SNCM : ouverture de négociations sous haute tension

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le 7 Juil 2014
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SNCM : ouverture de négociations sous haute tension
SNCM : ouverture de négociations sous haute tension

SNCM : ouverture de négociations sous haute tension

Le bateau tangue et la tension monte alors que les personnels de la SNCM entamaient ce lundi leur 14e jour de grève. Nommé par le gouvernement, il y a une semaine tout juste, le négociateur Gilles Bélier a passé l'après-midi et une partie de la nuit avec les représentants des salariés en préfecture, avant une suspension décidée par le préfet pour une reprise mardi matin. Il s'agit désormais de trouver une solution alternative à la mise en redressement judiciaire présentée comme inéluctable par Transdev et le gouvernement.

"Nous avons eu devant nous un négociateur prêt à trouver un cadre sécurisé pour discuter de l'avenir de la SNCM, estime Pierre Maupoint de Vandeul, de la CFE-CGC joint à la sortie de la réunion. La discussion reprendra demain matin. Le préfet s'est engagé à aller au devant des actionnaires durant la nuit pour qu'ils donnent mandat à leurs représentants pour négocier."

Le litige est d'ordre temporel : offrir un cadre de règlement en "trois mois" comme le souhaite la direction ou mettre en place un cadre sécurisé plus serein qui permette de régler les problèmes en fonction de leur degré d'urgence : trésorerie, recherche d'un repreneur, levée des contentieux européens avec "priorité donnée au contentieux lié à la privatisation".

Du temps, c'est aussi ce réclament les collectivités locales en partie unie sur une même ligne. Après les propos de Cuvillier, la Ville, le Conseil général et la communauté urbaine ont fait une déclaration commune, préparée durant le week-end. Elle consiste à demander à l'Etat et Transdev/Véolia un moratoire de "quatre mois minimum, soit jusqu'à la fin octobre, gelant toute démarche de mise en oeuvre de procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire". Ce délai est censé permettre d'offrir une porte de sortie au conflit en cours.

La piste du moratoire

Joint par téléphone à l'issue d'une réunion avec le maire de Marseille, en fin de matinée, Roland Blum est un des artisans de cette déclaration commune. "Je suis absolument scandalisé par les propos tenus ce matin par Frédéric Cuvillier, explique l'adjoint aux finances de la Ville. La SNCM n'est absolument pas en situation d'être mise en redressement judiciaire. Elle conserve 30 à 40 millions de fonds de trésorerie sans compter les 60 millions mis sous séquestre après la vente du Napoléon Bonaparte. Il y a donc de l'argent. Il faut donner du temps au temps en recherchant les solutions de reprise possible."

Ce délai doit donc permettre de continuer à chercher des financements pour l'achat de nouveaux navires et de faciliter l'arrivée d'un nouveau investisseur. Le nom de Christian Garin, représentant local du groupe Siem est notamment cité par Le Marin avec une nouvelle proposition de reprise assortie d'une commande de navires et d'une solution pour les contentieux européens. Absente de ce cartel de collectivités, la région a réagi par la voix de son président un peu plus tard dans la journée avec le même message.

De leur côté, en marge d'une conférence de presse sur le Danielle Casanova, Frédéric Alpozzo secrétaire général de la CGT des marins, brocarde cette solution : "Quatre mois, c'est insuffisant pour sortir de cette situation, explique-t-il. Quatre mois de moratoire, cela nous amène en octobre, exactement à la période annoncée par la direction concernant la fin de la trésorerie." Ils voient donc dans cette manoeuvre des élus "UMP", un nuage d'encre destiné à masquer les vraies responsabilités, celles du gouvernement et des principaux actionnaires.

Demande d'enquête pénale

Si le syndicat entend bien occuper à son tour le terrain judiciaire, ce n'est pas celui du tribunal de commerce mais plutôt celui du tribunal d'instance. En effet, le syndicat CGT des marins a mandaté son avocat pour demander la saisine d'un juge d'instruction concernant des "faits de conflits d'intérêts" qui impliqueraient selon eux des membres de cabinets ministériels. "Nous réservons pour le juge qui sera nommé les nombreuses pièces en notre possession," insiste-t-il. A plusieurs reprises, la CGT marins avait demandé à ce que soient menées des enquêtes sur le concurrent de la SNCM, Corsica Ferries, sans que cela ne débouche sur la moindre suite pénale ou même fiscale.

