Le président Gaudin dernier disciple de sa méthode
Jean-Claude Gaudin a été confortablement réélu à la tête de la métropole. En revanche, sa méthode basée sur le consensus au-delà des clivages politiques a échoué. Désavoués dans leur propre camp, les candidats socialistes qu'il proposait au poste de vice-président ont été sèchement battus. Mais les failles sont aussi visibles au sein de la droite.
Jean-Claude Gaudin arrive en tribune et prend place entre le doyen et le benjamin de l'assemblée.
À la tribune du conseil métropolitain, Jean-Claude Gaudin a fini par marmonner alors que son micro était ouvert : “Tout le travail d’équilibre est déséquilibré.” Son projet d’ouverture à gauche de la gouvernance de la métropole venait de tomber à l’eau. Tour à tour, les maires PS de Vitrolles et de Miramas, Loïc Gachon et Frédéric Vigouroux, viennent d’être battus dans l’élection des vice-présidents de la métropole. Avec eux, c’est toute la stratégie œcuménique de Gaudin qui s’étiole sous le regard hagard de son allié de papier, Jean-David Ciot, premier secrétaire fédéral du PS 13. Ce dernier a fini par jeter l’éponge et renoncer à présenter les autres candidatures prévues en accord avec Gaudin, dont la sienne… À leur place, des élus LR, UDI ou apparentés souvent peu connus ont tenté leur chance et gagné les galons de vice-présidents.
Jean-Claude Gaudin et les siens ne pleureront certainement pas longtemps les camarades victimes du désormais célèbre “tir aux pigeons”. Mais c’est bien son leadership et sa stratégie qui ont ainsi été mis en cause. Et la droite s’est joyeusement divisée le jour de son triomphe.
Tout semblait pourtant avoir été calé, Gaudin se multipliant à la dernière minute pour tenter de trouver l’équilibre fragile qui contenterait tout le monde. Il avait fini par arrêter une liste de 28 noms (20 vice-présidents et 8 conseillers métropolitains délégués) à laquelle devaient se conformer les siens. La matinée commence fort bien avec sa seconde élection à la présidence, après celle très houleuse du 9 novembre. Sa majorité semble alors confortable avec 152 voix sur 240 contre 32 à Stéphane Ravier (FN), 22 à Gaby Charroux (PCF) et 17 pour Florence Masse (PS). Celle-ci aura fait le plein des seuls socialistes marseillais qui affirment vouloir faire leur groupe à part avec Samia Ghali à sa tête.
De son côté, Jean-David Ciot affirme être le seul leader d’un groupe socialiste qui apparaît battu. Les querelles intestines du PS des Bouches-du Rhône sont un spectacle habituel. Mais la méthode Gaudin basée sur l’équilibre politique et territorial a fait des déçus dans son propre camp. Des “difficultés dans le département” que même son entourage le plus proche n’avait pas vu venir.
Les socialistes torpillés
La maire de Saint-Estève-Janson Martine Cesari obtient 100 voix contre 80 pour Loïc Gachon puis le premier adjoint de Salon-de-Provence Michel Roux (UDI) l’emporte face à Vigouroux avec 95 contre 87. La première, couchée sur la liste des vice-présidents potentiels par Maryse Joissains, a ouvert une brèche dans laquelle s’est engouffré le second, bien aidé par le maire LR de Salon, Nicolas Isnard.
Dans les allées du Pharo, chacun y est allé de ses analyses, toutes limitées par le secret des votes, même s’ils sont effectués sur des boîtiers électroniques et sans isoloir. Influence de la présidente du département, esprit de corps des maires de droite, exigences de la maire d’Aix Maryse Joissains ? Sûrement un peu de tout ça à la fois. Ainsi, Loïc Gachon voyait dans son éviction la trace d’“inimitiés au sein du pays d’Aix en raison de ses positions pas assez anti-métropole”. A droite, d’autres assumaient avoir désobéi à Gaudin. Habitué du geste, l’ex président de la communauté urbaine de Marseille Guy Teissier s’en explique même : “J’aurais respecté l’accord s’il n’y avait pas eu d’autres candidatures. Nous avons des candidats aux départementales qui ont gagné plutôt brillamment sur une terre de mission pour nous contre Loïc Gachon et je trouvais que pour mes amis, ce n’était pas un bon signal de le remettre en selle.”
Martine Vassal impose sa marque
Les 12 voix supplémentaires gagnés par le Front par rapport à son score théorique lors de l’élection du président avaient averti Gaudin qu’une fronde venue de son camp le guettait. Elle ne s’est finalement manifestée que sur des pièces rapportées, exception faite d’un, Robert Assante. Ancien membre du cabinet de Jean-Claude Gaudin, adjoint au maire et vice-président réputé bosseur de la communauté urbaine, Assante avait un handicap. Depuis les dernières municipales où il avait choisi la dissidence dans les 11e et 12e arrondissements, ses collègues de droite lui ont régulièrement fait payer ce combat à coup d’humiliations plus ou moins grandes. Ses inimitiés nombreuses ouvraient la possibilité de contestations.
