Pour contrer la fusion des offices HLM, Maryse Joissains saisit le préfet, Castex et Macron

Info Marsactu
le 10 Mar 2021
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Dans un courrier courroucé aux services de l'État, la maire d'Aix conteste le rapprochement entre le bailleur social du pays d'Aix et son homologue métropolitain, Habitat Marseille Provence. Elle y mêle au passage les inimitiés laissées par la dernière campagne municipale.

Maryse Joissains dans son bureau le 19 juin 2019 (Photo Emilio Guzman)
Maryse Joissains dans son bureau le 19 juin 2019 (Photo Emilio Guzman)

Maryse Joissains dans son bureau le 19 juin 2019 (Photo Emilio Guzman)

L'enjeu

Maryse Joissains s'oppose de longue date à la remontée vers la métropole de l'office HLM du pays d'Aix. Elle ne veut pas le voir fusionner avec habitat Marseille Provence.

Le contexte

La loi Elan impose aux offices HLM qui comptent plus de 12 000 logements et qui cohabitent sur la même métropole à se regrouper ou fusionner. Ils avaient jusqu'au 31 décembre pour le faire.

Maryse Joissains n’est pas contente. Du tout. Alors, le 12 février dernier la maire LR d’Aix-en-Provence prend la plume pour écrire au préfet Christophe Mirmand. Avec copie, entre autres, au Président de la République et au Premier ministre, s’il vous plaît.

Avec cette lettre, la première magistrate aixoise entend se plaindre de la fusion prochaine entre l’office HLM Pays d’Aix habitat (PAH) avec son homologue Habitat Marseille Provence (HMP). Comme le veut la loi Elan, ayant trait à l’évolution du logement, tout bailleur gérant moins de 12 000 logements – c’est le cas de Pays d’Aix Habitat qui possède un parc de 5700 logements – doit fusionner avec un autre opérateur de la même intercommunalité. Le conseil d’administration de l’office public aixois a donc choisi de se rapprocher d’HMP.

“La réputation” marseillaise

Et là, patatras ! On connaît l’amour extrêmement relatif de Maryse Joissains pour la chose métropolitaine en général et pour tout rapprochement avec Marseille en particulier. Or, celle-ci a l’air de découvrir le mariage par inadvertance et ne veut pas de ce rapprochement. “J’avais demandé au président du conseil d’administration, élu sur ma liste depuis 2001, et au directeur de ne pas choisir HMP, à cause de sa réputation”, se fâche l’édile. Elle aurait préféré, dit-elle, voir l’office HLM local se regrouper avec Famille & Provence ou bien 13 Habitat. Mais, regrette-t-elle, elle n’a pas “été entendue”. Et pour cause, un regroupement avec l’un de ces deux bailleurs n’est évidemment pas envisageable puisqu’ils ne sont pas métropolitains.

L’expérience de la rue d’Aubagne, mais aussi du parc social de la Ville de Marseille nous obligent à être vigilants.

La maire d’Aix

Qu’importe, toujours prompte à glisser un méchant tacle à son meilleur ennemi, l’ex maire de Marseille, Jean-Claude Gaudin (LR), la maire d’Aix pique : “L’expérience de la rue d’Aubagne, mais aussi du parc social de la Ville de Marseille nous obligent à être vigilants.” Arguant de sa bonne gestion à la tête de la Ville et de celle de Pays d’Aix habitat, elle assure que le bilan financier de l’office HLM marseillais est moins reluisant et réclame ni plus ni moins au préfet “de mandater la chambre régionale des comptes et peut-être même la Cour des comptes, car avec à peu près 20 000 logements que devrait gérer ce nouvel office, cela mérite un contrôle régional, voire national…” Pour faire bonne mesure le courrier est aussi envoyé aux présidents de la chambre et de la Cour. Un fin connaisseur de la vie politique aixoise ironise : “Il n’y a qu’au Pape François, qu’elle ne l’a pas envoyée, cette lettre. Mais franchement, qu’est-ce que Macron et Castex vont en avoir à faire de ces histoires ?”

