Scénaristes, documentaristes, réalisateurs, ils rêvent d’une maison des auteurs à Marseille

Échappée
le 29 Avr 2023
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Une maison des auteurs du monde du cinéma pourrait voir le jour à Marseille. Porté par des professionnels, elle est espérée par de nombreux acteurs de la filière locale. Pour enfin, sortir de chez soi et travailler dans un espace dédié.

De haut en bas et de gauche à droite : Andréa Haug, Mehdi Ahoudig, Marie Mandy, Eric Bernaud, Jean-François Comminges. (Photos : LD, Stéphane Lamalle, Yohanne Lamoulère)
De haut en bas et de gauche à droite : Andréa Haug, Mehdi Ahoudig, Marie Mandy, Eric Bernaud, Jean-François Comminges. (Photos : LD, Stéphane Lamalle, Yohanne Lamoulère)

De haut en bas et de gauche à droite : Andréa Haug, Mehdi Ahoudig, Marie Mandy, Eric Bernaud, Jean-François Comminges. (Photos : LD, Stéphane Lamalle, Yohanne Lamoulère)

Écrire, écrire, écrire. C’est une nécessité, mais c’est également leur travail. Scénaristes et réalisateurs oeuvrent en ce moment à la création d’une maison des auteurs au coeur de Marseille. Le projet, surnommé la “Turbine écriture”, est porté par cinq associations de professionnels de l’audiovisuel, dans une réflexion avec la région*.

Sur le papier, le projet est déjà ficelé. Un espace de 800 mètres carrés. Une infrastructure d’envergure pour laisser les talents se déployer et les esprits se libérer. La Turbine est pensée comme un site lumineux, où se croiseront des couloirs menant à des salles de réunion ou de travail, des escaliers donnant accès à une salle de projection et à un café. Les associations à l’initiative du projet ne sont pas en reste. Des bureaux seront ainsi alloués à la Belle Équipe, l’Acid, la Scam, la Boucle documentaire et l’Aarse (*). En somme, une maison des auteurs au service des 5 000 plumes, exclusivement issues de l’audiovisuel, recensées dans le Sud de la France.

Mais pour l’heure, la Turbine n’a pas encore trouvé ses murs. Du retard a été pris dans le calendrier qui prévoyait l’entrée dans des locaux municipaux dès le printemps dernier, et une première maison à taille réduite pour septembre prochain. Les discussions seraient en cours avec la région et les autres acteurs de la filière, en adéquation avec le plan Marseille en grand annoncé en 2021. Pour raconter ce projet encore en gestation, Marsactu a réalisé une série de portraits. Cinq plumes locales livrent leurs attentes sur ce lieu, dans lequel ils espèrent à l’avenir se croiser.

Marie Mandy, autrice-réalisatrice du réel

Le jour où nous la rencontrons, Marie Mandy est installée à une autre table qu’à son habitude, au café La Caravelle, sur le Vieux-Port. Une jeune femme est assise à la place qu’occupe presque tous les matins l’autrice et réalisatrice de documentaires. “Je suis conditionnée cérébralement pour écrire à cette table, dans ce café, quatre heures par jour”, sourit-elle. Le brouhaha du lieu lui permet de se concentrer, “seule en étant entourée”. C’est d’ailleurs ce mantra qui guide son engagement dans la création d’une maison des auteurs à Marseille. Ville où elle a posé ses valises il y 30 ans, laissant sa Belgique natale et Paris pour la “lumière et la beauté marseillaise qui nous permettent d’échapper à la folie du monde”.

(Photo : Léa Delaplace)

On souhaite un lieu fédérateur dédié à l’écriture”, argue l’autrice. À ses yeux, l’écriture est sous-estimée dans le domaine du documentaire et de l’audiovisuel. “Ce n’est pas trois jours par mois sur un coin de table. C’est vraiment notre quotidien”, rappelle-t-elle. “D’ailleurs, il y a trois écritures pour un documentaire : avant, avec la construction du dossier et les recherches, pendant avec le tournage et les imprévus de la réalité, et après avec le montage et les choix que nous faisons”.

Ce travail de mots, bien que solitaire, n’empêche pas Marie Mandy de vouloir en discuter avec ses pairs. Et pourquoi pas aussi, de partager d’autres activités plus conviviales. “Si je ne fais pas de yoga avant de travailler, je ne suis pas conditionnée pour, je bosse mal”, confie-t-elle.

Son dernier projet phare : Les femmes préfèrent en rire, qui réunit neuf femmes humoristes à l’occasion d’un voyage en train, et qui est à voir ici.

Jean-François Comminges, réalisateur-scénariste

“C’est un combat. Reconnaissons la singularité de la filière cinématographique à Marseille, et notamment celle de ceux qui écrivent les films et les documentaires”, avance Jean-François Comminges. Il est l’un des pilliers du projet, à la fois auteur, réalisateur et scénariste. Chaque jour depuis 20 ans, il se rend dans les locaux de la Friche la Belle de mai pour travailler, là où il a “grandi artistiquement”. Ancien Parisien, il a déjà fréquenté une des deux maisons des auteurs de la capitale. Et ambitionne depuis qu’il puisse, un jour, faire de même ici, chez lui.

