Quand l’embauche de son fils “retombe sur la gueule” de Stéphane Ravier
Le sénateur Reconquête Stéphane Ravier comparaîtra le 17 avril devant le tribunal judiciaire de Marseille pour prise illégale d'intérêts. Maire d'arrondissements de 2014 à 2017, il en avait profité pour offrir un emploi municipal à son fils. Retour sur cette affaire, révélée par Marsactu.
Stéphane Ravier devant le palais de justice de Marseille le 12 mai 2023. (Photo : Ilies Hagoug)
“J’ai bien compris qu’en embauchant mon fils, ça allait me retomber sur la gueule à un moment donné.” Cette confession de Stéphane Ravier vieille de trois ans et faite à Marsactu se révèle de plus en plus juste. Le sénateur Reconquête sera jugé en correctionnelle le 17 avril pour prise illégale d’intérêts et risque l’inéligibilité. En cause, l’embauche de son fils Thomas à la mairie des 13e et 14 e arrondissements. Ce dernier comparaîtra à ses côtés pour le recel du même délit, comme l’ont annoncé successivement La Marseillaise et La Provence.
Embauche familiale aux espaces verts
En 2014, Stéphane Ravier, alors membre du Front national, était élu à la tête du plus grand secteur de la ville, marqué par l’affaire Sylvie Andrieux, députée socialiste condamnée pour avoir massivement détourné des subventions du conseil régional. Un an plus tard, il avait usé d’un de ses maigres pouvoirs pour pistonner sa progéniture. En tant que maire de secteur, il avait la main sur les embauches de contractuels. Celle de son fils s’était faite en toute discrétion jusqu’à ce que Marsactu révèle l’affaire. Il lui proposait donc un CDD pour intégrer sa toute nouvelle “brigade d’intervention de proximité” ou “BIP”. Chargée de nettoyer l’espace public et les espaces verts, cette unité avait été créée au mépris des compétences d’une mairie de secteur, la propreté restant du ressort de la métropole. Stéphane Ravier ne l’ignorait pas et assumait en 2020 auprès de Marsactu de contrevenir à la loi. “Le maire de secteur ne peut pas être un super facteur qui ne fait que transmettre des courriers. J’avais des comptes à rendre aux habitants qui m’avaient élu”, se justifiait-il.
De manière générale, une fois le recrutement rendu public, Stéphane Ravier a toujours défendu ce choix d’embaucher son fils. Son argument fétiche : parlementaire, il aurait pu aisément lui trouver un meilleur job au Sénat. Il le développait par exemple dans l’émission “Face à Marsactu” en pleine campagne des municipales 2020 lors d’une “question qui fâche” : “Le piston de papa aurait pu s’appliquer lorsque je suis devenu sénateur en octobre 2014 et j’aurais pu en faire un assistant parlementaire”, protestait-il.
Comme développé dans cet extrait vidéo, Stéphane Ravier avait dans un premier temps expliqué que le CDD ne connaîtrait pas de reconduction. Il y aura finalement plusieurs prolongations jusqu’à l’intégration de Thomas Ravier comme fonctionnaire. Quand, en 2020, lors de l’alternance politique, la nouvelle majorité de droite du secteur dirigée par Marion Bareille a supprimé la BIP, elle a donc dû conserver le rejeton du sénateur, présenté comme “assidu”.
Mais, pour obtenir cette titularisation, le dossier de Thomas Ravier a dû franchir les murs de la bastide Saint-Joseph qui abrite la mairie de secteur. C’est l’administration de la mairie centrale, dirigée alors par Jean-Claude Gaudin (LR), qui a procédé à l’intégration du minot trois mois avant les municipales. “Lui et son collègue, c’est Jean-Claude Gaudin qui les a embauchés. Gaudin l’a gardé pendant un semestre puis une année et il a fini par le titulariser comme il a titularisé son compère”, expliquait Stéphane Ravier à Marsactu. Face au tribunal, il se défendra de tout délit, a précisé son avocat Julien Pinelli à l’AFP.
Un CDD renouvelé une dizaine de fois
Ce cheminement administratif avait été déjà scruté de près par l’agence française anticorruption (AFA) qui avait procédé à un large examen des points noirs de la municipalité marseillaise, dont la gestion de la mairie des 13e et 14e arrondissements. C’est l’AFA qui, la première, avait alerté sur le “risque de prise illégale d’intérêts”. Après s’être fait remettre le dossier administratif de Thomas Ravier par les ressources humaines, elle notait que depuis l’été 2015 et son entrée en mairie de secteur, le jeune homme avait cumulé une dizaine de contrats. Le tout jusqu’à sa titularisation par la mairie centrale. Sur chacun d’entre eux, figurait noir sur blanc la mention “sans aucune possibilité de renouvellement”.
L’AFA chargeait alors Stéphane Ravier, mais soulignait également l’absence de garde-fous :“Les recrutements de contractuels motivés par un accroissement temporaire ou saisonnier d’activité n’ont pas l’obligation d’être transmis au contrôle de légalité [l’examen du caractère régulier des décisions des collectivités par la préfecture, ndlr], ce qui a permis que ces contrats puissent se succéder sans respecter les dispositions légales. De plus, la mairie centrale n’a pas exercé de contrôle de deuxième niveau qui aurait permis de mettre fin à cette situation dès la signature du deuxième contrat”. Au tribunal, la Ville de Marseille se présentera pourtant comme partie civile ; c’est-à-dire comme victime.
Commentaires
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Donc la maire de secteur l’a chouchouté puisque qu’elle a supprimé la BIP, il fait y fait quoi maintenant ?
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Papa sénateur qui n’est pas très présent au sénat (presque un emploi de complaisance). De père en fils donc, logique.
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Je me souviens très bien de cette polémique : à l’époque j’étais président du groupe socialiste de la ville de Marseille et j’avais été un des rares élus (avec Samy Johsua) à dénoncer ce recrutement de complaisance.
Je me souviens également être intervenu sur une chaîne d’infos en continu sur ce sujet. Son correspondant local m’a avoué, après coup qu’il avait sollicité une dizaine d’élus de droite et de gauche pour réagir et que j’avais été le seul à répondre positivement.
Stéphane MARI
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Il faudrait faire le tour des autres villes environnantes pour s’apercevoir que nombreux élus ont embauché leurs enfants ..
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