Un prof viré pour avoir parlé arabe dans une mosquée
Enseignant de langue et culture d’origine en écoles primaires à Salon-de-Provence, Sadok Haddad se bat depuis 3 ans pour sa réintégration. En 2013, l’éducation nationale a mis fin à ses fonctions. En cause : une vidéo sur internet montrant Sadok Haddad s’exprimant en arabe dans une mosquée. Il est depuis au centre d’un imbroglio juridico-religieux.
Sadok Haddad entouré de militants de Sud Education le 1er février
Sadok Haddad n’a pas la double nationalité. Ressortissant tunisien installé en France depuis les années 80, il en a fait la demande deux fois mais ses faibles revenus ont motivé le refus des autorités préfectorales. Cette situation ne risque pas de s’améliorer. Depuis le 14 décembre dernier, le tribunal lui a ordonné de quitter le logement de fonction qu’il occupait jusque-là. Il vit désormais avec une allocation spécifique de solidarité de 400 euros, seul revenu d’une famille qui compte trois enfants.
Pourtant, jusqu’à l’été 2013, Sadok Haddad vivait tranquillement à Salon avec les maigres émoluments d’un enseignant en langue et culture d’origine (ELCO), une discipline facultative proposée dans certaines écoles primaires aux enfants dont les parents en font la demande. Depuis plusieurs décennies, du fait d’un accord avec plusieurs pays (Maroc, Algérie, Tunisie et Turquie notamment), des enseignants sont détachés pour venir enseigner langue et culture des pays d’origine dans les établissements français. C’est le cas de Sadok Haddad depuis 1990.
Une vidéo youtube
Jusqu’à ce qu’une directrice d’école à Salon fasse parvenir au directeur académique de l’époque, Jean-Luc Bénéfice, une vidéo où monsieur Haddad s’exprime en arabe, apparemment dans une mosquée, vêtu d’une djellaba et d’un bonnet. En juin 2013, Jean-Luc Bénéfice écrit alors au consul de Tunisie à Marseille en signalant que la directrice d’école “a reconnu monsieur Haddad en situation de prêcher en langue arabe, vraisemblablement au sein d’une mosquée” sur une vidéo posté sur Youtube. Il ajoute : “Il n’est pas concevable qu’un acteur du mouvement religieux puisse assurer des enseignements au sein de notre système éducatif”.
Il indique au consul qu’une “demande de suspension de l’autorisation d’exercer de ce professeur” a été transmise à l’administration centrale. En rentrant de ses vacances en Tunisie, Sadok Haddad, trouve un autre courrier, cette fois-ci de l’éducation nationale tunisienne lui annonçant : “Il a été décidé de mettre fin à votre mission de délégué local à la fin de l’année 2012-2013” et l’invitant à prendre attache avec la délégation régionale de l’éducation de Tataouine.
Le voilà donc sans emploi et au cœur d’un imbroglio juridico-religieux qu’il n’a pas vu venir. Il se tourne vers son syndicat Sud Education pour trouver une manière de se défendre. En novembre 2013, deux collègues syndiqués rencontrent la directrice d’école qui a transmis la vidéo. “Elle nous a certifié que monsieur Haddad n’avait jamais fait montre de propagande religieuse”, note Eric Delmas, de Sud Education.
Une demande de réintégration
Épaulé par le syndicat, Sadok Haddad écrit à tous les services de l’Education nationale française ainsi que l’ambassade de Tunisie puisque les deux pays sont les employeurs de monsieur Haddad. La France encadre son action et la Tunisie le paie.
“L’un et l’autre se renvoie la balle”, indique un militant de Sud Education qui a fait partie d’une délégation qui occupait l’inspection académique il y a quelques jours. Joint par nos soins, le rectorat se refuse à tout commentaire puisque l’affaire est également pendante devant le tribunal administratif.
En effet, après avoir multiplié les courriers, Sadok Haddad a fini par recourir aux services d’un avocat qui a saisi le tribunal, le 8 avril 2014 pour demander réparation et obtenir sa réintégration. “J’attends de la partie adverse qu’elle me prouve l’existence de cette vidéo et que c’est bien mon client qui y figure, argue Frédéric Pascal. Jusque-là, elle n’a pas versé au dossier le moindre constat d’huissier, ni transcription, ni traduction”. C’est pourtant le seul “fait” qui permet à l’éducation nationale de dire qu’il est un “acteur du mouvement religieux” et donc un dangereux prosélyte en puissance.
