qui n’arrivent pas à revenir à l’emploi. Ici dans les quartiers Nord, mais aussi ailleurs”.
Des nouvelles zones de précarité alimentaire dans Marseille
Si la crise s’aggrave dans ces quartiers, elle révèle également d’autres situations préoccupantes dans des secteurs peu associés à l’aide alimentaire. “Ça fait quelques années maintenant que d’autres quartiers sont touchés par des phénomènes de précarité alimentaire à Marseille, on investit de plus en plus des “zones blanches” comme le 8e, le 9e ou encore le 10e arrondissements, dans des quartiers comme La Salette (9e) et Pointe-Rouge (8e)“, fait remarquer Sonia Serra, la secrétaire générale du Secours Populaire 13.
“Avec la crise, le phénomène de précarité alimentaire est moins concentré, la demande est davantage repartie partout dans Marseille“, confirme de son côté Michel Rodi, président des Restos du Cœur dans les Bouches-du-Rhône. Dans La Provence, le conseil départemental constatait récemment que “l’ensemble des indicateurs de précarité croissent de manière très significative (…) et ce, sur l’ensemble des Bouches-du-Rhône“. Cette hausse inquiétante de la demande pose également la question de l’offre.
Un problème inédit d’approvisionnement
“Combien de temps va-t-on pouvoir tenir ?“, s’inquiète ainsi Sonia Serra. Car si la demande progresse de manière significative, l’offre de denrées alimentaires commence à faire défaut. “Il va manquer à la fédération des Bouches-du-Rhône un mois et demi de stocks, soit 416 palettes de produits“, s’alarme-t-elle.
En cause notamment, une attribution forcément mal calibrée du fonds européen d’aide aux plus démunis (FEAD) qui bénéficie à quatre antennes locales d’associations à dimension nationale sur Marseille. “Le FEAD est très important pour le Secours populaire, la Banque alimentaire, la Croix-Rouge et les Restos du cœur, souligne Gérard Gros. C’est 25% à 30% des stocks de ces associations au niveau local“.
Les approvisionnements du fonds européen ont été commandés en 2019, avant la crise du Covid, et ne seront pas adaptés à la demande actuelle.
Or, le fonds, qui se compose essentiellement de produits alimentaires de base, se commande deux ans en avance. “Les stocks de 2021 arrivent en août, mais ont été commandés avant la crise en 2019“, explique Sonia Serra pour le Secours populaire. Et les commandes additionnelles ne permettent pas de faire face à la demande en hausse. “Depuis la création du Secours populaire dans le département, c’est la première fois que nous ne parvenons pas à faire la jonction de l’été entre les deux commandes de FEAD.”
Une situation de pression sur les approvisionnements qui ne touche pas de la même manière toutes les associations. “Les Restos du cœur bénéficient d’un réseau de donateurs fournis. Des entreprises, des industriels, des producteurs du département répondent présents. On se fournit beaucoup en direct”, précise son président, Michel Rodi.
Pour le reste, les subventions de l’État permettent de maintenir à flot les associations d’aide alimentaire. En 2020, devant l’urgence de la situation sanitaire, six millions d’euros ont été débloqués par l’État sur le département contre 500 000 euros en 2019. “Pour 2021, l’aide sera reconduite dans le cadre du Plan de relance sous forme d’appels à projet”, assure Nathalie Daussy, la directrice de la DDETS des Bouches-du-Rhône. Cette enveloppe n’atteindra toutefois pas le niveau de 2020. “Nous parions sur une reprise de la machine économique“, indique la représentante de l’État. Pas sûr que la crise sociale qui s’installe s’évanouisse aussi facilement.
Commentaires
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Des mesures à la Joe Biden s’imposent : taxer normalement les très riches et fermer toutes les officines de “défiscalisation”, + taxer les gafa, tuer les paradis fiscaux…
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Qui parle de cette crise sociale dans la campagne politique ? Les vrais problèmes sont là, ils ne viennent pas “d’ailleurs”…
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L’action sociale est la première compétence du département, il ne s’agit pas de choix politique mais de mission.
Qui des candidats a abordé le sujet en ces temps de crise ? Quelles options budgétaires ? Quelles priorités pour répondre aux besoins ?
Nous sommes dans la non assistance à personnes en danger non ?
C’est pourtant le meilleur tremplin pendant ces élections pour tenter de pallier les difficultés et peut-être gagner des voix.
Mais moi je crois encore que les saucissons poussent aux arbres…☹️
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Effectivement en accord avec les commentaires précédents. Les programmes (si on peut les appeler comme cela) des candidats pour les prochaines élections, ne font quasiment pas référence à cette problématique. Il s’agit pourtant de la première des urgences : manger à sa faim! Beaucoup d’arrondissements sont touchés aujourd’hui, même le 5eme par exemple, qui n’était pas concerné jusque là, a ouvert sa boutique solidaire pour distribuer des paniers repas. L’ensemble de la ville est concerné pendant que les politiques bataillent autour des alliances, des candidats, des postes…
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Pourtant on va claquer un pognon de dingue pour les JO
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Ce qui montre à quel point nos politiques sont déconnectés de la réalité quotidienne des français.
Nos politiques ne voient pas ces problèmes là, n’ont aucune envie de s’en préoccuper.
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