Fred Nevchehirlian, le slameur de Prévert
Fred Nevchehirlian, le slameur de Prévert
A travers son album Le soleil brille pour tout le monde, recueil de poèmes de Jacques Prévert, Frédéric Nevchehirlian redonne souffle au poète. Hommage est ainsi rendu à l'écrivain épris de liberté et de justice sociale, à sa révolte permanente et son indocilité. Loin, bien loin du seul poète des enfants et de l’astucieux Cancre.
Le projet émerge d’une rencontre fortuite, lorsque le slameur appelé par le réalisateur Camille Clavel, accepte de mettre en musique Le soleil brille pour tout le monde, illustration du documentaire Prévert, paroles d’un insoumis (2008). La petite fille du poète, Eugénie Bachelot-Prévert invite alors Fred Nevchehirlian dans l'ancienne demeure de l'écrivain, mue par le désir insatiable de voir le grand-père contestataire, celui qui la menaçait « d’aller au ciel si elle n’était pas sage », enfin remis au goût du jour.
Il restait tout de même à convaincre un musicien dubitatif : « Je n’avais pas particulièrement envie de réaliser un disque entier sur Prévert. Je le considérais comme un auteur un peu ringard. Mais peut-on refuser une invitation de la petite fille du poète ? J’y suis donc allé mais je disais oui avec la tête et non avec le cœur… ». Mais Eugénie Bachelot-Prévert extrait sa force de persuasion de textes méconnus, militants et engagés tels Marche ou Crève, Travailleurs attention, il ne faut pas rire avec ces gens-là, et Confession publique. Conquis, l'artiste s'incline et signe: « J’ai redécouvert Prévert, cette figure là m’est apparue comme étant fondamentale. Il fallait que les gens entendent ça, qu’on le réactualise. Aujourd’hui qui a le courage de dire des choses aussi violentes, aussi fortes avec des mots aussi simples ? Au fond je me suis rendu compte que cet homme disait exactement ce que je pensais. »
Telle est en effet la force de Jacques Prévert. Sa plume sobre et épurée, méprisée par certains, y compris par des auteurs contemporains – à l’instar d’un Michel Houellbecq écrivant « Jacques Prévert est un con »– a bien souvent été considérée (déconsidérée ndrl) comme l’expression d'une simplicité infantile. Dans le livret accompagnant le disque, Fred Nevchehirlian dépeint un autre homme, celui qui mérite très certainement sa place dans la prestigieuse collection de la Pléiade, ultime consécration littéraire : « un homme debout face aux inégalités, face à l’exploitation de l’homme par l’homme, face aux petits clans, face à la bourgeoisie provocante ».
C’est avec une voix grave et posée, peu d’arrangements musicaux et un style dénué de fioritures que le slameur transmet là toute la puissance du poète. Certains textes, inédits, comme La lettre à Jeanine, dévoilent l’intimité d’un homme amoureux de sa femme, évoque aussi son impuissance face à la guerre. La politique rejoint là l’amoureux transit, la source d’inspiration d’un homme entier, dont la pensée est actualisée avec subtilité.
Le théâtre Silvain mettra Fred Nevchehirlian sous le feu des projecteurs ce soir, à 20 h au théâtre Silvain, Corniche Kennedy, chemin du pont de la fausse monnaie (7e). Entrée gratuite dans la limite des places disponibles. Informations et réservations au 09 62 35 26 43.
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