“Je ne suis pas imam”
La vidéo incriminée a disparu de Youtube et Sadok Haddad nie en avoir eu connaissance avant qu’elle apparaisse au détour d’un courrier. En revanche, il reconnaît être trésorier de l’association “Les amis de la paix” qui a construit la mosquée du même nom, à Salon. “Il m’arrive d’y prendre la parole lors de la prière du vendredi. A ce moment-là, je suis effectivement vêtu à la manière musulmane. Mais je ne suis pas imam et ne fais pas de prêche”.
Pour sa part, son avocat dit ne pas avoir connaissance des éléments. “Ce n’est pas notre argument. Quoi qu’il y ait sur cette vidéo, si elle existe, cela relève de la liberté de culte et de la vie privée de mon client”, reprend Frédéric Pascal. Pour l’heure, les deux parties ont échangé des mémoires et maître Pascal attend que le tribunal administratif mette à l’audience cette affaire. On y apprendra ce qu’est un “acteur du mouvement religieux” pour l’éducation nationale.
Pour corser un peu plus cette histoire, quelques clics sur un moteur de recherche permettent de constater que le même Sadok Haddad était candidat pour le parti islamo-conservateur Ennahdha pour représenter les Tunisiens de France aux législatives de 2011. S’il reconnaît sa présence sur cette liste, il nie avoir jamais été militant de ce parti. “On m’a demandé et j’ai rendu service mais je ne suis pas un militant Ennahdha. Je suis pour la révolution et pas pour un parti en particulier”. Sadok Haddad a du mal à expliquer comment son nom est ainsi apparu sur une liste. Une coïncidence qui ne doit pas lui faire que des amis à l’ambassade de Tunisie.
Commentaires
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Je n’aimerais vraiment pas qu’un enseignant de l’école primaire laïque de mes enfants, fut-il enseignant de langue arabe, soit dans le privé candidat islamiste en Tunisie et orateur en djellaba dans les mosquées. De la même façon que je n’apprécierai pas qu’un professeur d’anglais de l’école primaire laïque de mes enfants soit dans sa vie privé candidat sur une liste religieuse catholique ou autre et soit prêcheur en soutane à l’église ou en manteau noir et papillottes à la synagogue.
Pour la situation financière de ce monsieur, il peut essayer de réciter 2 fois plus de sourates, qui sait ?
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@barbapapa ce n’est pas tant ce qu’on aime qui est important … Il est probable que des tas d’enseignants ont des engagements politiques et/ou religieux que la majorité des parents d’élèves réprouve, et l’Education Nationale les conserve. Il n’y a qu’à parcourir la liste FN aux régionales par exemple qui compte un bon nombre d’enseignants.
Mais est-ce que cela remet objectivement en cause leur capacité à enseigner ? Il y aura un problème si ils utilisent leur position d’enseignant pour endoctriner les élèves, et là, je serai d’accord avec vous, ils n’auraient rien à faire dans l’Education Nationale.
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En même temps un “ELCO” en primaire n’est pas non plus l’ enseignant essentiel dans l’école, il a un rôle très marginal pour une discipline “facultative”.
La démarche est intéressante : une directrice d’école fait parvenir une vidéo…mais de quoi je me mêle !! elle a pas assez de boulot dans son école, c’est bizarre ils sont tjrs en train de se plaindre que le ministère “charge la barque” !!
Est ce qu’elle piste aussi dans les églises les cathos qui y vont tous les dimanches, dans les synagogues, les temples…etc !!??
C’est consternant cette mentalité d’une “directrice” d’une école a qui on confie nos enfants !! épouvantable ! digne pétainiste….ou FN peut être…..
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Je trouve que le licenciement, DE FAIT, par la France de ce professeur n’est pas juridiquement fondé : de quel droit peut on virer un prof pour parler de sa religion dans un costume traditionnel dans son église, pour avoir été candidat à une élection au sein de son église ??? Non. Ce licenciement me semble absurde.
Par contre, les accords franco tunisiens doivent prévoir un double agrément venant des deux pays. Autant de la France de le recevoir que de la Tunisie de le payer et de l’envoyer chez nous. Or, si on lit l’article, il est rappelé dans son pays et convoqué par son administration. Et là, les TA Français ne sont pas compétents.
En conclusion, si son licenciement DE FAIT par la France me semble juridiquement absurde, le déplacement par l’administration tunisienne de son salarié n’est pas contestable ni contestée devant le TA Français.
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…En cette période d’ETAT d’URGENCE que le gvt justifie par des PROJETS D’ATTENTATS DEJOUES mais sans dire lesquels, on vise large…(tiens d’ailleurs, il y avait une mosquée sympa à LAGNY…Vous connaissez LAGNY ?…
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De toute façon pas d’accord avec cet ELCO.
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