C’est la fenêtre qu’a choisi Martine Vassal, la présidente du département élue première vice-présidente de la métropole. En recueillant 34 voix de plus que Gaudin, elle a marqué son pouvoir et sa prise sur les élus locaux, le portefeuille départemental aidant certainement à se faire des amis. Le 18e poste de vice-président promis à Robert Assante est sa sucrerie supplémentaire. Elle lui a fait préférer le maire d’Eyguières, Henri Pons. Vice-président du Département aux transports, ce dernier était envoyé en mission pour rafler cette compétence clef à la métropole contre Assante, jusqu’à lors chargé des transports à la communauté urbaine.
“Le département consacre 300 millions d’euros sur cinq ans aux transports”, justifiait son entourage pour adoucir l’attaque. Le vote s’est déroulé sans accroc pour Vassal avec 118 voix pour son protégé contre 70 à celui présenté par Gaudin. Ce vote confirme que Martine Vassal s’installe en dauphine du maire de Marseille au sein de la nouvelle institution.
Une métropole à pas comptés
A chaque fois, Gaudin aura laissé la démocratie faire son œuvre, comme s’il s’était finalement résigné à voir son plan partir en fumée. Une seule fois, il sera venu aux côtés de Maryse Joissains, soutenir un de ses candidats. Le président de l’union des maires et édile de Mimet Georges Cristiani doit sûrement à ce double coup de pouce son élection à la vice-présidence. Dans un geste un peu désespéré, il met “les honneurs et ses indemnités” en jeu et refuse de se présenter s’il a un adversaire face à lui.
Gaudin fait d’abord mine de ne pas comprendre : “Vous retirez votre candidature ?” avant de comprendre que le président de l’union des maires lui demande de respecter l’accord passé en novembre : le représentant des maires et la présidente du conseil départemental devaient être sortis du jeu d’équilibres entre les territoires. Résultat, Cristiani aura quand même un rival, Philippe Ardhuin maire LR de Simiane-Collongue. Mais le message est passé. Après le vote, il lâche : “C’est quand même dur d’avoir un maire face à soi quand on a passé tant d’années à les défendre…”
Seule maigre consolation pour Gaudin, avoir fait rentrer deux élus de ses proches pour occuper des postes clés, les finances pour son adjoint Roland Blum et la commission d’appel d’offres pour le spécialiste Bernard Jacquier. “Ils sont expérimentés mais ce ne sont pas des cadors. On ne pourra pas dire que Marseille est hégémonique”, sourit un élu marseillais. Gaudin, les dix-huit membres de son cabinet et son staff, tenteront de rééquilibrer les forces dans un exécutif finalement très frileux sur la métropole. Celle-ci se prépare à avancer à pas comptés.
Par Jean-Marie Leforestier et Benoît Gilles
Commentaires
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Quand le PS va-t’il se débarrasser de Ciot, roi de l’intrigue et de la magouille, héritier d’un système Guérini à la dérive ?
Si la gauche veut gagner Marseille, il faut déjà s’en débarrasser.
Mais ce ne sera pas suffisant; les socialistes marseillais devront manifester plus clairement leur unité, relayé par un secrétaire fédéral à la hauteur.
Et puis, consternant de voir des anti métropoles maintenant vice présidents. Bon, Vigouroux a échoué mais la place qui vient d’être offerte à Cristiani le vulgaire me consterne.
Bon, maintenant, au boulot les Métropolitaisn. La farce n’a que trop duré
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La place de vice-président n’a pas été offerte à M. Cristiani mais au président de l’union des maires . Bien que le maire de Mimet ne vous plaise pas,sa fonction est quant à elle hautement respectable.Quant aux élus et militants “socialistes” marseillais, — que vous semblez encourager à s’unir autour d’un nouveau secrétaire fédéral surtout autre que M.CIOT — laissez-moi vous dire, que leur avenir politique, qui se voudrait représenter la Gauche marseillaise, est bien sombre avec les représentants potentiels actuels.Leur stratégie au 1er conseil métropolitain a montré un niveau politique de quartier…
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Regardneutre, pas tant que ça, je suis catastrophé par la politique locale. Derrière un prdt de l’union des maires, il y a un homme : Cristiani, qui à ce que je sache a combattu comme un chiffonnier la métropole. Alors, trés difficile d’entendre que seule a fonction importe.
Par ailleurs, je ne défends aucunement les élus marseillais PS, et j’aimerais surtout de nouvelles têtes.
Mais quand certains d’entre aux prennent des positions claires, en particulier sur la gouvernance métropole, j’applaudis.
Les clivages à l’intérieur du PS sont consternants, et je dis que Ciot, fonction : secrétaire fédéral, est fortement responsable de la situation de blocage permanent.
Et je suis bien d’accord, je ne vois pas grand monde pour lui succèder.