Pour l'heure, Frédéric Alpozzo concentre ses flèches sur le ministre Cuvillier, accusé d'avoir trahi sa parole "et sa signature" apposée sur l'accord de sortie de conflit début janvier dernier. "Depuis, il n'a tenu parole sur rien : le décret sur le pavillon français est devenu l'Arlésienne. Tous les mois, il se promène entre les bureaux des ministères et les tiroirs du conseil d'Etat. A force de nous balader, il ne faudra pas s'étonner de ce que la colère et l'injustice sociale va créer dans les urnes." 

A ses côtés, dans l'un des salons du Casanova, il a fait venir l'avocate du syndicat, Christine Bonnefoi, non pas pour commenter la démarche pénale mais pour revenir une nouvelle fois sur les contentieux européens. En effet, les 440 millions de sommes indûment perçues sont présentées comme le frein principal à tout issue positive, reprise, achat des navires et survie de l'entreprise.

Une réponse à Paul Giacobbi

L'avocate spécialisée en droit public conseille le syndicat lors de toutes les réunions au ministère à propos des contentieux européens. Elle s'efforce donc de tordre le cou à quelques idées reçues dont les principales sont le montant des sommes dues et le calendrier des remboursements. Pour elle, les processus juridiques et politiques sont loin d'être clos. Ils doivent permettre un règlement au long cours de ces contentieux. "Il n'existe aucun acte juridique qui impose à la SNCM de rembourser le montant des aides publiques perçues au titre de la délégation de service public, explique-t-elle. Si ce risque existe, il n'est pas proche."

En revanche, elle accrédite la menace brandie par Paul Giacobbi, le président de la collectivité corse, de rendre exécutoire la demande de remboursement. "Il en a tout à fait le droit, c'est de sa compétence. En revanche, il y aura toujours une discussion sur le montant. Aujourd'hui, on ne sait pas quel montant la collectivité est en droit de réclamer puisque celui-ci peut faire l'objet de discussions entre la commission européenne et l'Etat. Sa décision est donc immédiatement attaquable."

Dans son communiqué de vendredi, le président de la collectivité corse s'est bien gardé de donner le moindre montant. Il ne veut en aucun cas passer pour l'unique fossoyeur de la compagnie. Dans cette histoire, la pelle change souvent de main.

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Commentaires

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  1. JL41 JL41

    Certains voiles ont été levés mais il subsiste encore pas mal de non dits. Cette affaire politique, économique et sociale reste difficile à comprendre pour beaucoup de vos lecteurs. On se perd dans le millefeuille des commentaires et la crédibilité que l’on peut accorder aux discours des protagonistes, juges et partie. Sans doute seule la Cour des comptes pourrait apporter une clarification crédible à ce dossier, en l’appréciant dans son ensemble ?

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  2. jmax jmax

    Il suffit de rembourser les aides illégales de l’Etat, il suffit de vouloir acheter un nouveau bateau pour se rendre compte que la compagnie est en faillite. Et la grève en plein départ de vacances, c’est le pompon: l’argent qui n’est pas dépensé par les vacanciers ne reviendra pas

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  3. piéton de Marseille piéton de Marseille

    Y a 25 ans , je suis allé en Corse avec la SNCM, à l’allée le service était mauvais (resto, accueil, trarifs à bord…), et le retour ….. la gréve , on a fini par rentrer par Gène (où nous avons dîner dans un petit resto et hop pour les italiens ) et fait 5 heures de voiture pour arriver vers 3H du matin le lundi .
    Que ceux qui n’ont jamais subi les grévistes de la SNCM lèvent la main.
    la gestion du personnel et des services à la SNCM pose question depuis tant d’années.
    On va une fois de plus mettre un couvercle sur des abus et incompétences, jusqu’au prochain conflit.
    Mais ceux qui vont payer c’est tous ceux qui utilisent ou dépendent de ces trajets que les grévistent utilisent uniquement pour maintenir leur situation de privilégiés.

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  4. Cabrin_ Cabrin_

    Une méga embrouille politico financière, c’est l’impression que ca laisse, ou les dindons de la farce sont toujours les mêmes

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  5. Anonyme Anonyme

    entre fausses évidences, arguments récurrents, contre vérités et service dégradé, on sait tout ça mais c’est très emmélé; Et c’est précisément ce type de situation dont les francais ( a fortiori les marseillais)ne veulent plus entandre parler ou souhaitent en entendre parler autrement.
    allez MARSACTU , au boulot ! vous êtes bons et montrez nous que vous pouvez aller plus loin dans l’analyse des sitiuations locales!

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  6. Doums Doums

    La SNCM doit s’en sortir d’une manière ou d’une autre….. N’oublions pas qu’elle fait et a fait vivre des centaines de familles marseillaises et corses et quelle a été l’une des entreprises les plus importantes du port. Oui, les marins ont trop souvent été en grève,oui nous avons dû subir les aléas de leurs revendications mais aujourd’hui c’est de plus d’un milier d’emplois dont il s’agit. L’état n’a pas pris ses responsabilités, l’actionnaire veut s’en débarrasser depuis longtemps, soutenons au moins ces hommes et ces femmes qui se battent pour maintenir leur emploi !