L’ombre du rival Jean-Marc Perrin

Car la missive de la maire d’Aix prend aussi la forme, inattendue, d’un règlement de compte politique. Sans les nommer, Maryse Joissains charge l’ancien président de l’office HLM d’Aix – son ex-adjoint Maurice Chazeau à qui elle n’avait pas “l’intention de renouveler son mandat”, écrit-elle – et l’actuel directeur général de Pays d’Aix Habitat, Patrick Thivet qu’elle accuse d’avoir “soutenu aux élections municipales, une liste dissidente menée par un de [s]es adjoints.” En effet, l’épouse du directeur général figurait sur la liste de Jean-Marc Perrin. Il n’en faut pas plus à la maire d’Aix pour faire des deux hommes les artisans d’un rapprochement dans lequel “l’importance de la municipalité d’Aix” sera immanquablement foulée aux pieds…

Si ce courrier est amusant, il n’est pas très structurant…

Une source dans les services de l’État

Ce curieux mélange des genres a fait lever quelques sourcils d’étonnement du côté de la préfecture des Bouches-du-Rhône. Une réponse est partie la semaine passée. Sèche, dit-on. “D’abord on s’interroge sur le sens de ce mouvement d’humeur. Car si ce courrier est amusant, il n’est pas très structurant… Ensuite, la réponse de l’État rappelle aussi à Maryse Joissains qu’elle n’a pas le pouvoir de décider à la place du conseil d’administration de Pays d’Aix habitat”, est-il expliqué à Marsactu.

“Nous sommes susceptibles d’effectuer les fusions à leur place”

Les services de l’État en ont profité pour signaler à la maire d’Aix que l’office HLM aixois était en retard dans sa mise en conformité : “Peu importe quel bailleur est choisi pour finaliser cette fusion. La loi Elan demandait des rapprochements avant le 31 décembre dernier. Depuis lors, nous sommes susceptibles de les mettre en demeure et d’effectuer les fusions à leur place.”  

Jean-Louis Vincent, nouvel adjoint en charge de l’urbanisme à la mairie d’Aix et nouveau président de Pays d’Aix Habitat jongle avec la patate chaude. Ce courrier de la maire ? Il n’a pas “à le commenter”, évacue-t-il. Mais il assure que “les discussions entre PAH et HMP se passent convenablement : on avance pas à pas, il y a la loi et on s’y conforme”. Les deux offices viennent de jeter les bases d’une société coopérative de coordination (SAC) baptisée “Métropole du logement Aix-Marseille-Provence”, préfiguration de leur future union.

De son côté Patrick Pappalardo, le président d’Habitat Marseille Provence assure “apprécier Maryse Joissains”, même lorsqu’elle est “un peu excessive”. Cette précaution oratoire prise, il écarte tout changement de scénario. “HMP et PAH se fiancent et vont se marier dans deux ans. La SAC qui sera immatriculée à la fin du mois d’avril nous permettra de comparer nos points forts et nos faiblesses afin de trouver un fonctionnement optimal”, affirme celui qui garantit que les deux offices publics “se sont échangés leurs éléments financiers et sont tous deux en très bonne santé.”

Restera l’épineuse question de la présidence de cette future entité. C’est la rumeur d’une présidence et d’une direction générale 100% marseillaises qui a fait exploser Maryse Joissains, comme elle le souligne encore dans son épitre. Attendons donc que les dirigeants de ce nouveau bailleur marseillo-aixois soient nommés… Leurs noms pourraient susciter une nouvelle ire de “la dame d’Aix”, comme ne manquait jamais de l’appeler Jean-Claude Gaudin. Nul doute qu’à Paris, Emmanuel Macron et Jean Castex trépignent d’impatience dans l’attente d’un prochain pli.

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Commentaires

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  1. Alceste. Alceste.

    Ah, Maryse is back et cela ne s’améliore pas . Elle sent une présidence lui échapper, un neveu,une nièce ou un jardinier à placer. Une info , Maryse,l’ EPADH de. St Zacharie vient de libérer une place, faudrait se bouger

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  2. TINO TINO

    Comment Aix, si “classe”, si “raffinée”, si “propre”,peut-elle avoir pour maire un personnage aussi vulgaire?

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  3. zozzal zozzal

    Il me semble que c’était Marseille Habitat le propriétaire d’un des immeubles de la rue d’Aubagne et pas Habitat Marseille Provence.

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    • Lisa Castelly Lisa Castelly

      Bien vu, nous corrigeons !

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  4. Jacques89 Jacques89

    A bèn parla ! Mai de qu’a di ? Heureusement que Marsactu nous donne quelques indices pour comprendre ce qui se trame dans ce fouillis de relations improbables où les requins se disputent la pitance sur l’autel des enterrés vivants. « Belle » image d’une décentralisation contre nature qui ne manque pas une occasion pour engager le divorce. Décidément, Macron aura tout réussi.

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    • Alceste. Alceste.

