Sculptures en perdition à Longchamp

Sculptures en perdition à Longchamp

Au fond du Parc Longchamp, dans les anciennes cages aux ours, on trouve d’étranges tas de pierre. Entre œuvre d’art et ruines, il s’agit en fait des Fontaines Bleues du sculpteur Raymond Martinez. Ces trois structures en verre coulé, jadis bleues, sont aujourd’hui en piteux état. Deux d’entre elles vont ainsi être retirées. La troisième sera retapée. Pour l’artiste, l’état actuel de son œuvre n’est pas un cas isolé mais reflète "l'un des problèmes de l’art public en général et un manque de moyens de la ville de Marseille".

Commandées par la Mairie en 1995, les Fontaines Bleues conceptualisent les notions de capture, d'enfermement et d’évasion. Sont dénommés ainsi Bassin de la Méduse, Bassin d’Orphée et Bassin d’Icare les cages dans lesquelles elles se trouvent. L’artiste souhaitait faire référence aux origines grecques de la ville et au passé zoologique du lieu. Travailler avec l’eau était pour lui une façon de rappeler le rôle central de Longchamp dans l'approvisionnement en eau de la ville. Aujourd’hui, Les Fontaines Bleues ne représentent plus grand chose. La Ville prévoit donc, dans le cadre du projet Grand Longchamp, de "déposer et remiser" deux de ces trois fontaines "dans ses locaux", de "reconceptualiser" la troisième, comme indiqué dans un rapport qui sera soumis au vote lors du prochain conseil municipal. Autrement dit de les mettre dans un coin poussiéreux.

Un artiste « Compréhensif »

Selon Laure-Agnès Caradec, adjointe au maire déléguée aux parcs et jardins "un protocole transactionnel a été établi avec l’artiste". L’arrangement s’établit en trois points : rénover avec son créateur la plus importante des sculptures (celle d’Icare), enlever les deux autres et rendre à l’artiste "les éléments que la Ville ne souhaite pas conserver". Reste à négocier avec le sculpteur le tarif pour la reconceptualisation d’Icare. Ce dernier, toujours selon l’adjointe au maire, "est compréhensif quant à l’état de dégradation de son œuvre".

Raymond Martinez se montre surtout "désolé" et résigné. Pour lui, son œuvre est "complètement ruinée à cause du vandalisme, du manque d’entretien et de personnel" qui découlent "d’un problème de culture et d’un manque d’argent". Il a donc accepté de "sauver la symbolique de l’œuvre par une intervention légère" et a abandonné l’idée d’une rénovation totale des fontaines. De plus, il devra respecter un cahier des charges rigoureux qui lui impose une rénovation sans eau et sans électricité, bref sans entretien. Compréhensif, il renonce donc à une certaine liberté. Pour lui, cela fait partie du métier.