Affrontement Guéant-Aubry sur la sécurité : match nul pour les Marseillais ?
Affrontement Guéant-Aubry sur la sécurité : match nul pour les Marseillais ?
On a beau commencer à avoir l’habitude des visites de ministre de l’Intérieur à Marseille – après Brice Hortefeux en novembre, Claude Guéant était déjà venu en mai – ça fait toujours un choc : des policiers partout, jusque sur le sommet de l’Arc de Triomphe de la porte d’Aix, des élus en pagaille (le maire et les députés UMP mais aussi cette fois-ci le président de la communauté urbaine PS et son dir cab’, la maire socialiste du 2/3…), des médias nationaux descendus en masse pour une partie de bousculade, des militants associatifs et des curieux qui suivent…
Le petit tour effectué porte d’Aix et rue du Bon Pasteur par Claude Guéant en compagnie du nouveau préfet délégué à la Sécurité Alain Gardère, lui aussi très proche de Sarkozy, n’a pas dérogé à la règle, bien au contraire. Surtout que l’ex-première secrétaire du PS et candidate aux primaires Martine Aubry a eu la bonne idée de profiter de l’événement pour descendre dans le 15/16 titiller le ministre sur son terrain. « Je n’avais jamais vu autant de médias », glissait un peu plus tard devant la préfecture le procureur de la République Jacques Dallest. Et oui c’est la rentrée, pour tout le monde…
Les téléspectateurs des chaînes d’info en continu ont donc pu voir quelques images de Guéant discutant avec Eugène Caselli (président PS de MPM…), accompagnées d’un commentaire truffé de chiffres plus ou moins exacts avant d’écouter des extraits du discours très offensif de la maire de Lille :
Suffisant pour eux, mais pas pour les Marseillais qui attendaient avant tout des moyens supplémentaires. Mais eux ont l’habitude… Président de l’association de commerçants Trait d’union, Jean Gaggiolo ironise, désignant un fourgon stationné à l’entrée de la rue Bon Pasteur : « s’ils la laissaient ici, ce serait bon, le trafic s’arrêterait. On le demande depuis des mois, et là que le ministre vient on la met… Mais moi je ne suis convaincu que dans la durée ».
Aux innocents les mains vides
Or, Guéant avait posé le cadre dans son interview ce matin à La Provence : « la sécurité n’est pas qu’une question de moyens » et Alain Gardère devra « innover sur le plan stratégique et méthodologique ». Traduction : le ministre est venu les mains (presque) vides. « Il y a déjà l’acceptation de dire que la situation est intolérable. A un moment donné, on avait l’impression que nous étions les seuls à le penser », commente Monique Cordier, présidente de la confédération des comités d’intérêt de quartier (CIQ) qui « attend de voir les effets des actions de restructuration et de requalification ». Des termes qui soulignent, trouve-t-elle aussi « qu’on ne parle pas d’effectifs supplémentaires et ça me désole ». Traditionnellement dans une relation plutôt de co-gestion avec le maire de la ville, qui s’est lui félicité de la contribution de l’Etat, elle se montre plus exigeante que Jean-Claude Gaudin, laissant « un mois et pas un an » à Alain Gardère pour obtenir des résultats ou à tout le moins afficher des objectifs clairs.
L’après-midi, au cours d’une conférence de presse, l’ex-secrétaire général de l’Elysée, s’est ainsi contenté, de son propre aveu de « confirmer les annonces » déjà faites. A savoir 100 policiers supplémentaires (mais affectés à la police d’agglomération naissante – et donc prévus à l’origine de toute façon – qui couvrira Plan-de-Campagne, Septèmes etc.) et 39 pour la police judiciaire. Avec tout de même un petit plus : « Au 1er septembre, le renfort sera de 116 et à la fin du mois de 166. Je fais donc plus qu’honorer ma promesse. J’ajoute que l’équivalent de 66 autres fonctionnaires seront mis en place grâce au jeu des heures supplémentaires ». Une nouvelle compagnie de CRS (soit 100 hommes), sera aussi « fidélisée » sur Marseille, a-t-il promis.
