Le Sénat, l'autre combat du "dignitaire" Guérini

Alors que la situation est de plus en plus confuse au Paquebot bleu, siège du conseil général des Bouches-du-Rhône, où après avoir annoncé qu’il se mettrait en retrait de sa présidence – déléguant l’ensemble de ses pouvoirs à son premier vice-président, le transparent Daniel Conte – Jean-Noël Guérini continuerait de « hanter les couloirs du département » selon nos confrères du Parisien. JNG pourrait même profiter de sa situation juridique très floue, l’opposition UMP au CG 13, menée par la pugnace Martine Vassal, ayant dénoncé le caractère illégal de cette délégation de pouvoir, pour reprendre officiellement la barre du Paquebot et de ses 2 milliards de budget. La droite et la justice contestent ma délégation de pouvoir ? Et bien je vais la reprendre. Au point où en est JNG ce n’est pas cette petite dose de cynisme qui va l’empêcher de dormir.

Il aurait tort de se priver, sachant que cela n’a pas l’air de gêner grand monde, surtout du côté de Solférino et des candidats socialistes à la primaire. D’ailleurs à part Montebourg, mais c’est son fonds de commerce, on n’a pas vu d’autres candidats à Marseille dans la dernière ligne droite de cette campagne. Sans doute par peur des mauvaises rencontres. Et ils n’aiment pas Bogota. Pour JNG, se maintenir à la tête du CG 13, que ce soit officiellement ou en coulisses, est plutôt facile. Il connait la maison par coeur, il a des dossiers sur à peu près tout le monde, surtout sur ses opposants putatifs, et ses spin-doctors sont toujours dans la place. En revanche une autre partie est en train aussi de se jouer en ce moment à Paris, et qui s’annonce celle-là pour notre raïs Bucco-Rhodanien beaucoup plus mal engagée.

Une place au Bureau

A côté de sa présidence d’un des plus importants conseil généraux de France, Jean-Noël Guérini est aussi sénateur. On ne vous apprend rien. Ce qu’on sait moins en revanche, c’est qu’il n’est pas un sénateur lambda. C’est même un dignitaire, comme on les appelle au plateau. Modeste, certes, mais dignitaire quand même. Et avec tous les avantages qui vont avec en terme de primes et de complément de retraite. Car JNG est membre depuis 2008 du Bureau du Sénat, où il siège en tant que secrétaire.

Le bureau du Sénat c’est un peu le comité de direction, le board de la prestigieuse assemblée. Selon l’article 2 du règlement du Sénat, le Bureau « a tous pouvoirs pour présider aux délibérations du Sénat et pour organiser et diriger tous les services dans les conditions déterminées par le présent règlement ». Il est composé du président, aujourd’hui le socialiste nouvellement élu Jean-Pierre Bel, de huit vice-présidents, de trois questeurs et de 14 secrétaires. Si les vice-présidents et les questeurs sont élus à bulletin secrets, les secrétaires sont désignés par chacun des groupes parlementaires, à la proportionnelle.

C’est donc ce matin, lors de la réunion du groupe socialiste au Sénat que va se jouer l’avenir de dignitaire de JNG. Car il est candidat au renouvellement de ce sympathique job. Qui en plus des quelques petits privilèges évoqués plus haut, n’est pas non plus sans intérêt au niveau de sa situation judiciaire. C’est le bureau du Sénat qui examine toute demande de levée d’immunité parlementaire d’un sénateur. Vu la situation de JNG on comprend aisément qu’il n’ait pas vraiment envie de lâcher l’affaire. Car si les sénateurs ne sont jamais très chauds pour livrer aux juges leurs collègues, ils le sont encore moins pour un membre de leur Bureau. Et puis il y a bien évidemment la dimension symbolique, rester secrétaire du Sénat, serait pour Jean-Noël Guérini une forme de quitus moral décerné par ses pairs. `

Mal parti

Du coup, Guérini s’agite dans les couloirs feutrés et sous les lambris de la Chambre Haute. On l’a vu sur toutes les télés embrasser comme du bon pain ses collègues sénateurs lors de la prise historique du palais du Luxembourg par la gauche. Il raconte un peu partout que Jean-Pierre Bel est un « ami intime », comme on dit à Marseille, forcément. Un peu plus et c’est grâce à JNG que les socialistes ont gagné. Le sénateur des Bouches-du-Rhône s’est aussi beaucoup montré dans la fameuse brasserie parisienne Lipp, une des cantines réputées de la politique à Paris ces derniers jours.

Mais malgré cet intense lobbying, son maintien au Bureau du Sénat semble mal parti. De très nombreux sénateurs socialistes seraient vent debout, sans compter les nouveaux élus d’Europe Ecologie-Les Verts. A qui il va bien falloir distribuer quelques fromages. Et comme les places sont chères, et vu le CV de Jean-Noël, il risque fort de devoir rendre cette semaine son tablier de secrétaire, surtout à un nouveau président du Sénat qui a mis l’éthique et la morale dans ces chantiers prioritaires. Bah, il pourra toujours se consoler comme membre du groupe d’étude sur les Fruits et Légumes, section huile d’olive, que personne cette fois ne devrait lui contester.

Réaction  : Jean-Noël Guérini nous demande de préciser qu’ il n’a jamais été candidat au renouvellement de son poste de Secrétaire du Bureau, et que même s’il l’avait été , il n’aurait pas pu, le réglement intérieur du groupe socialiste au Sénat interdisant de l’être « deux fois consécutivement ». D’autre part il souhaite également dire qu’il est membre de la Commission des Affaires Etrangères et que ses camarades, cette fois, ont accepté qu’il continue d’ y siéger. Voilà c’est fait. Peut-être sera-t-il plus présent à cette commission, où selon les données de Nossénateurs.fr il n’a siégé qu’une seule fois.