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  7. leravidemilo leravidemilo

    Les vrais fossoyeurs de la SNCM sont en premier lieu L'”Union” Européenne et sa “concurrence” libre et “non faussée”(entre les renards et les poules) au services des capitaux les plus foireux et les plus douteusement anonymes,l’état français ,c’est tout un,larbin des mêmes capitaux,de la privatisation à la passivité irresponsable (et hypocrite) actuelle,le “concurrent” libre corsica ferries, de capitaux douteux et aux origines inconnues, sans aucun bateaux ni même personne morale claire,membre d’une holding située successivement au luxembourg puis en suisse,travaillant à perte,ne rendant pas les comptes exigés dans le cadre d’un marché public et percevant donc des subventions publiques sans contrôle,et dont la holding,largement sous capitalisée c’est vue refusée l’approbation de ses comptes par les commissaires aux comptes du luxembourg (!!!),et s’asseyant tous les jours sur les droits du travail français et italien par l’embauche de non européens dans des conditions scandaleuses,en jouant sur les pavillons bis ou ter de complaisance…Giaccobi ne veut pas être le “seul fossoyeur” mais ce n’est pas le cas;ils sont nombreux,trés coalisés,et Giaccobi roule pour eux,préparant ainsi la prise en otage de “son” ile par des gens beaucoup plus puissants,nocifs et dangereux que les grévistes de la sncm… Que nos collectivités locales ne commence à peine à se sentir concernées et à tenter de prendre une position commune est consternant et révélateur de leur leur faillite pour ce qui est d’assurer leurs responsabilités. Elles devraient,et pas qu’un peu,demander des comptes au gouvernement pour sa propre irresponsabilité,ses attitudes plus qu’ambigues et sa passivité. Les dégâts directs et collatéraux vont être considérables et les prochaines soirées électorales (trés) traumatisantes pour ces “braves gens”…

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  8. cani cani

    le probleme n’est pas nouveau
    il y a 25 ou 30 ans déjà je revenais pas l’Italie car je n’étais jamais certain de pouvoir etre à la reprise de mon travail

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  9. Jean-do Jean-do

    …Ha, la SNCM…
    LE cas d’école du NAWAK français…
    Toutes les justifications auront été bonnes, même celle de faire bosser les chantiers navals de l’altlantique, fournisseurs de FLEURONS tels que les NGV (à quai en hiver car leurs moteurs jet ne pouvaient pas encaisser la houle d’hiver, et car leur coque en alu se faisait percer par le moindre choc avec un corps flottant : je crois me rappeler qu’on a failli en perdre un qui s’était pris un tronc d’arbre en haute mer…On imagine contre une baleine…)
    Ces FLEURONS français ont vite été refopurgués pour faire de la liaison courte en archipel, quelque part en Indonésie…loin des regards…heureusement que la mémoire ça s’entretien).
    Et le NAPOLEON BONAPARTE ! WAHOU ! La classe…Heureusement que ce cercueil flottant s’est échoué à quai, nombreux étaient ceux qui flippaient de voir ce pot de yahourt se prendre un boucan d’enfer…)
    Le plus drôle ?
    Les “chantiers de l’atlantique”, cette perle française, appartient aux coréens…Ca aussi, il faudrait le souligner…
    Les planqués de la SNCM, c’est un combat d’arrière garde dans lequel il est HALLUCINANT de voir MARSACTU se jeter (ceci étant, chapeau…défendre le MASSACRE de la saison des commerçants marseillais… avec ce que la CCI vous balance en encarts publicitaires…CHAPEAU, ça c’est de l’indépendance^^)

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  10. savon de Marseille savon de Marseille

    Il veulent l’argent du Napoléon Bonaparte pour les indemnités de départ . C’est une histoire d’argent. Pas plus. es enchères montent. Réunion suspendue hier pour cause de Match ? Cà ne m’étonnerait pas . Ici c’est Marseille. Il est temps de virer tout ce monde sans aucune indemnité. Basta.

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  11. cani cani

    Que la CGT se positionne comme repreneur – elle en a la capacité financiere en vendant au besoin une partie de son parc immobilier – puis qu’elle recrute ses amis.
    Elle pourra mettre ainsi en pratique ses compétences de gestionnaire et,
    Comme dans beaucoup de SCOP, les salariés ne bougeront alors pas beaucoup malgre des salaires bloqués et des cadences levées

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