Retour au Clos La Rose
Mais, comme ceux venus dans la foulée de la fusillade du Clos La Rose l’année dernière, rien ne dit qu’ils ne pourraient pas repartir dans quelques mois… Et on est loin des 400 policiers qui manquent à Marseille selon les syndicats. Il suffit de lire cet excellent reportage de Mediapart, dont la correspondante Louise Fessard est retournée au Clos La Rose pour nuancer toutes les déclarations du ministre. A la place du fameux fauteuil où « guettait » le jeune de 16 ans tombé sous les balles de Kala, « un imposant canapé en sky jaune et un parasol trônent à sa place. «C’est la version d’été», pouffe une jeune maman du quartier. »
Et parmi les infos qui accompagnent l’article, ce couperet : « A la sûreté départementale, les policiers de la brigade des stupéfiants ne sont que 18 pour lutter contre les trafics locaux dans toutes les Bouches-du-Rhône. «On en enlève un tiers en repos, il reste six personnes qui prennent les plaintes, et six disponibles pour faire des flagrants délits, souligne Alphonse Giovannini (secrétaire des Bouches-du-Rhône d’Unité SGP Police, ndlr). Ça ne pèse pas lourd pour faire une planque, face à un réseau d’une vingtaine de personnes (guetteurs, transporteurs, vendeurs et nourrice)» ».
Bataille de chiffres Guéant-Aubry
Pour le reste, on se gardera bientôt de trancher entre la guerre de chiffres à laquelle se sont livrés Martine Aubry et Claude Guéant. La première avait mis au défi le second de la contredire :
Ce qu’il a bien entendu fait, arguant que ces chiffres ne comptaient que les « effectifs spécifiquement attachés à la circonscription » (découpage administratif). Alors qu’il existe « des unités départementales » dont l’« essentiel » des missions se déroulent à Marseille, a-t-il assuré. Prévenu de la visite de l’ex-ministre de l’Emploi du gouvernement Jospin, il a d’ailleurs donné sa conférence en retard par rapport à
l’horaire prévu, comme pour se donner le temps de lui répondre. Par exemple en ressortant le chiffre de « 8000 suppressions de postes » qui auraient été la conséquence de la mise en place des 35 heures dans la police, « sans que le gouvernement prenne la peine de les compenser ».
Idem sur les chiffres de la délinquance, où le ministre voit vert de 2002 à 2010 (gouvernement de droite) et rouge sous Jospin, quand Aubry s’alarme. Rappelons d’abord que, pour de nombreuses raisons détaillées sur son blog par le sociologue spécialiste du sujet Laurent Muchielli ils ne sont pas « un baromètre fiable et représentatif de l’évolution de la délinquance ». Mais aussi à l’image de Michèle Alliot-Marie et Brice Hortefeux, les ministres de l’Intérieur sont de formidables magiciens des chiffres tous indiqués pour rejoindre la rubrique Désintox de Libération (respectivement ici et là). Hormis un bel amalgame Roms=Roumains=délinquants, les grandes lignes du discours de Guéant ont d’ailleurs reprises mot pour mot celles déjà « désintoxiquées » par Laurent Muchielli, qui y voyait une « propagande électorale déjà bien rodée ». C’est confirmé.
Commentaires
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Cette ville est un bateau ivre , et ce n’est pas l
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Martine Aubry est venue faire un tour.
Claude Guéant est venu faire un tour.
Ça sent les élections. Promesses !!! Mais pas de réalisations !!
Pour eux, c’est chauffeurs, gardes du corps et lotissements sécurisés.
Pour nous les marseillais, les problèmes demeurent…. Sans les solutions.
Pas grave, ces deux démagogues ne sont pas venus pour nous mais pour les cameras.
Elles sont déjà de retour à Paris avec eux.
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Ce n’est pas un match nul.Les chiffres de la criminalité et de la délinquance montrent que le fiasco de Sarko sur la sécurité est bien réél et dénoncé par Martine Aubry.
Les propositions de MA sont crédibles et il fallait porter la contradiction sur le terrain : c’est fait.
On a vu beaucoup de policiers aujourd’hui à Marseille pour la protection de Guéant. Il faudrait délocaliser le ministère de l’Intérieur à Marseille.
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Pas de boulots, pas de formations professionnelles, des mesures sociales saupoudrées depuis des années, coincés entre le misérabilisme de gauche et le mépris de droite, une seule solution, le deal, le vol, le crime….
Et merdum !
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Les marseillais comptent les points (gagnés) et peut-être demain les balles perdues !
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vivement le 8, qu’on sache vraiment ce que le juge est en mesure d’étayer et comment le président Guérini va se défendre. Conjectures, rumeurs, manipulations seront bientôt terminées. Ca va faire du bien, on va pouvoir reparler politique. Ou Betttencourt. Ou évasion fiscale. Ou bonnes affaires immobilières sur le dos du contribuable marseillais.
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Si tu ne vas pas à Alain Gardère, c’est Alain Gardère qui ira à toi.
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