Voilà un paradoxe et un blocage qui fait que je me suis éloigné de ce parti depuis longtemps.
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Mouais. La respectabilité d’une fonction doit en premier lieu être défendue et honorée par celui qui l’incarne.
M. Cristiani restera dans la toute petite Histoire locale comme celui qui n’a reculé devant aucun procédé pour s’opposer à la métropole : il a tour à tour menacé “de ne pas appliquer la loi” (bonjour l’exemplarité de l’élu de la République), souhaité l’organisation d’un référendum tenant compte non seulement du nombre d’électeurs, mais aussi de la superficie des communes (une innovation démocratique aussi moderne que le suffrage censitaire), et enfin s’est acoquiné au sein de la “Farce du 13″avec le “respectable” M. Guérini (un renvoi d’ascenseur après un copieux arrosage financier de sa commune par ce dernier).
Des idées toutes aussi judicieuses les unes que les autres, qui montrent la clairvoyance et la sûreté de jugement de cet individu.
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Il y a un endroit où le texte des délibérations adoptées est disponible ?
Et est-ce qu’on a la composition des groupes politiques ??
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Les délibérations devraient être mises en ligne sur les sites des “territoires”.
La composition des groupes politiques n’est pour l’heure pas connue puisque ceux-ci seront créés lors d’une prochaine séance. Toutefois, les groupes en puissance sont les suivants :
– un ou deux groupes socialistes
– le groupe EPIC rassemblant 28 maires de droite de la métropole conduit par le maire de Gémenos Roland Giberti (UDI) avec notamment le 2e VP et maire de Bouc-Bel-Air Richard Mallié et vraisemblablement le maire d’Aubagne Gérard Gazay (LR tous deux)
– le groupe Front national
– le groupe communiste
Toutefois, on ne sait pas encore quel sera le nombre d’élus minimum pour former un groupe au sein de ce conseil. D’autres tendances ne sont toujours pas formés : les gaudinistes pur jus, les anti métropole acharnés, les “indépendants” (du nom du groupe mené par le maire de Marignane à MPM)…
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Ça promet d’être fantastique…
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Merci pour cet article très intéressant. Une petite relecture ferait disparaître deux ou trois coquilles qui font mal aux yeux. 😉
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Oui, en effet. Merci de l’alerte !
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Félicitations à l’équipe de Marsactu, à Lisa Castelly, à tous ceux de Marsactu qui ont été impliqués dans le direct d’hier et qui avez trouvé réponse à toutes les questions posées (je suis bluffé), puis cet article de Jean-Marie Leforestier et Benoît Gilles au titre super bien trouvé : « Le président Gaudin dernier disciple de sa méthode ».
Vous avez fait de cet évènement exceptionnel qui aurait pu être banal devant le désintérêt d’une population désabusée, une leçon de choses pour nous lecteurs de Marsactu, sur l’évolution du rapport de force entre politiques et entre partis, avec in fine cette cassure entre les desseins du « Vieux » et ce qui s’est réellement déroulé lors de ces désignations, à partir du coin enfoncé par « Maryse ». Une involontaire connivence ? Davantage de voix à Ravier qu’il n’a d’électeurs et un PS damné, de ses vieux, comme de ses plus si jeunes dont nous découvrons une fois de plus qu’ils ne sauraient assurer une relève qu’à l’identique de ce qui les a perdus.
Il s’agissait d’un évènement nouveau où vous vous êtes montrés à la hauteur de bout en bout, des articles qui l’ont précédé à celui-ci. Vous vous êtes affirmés là comme l’équipe d’un grand journal, avec l’autonomie de jugement qui va avec.
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Merci JL 🙂
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Le mieux, cest la photo de JC entouré de ses apôtres. Remarque : Gomet titre “la triple victoire de Jean-Claude Gaudin” et loue son habileté, son expérience…. Hum hum…
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Je trouve lamentable qu’aucun elu PS n’aie ete elu vice president alors que les guerinistes en ont un (Garcia), les communistes aussi (Rosso) et que les anti metropoles sont nombreux. A l’inverse, 3 vice presidents marseillais sur 20, c’est peu. Trop peu.
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Regardneutre (9h53), pas tant que ça, je suis catastrophé par la politique locale. Derrière un prdt de l’union des maires, il y a un homme : Cristiani, qui , à ce que je sache, a combattu comme un chiffonnier la métropole. Alors, trés difficile d’entendre que seule a fonction importe.
Par ailleurs, je ne défends aucunement les élus marseillais PS, et j’aimerais surtout de nouvelles têtes.
Mais quand certains d’entre eux prennent des positions claires, en particulier sur la gouvernance métropole, j’applaudis.
Les clivages à l’intérieur du PS sont consternants, et je dis que Ciot, fonction : secrétaire fédéral, est fortement responsable de la situation de blocage permanent.
Et je suis bien d’accord, je ne vois pas grand monde pour lui succèder.
Voilà un paradoxe et un blocage qui fait que je me suis éloigné de ce parti depuis longtemps.
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