(Photo : Léa Delaplace)

“À Marseille, c’est un besoin pratique mais aussi une façon de reconnaître les auteurs locaux. C’est une ville de cinéma en devenir. Il ne faut pas oublier l’axe de la création parallèle, à celui de la production”, souligne-t-il. Jean-François Comminges voudrait que ses pairs soient mieux entendus dans le cadre des réflexions autour d’une maison ou d’une cité du cinéma. Qu’ils ne soient pas oubliés, eux, les petites mains locales de l’écriture indispensables à la filière. Pour ce quiquagénaire, l’implantation de cette maison dans la ville permettrait aussi de faire vivre le récit. Un espace qu’il voudrait “antiraciste, multiculturel et au langage unique qu’est Marseille.” 

Son travail est à découvrir ici.

Mehdi Ahoudig, réalisateur sonore

Il est d’abord arrivé à Marseille pour une résidence d’Arte Radio. Mehdi Ahoudig a ensuite appris à connaître la ville à travers ses documentaires, et a fini par y poser ses valises il y a cinq ans. Ingénieur du son de formation, il écrit aujourd’hui des podcasts pour des antennes radio, et depuis peu, des documentaires audiovisuels.

(Photo : Yohanne Lamoulère)

À 55 ans, cette oreille aiguisée a installé son bureau cinq étages au-dessus de son appartement. “Je travaille seul, au calme. Même si on connaît des collègues sur Marseille, on ne se contacte jamais pour travailler l’un à côté de l’autre”, explique-t-il. Alors il est favorable au projet de la Turbine. “Pour que ça devienne un laboratoire, où l’on puisse s’enrichir de temps informels”, insiste-t-il.

Pour ce professionnel multi-casquettes, ces pauses café sont primordiales. Elles sont synonymes d’inspiration, mais pas que. “Le sonore, ça se bricole. Pouvoir se donner des conseils, se confronter aux autres, se partager des contacts, se mélanger aussi, créer un vrai réseau… c’est considérable”, considère Mehdi Ahoudig. Lui qui s’appuie sur l’image pour produire du contenu sonore ne voit que des avantages à travailler aussi à côté de ceux qui la produisent.

Son projet phare : Ya Rayah, l’exil en dansant, un documentaire sonore de 33 minutes. Mehdi Ahoudig y raconte l’histoire du tube franco-algérien de Rachid Taha, un hymne pour ne pas oublier l’exil en France et le regret du pays natal.

Éric Bernaud, réalisateur

Éric Bernaud a investi son garage, au rez-de chaussée de sa maison de Gardanne, pour installer son espace de travail. S’extraire de son domicile et de son quotidien pour rejoindre la Turbine porte alors tout son sens pour le réalisateur de contenus d’animation. “Au lieu de se dire, on va chez qui ? On se dira, on réserve quelle salle ?, rigole-t-il. Ce sera intéressant de partager le silence ou une séance de travail”.

(Photo : Stéphane Lamalle)

Ce passionné de musique y voit aussi un intérêt administratif : “On peut imaginer y trouver les associations d’auteurs, des juristes aussi, et donc pouvoir s’informer et être aidé pour nos droits. Et ne pas se retrouver seul face aux dossier qu’on doit remplir très régulièrement.” Éric Bernaud pense aussi aux plus jeunes. “On échangera sur nos expériences et on organisera des ateliers pour les accompagner !”, ambitionne-t-il.

Son projet phare : la Proxémie, un film coécrit autour de la distance aux autres. Il est projeté sur écran sur lequel marchent les visiteurs de l’exposition “Foule” à la Cité des Sciences de la Villette, à Paris.

Crédit Photo : Stéphane Lamalle

Andréa Haug, la scénariste

Elle rêve d’une maison où les histoires se racontent, car “écrire c’est oraliser”. Andréa Haug, journaliste devenue scénariste, appelle de ses voeux un lieu aux multiples facettes, au service de l’écriture. “Un lieu d’expérimentation, de ressources, de travail, de rencontre”, liste-t-elle, enthousiaste.

(Photo : Léa Delaplace)

Mais André Haug y voit surtout un enjeu crucial. “Cette maison, c’est aussi pour gagner en visibilité et en légitimité. Il serait bon d’ancrer dans l’esprit des gens que les auteurs écrivent, parce qu’on est souvent invisibles”, martèle la scénariste. Et cela commence par avoir un lieu plus officiel que chez elle ou un café. “On pourra recevoir les producteurs directement à la maison des auteurs, c’est tout de suite mieux”. L’autrice, cinéphile engagée, promeut aussi la place des femmes dans le secteur. Ce site pourrait être un levier dans ce sens, un espace pour aborder cette question et avancer sur la parité.

La quadragénaire, originaire de la région, trépigne désormais d’impatience. Et voit encore plus loin : “On peut l’imaginer avec des auteurs de romans graphiques, de bandes dessinées, de livres, et pourquoi pas aussi un jour, avec Chat GPT ?”   

Son travail est à découvrir ici.

*l’Aarse, l’association des auteurices-réalisateurices du Sud-Est; la Scam, la Société civile des auteurices multimédia; l’Acid, l’association du cinéma indépendant pour sa diffusion

* Actualisation le 10 mai 2023 : contrairement à ce que nous indiquions dans un premier temps, la région n’est pas formellement partenaire du projet.

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Commentaires

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  1. vékiya vékiya

    bonjour, le dernier lien ne fonctionne pas. merci

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  2. julijo julijo

    très beau projet.
    chez moi, aucun lien ne fonctionne !!

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  3. Baudouin Koenig Baudouin Koenig

    Quand Marseille veut s’afficher sur grand écran avec le plan Macron, quand la Région célèbre le cinéma à Cannes, il ne faut jamais oublier qu’il n’y a pas de films, de séries, de podcasts, de chansons, de BD… sans récits, sans auteurs….

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