      Jacques 89 , Macron y adhère peut être ou sûrement , quoique ?, mais ce n’est pas lui qui la mise en place . Dans tous les cas il n’est nullement responsable des “cas sociaux” relevant de la COTOREP qui nous dirigent. Lyon fonctionne, Lille fonctionne et pas Marseille. Cherchez l’erreur , mais dans le cas d’espèce ce n’est pas Macron.

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    • Félix WEYGAND Félix WEYGAND

      je continue la liste de Braillasse avec des villes plus modestes et plus proches qui sont aujourd’hui des pôles d’attractivité beaucoup plus attrayant qu’Aix-Marseille grâce une politique métropolitaine mise en oeuvre dès la décentralisation de 1982 (pour Montpellier seulement dans ma liste) et qui accélèrent depuis les dernières réformes : Toulon, Nice, Montpellier.
      Et n’oublions pas Bordeaux, Grenoble, Toulouse, Rennes, Nantes, Strasbourg, etc. Bref, nous sommes derniers de certains classements après Nancy… même le soleil ne nous épargne pas la lanterne rouge…

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    • Jacques89 Jacques89

      Vues un peu courtes. Certes, certaines agglos fonctionnent mieux mais c’est quand même l’Etat qui a engagé un processus de refonte de l’organisation du logement social dans le département sans, apparemment, avoir réussi à réunir tous les partenaires. La pure tradition macronienne. On a commencé avec la baisse des APL https://www.banquedesterritoires.fr/logement-avec-le-temps-vient-lapaisement …mais ça n’a pas duré longtemps.

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  5. Manipulite Manipulite

    Condamnée à 8 mois de prison avec sursis et 3 ans d’inéligibilité en décembre dernier pour détournements de fonds publics et prise illégale d’intérêts. Joissains attend le jugement de la cour de cassation avec fébrilité et reste vulgaire. Les dernières cartouches avant de devoir laisser sa place ? Pays d’Aix Habitat a un passé gestionnaire chaotique sous l’autorité et l’influence de la maire d’Aix et ses sbires depuis au moins 20 ans.
    La Métropole est une solution. La structure intermédiaire de préfiguration est un outil inutile et fera perdre du temps. Trop comme toujours dans cette région encalminée par ses politiciens et ses structures.

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  6. Richard Mouren Richard Mouren

    A garder précieusement pour une éventuelle anthologie des lettres officielles les plus farfelues. Chapeau, l’artiste! Envoyer une lettre au Président de la République en pur Joissains parlé, c’est culotté! (Si elle n’a pas été adressée à Bruxelles, c’est peut-être par difficulté extrême de traduire ce langage en français.)

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  7. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    Je suis de plus en plus partisan de la mise à la retraite d’office des élu•e•s à l’âge de 70 ans. Au-delà, soit ils roupillent (Gaudin), soit ils racontent n’importe quoi (Joissains).

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  8. Haçaira Haçaira

    La SAC ? Pas très heureux comme nom

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    • PromeneurIndigné PromeneurIndigné

      Pourquoi pas le SAC ? Le SAC de nœuds comme fut le SAC pasqualien !

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  9. petitvelo petitvelo

    Encore un mandat de trop

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  10. PromeneurIndigné PromeneurIndigné

    La décentralisation c’est la multiplication pratiquement par quatre du nombre des agents territoriaux en même pas 40 ans. Quant au nombre des élus ?Cela grâce la dotation globale de fonctionnement financée par le budget de l’État. Pendant ce temps-là hôpitaux public, enseignement public, justice, police nationale ont vu leurs effectifs « contraints ». Quant à la réalisation de grands projets, comme à l’époque des 30 glorieuses dans le cadre de plans quinquennaux, tels que les villes nouvelles, les plans piscines, la construction de collège pratiquement à la chaîne, d’établissements universitaires, le TGV, le port de Fos-sur-Mer, l’aménagement du bas Languedoc, de la Durance, du canal du Verdon du Rhône, etc. on les cherche en vain, dans les « contrats » État région, dont l’objectif est de faire surtout plaisir aux grands électeurs. C’est ainsi que Le chemin de fer qui relie Marseille à Aix-en-Provence est toujours à voie unique sur une grande partie de son parcours, comme à l’époque de sa création il y a bientôt I siècle et demi. Quant à Marseille elle non seulement perdue ses industries, Mais elle a aussi fragilisé son économie en donnant la priorité au tourisme de masse et aux activités connexes : restauration et boutiques. La crise sanitaire actuelle nous prouve que mettre tous ses œufs dans le même panier est un mauvais choix, cela d’autant que les crises financières, le terrorisme etc. peuvent également compromettre les activités touristiques.

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