Place Labadié, le jardin partagé et ses composteurs ne sont plus les bienvenus
Installée depuis 2016 sur la place Labadie, l'association du Jardin de la Rotonde permettait à ce square d'habitude fermé de s'ouvrir deux fois par semaine pour des activités de jardinage. Mais sa convention annuelle n'a pas été renouvelée. Selon la mairie, des plaintes de riverains ont justifié la décision. Pour les jardiniers, c'est un projet de composteur qui ne passe pas.
Place Labadié, le jardin partagé et ses composteurs ne sont plus les bienvenus
Au cœur du quartier du Chapitre (1er arrondissement), la petite place ronde et le jardin en son centre pourraient avoir un certain charme. Mais le quotidien de la place Labadié – décor du film césarisé Shéhérazade où il est beaucoup question de prostitution et de drogue – n’est pas franchement tranquille. Le square reste donc fermé la plupart du temps, avec quelques autorisations d’ouverture ponctuelles octroyées par la mairie de secteur. Et notamment à l’association du Jardin de la Rotonde, qui y a organisé ses premières animations autour du jardinage en 2015 et détient une convention d’occupation depuis 2016. Deux demies journées par semaine, petits et grand peuvent venir y entretenir huit bacs de plantations diverses (Lire notre article). Une avancée significative pour un endroit dont les portes étaient la plupart du temps solidement cadenassés. Mais le 6 mars dernier, la convention annuelle a pris fin sans être renouvelée.
“On se trouve dans une situation bizarre, injuste et pas sérieuse”, déplore Alexandre Bartoli, membre du bureau de l’association. “Depuis 2016, tout s’est passé super bien, il y a eu beaucoup d’usagers, et là on nous dit : “on arrête tout””, complète un autre membre du bureau, Vincent Jacomond. L’association du Jardin de la Rotonde, qui revendique sur son site 25 adhérents et une soixantaine d’usagers, s’est donc vue demander de rendre les clés, sans bien comprendre pourquoi la mairie de secteur n’était plus satisfaite de son action.
Le compost de la discorde
Leur principal soupçon se porte sur la demande portée l’année dernière auprès de la mairie et de la métropole pour qu’un composteur collectif soit installé sur la place. “Nos bacs de plantations fonctionnent déjà sur le principe du compost, mais quand ils sont pleins, on n’a plus de place pour accueillir les déchets compostables. Donc on a fait cette demande”, explique Vincent Jacomond. Le composteur aurait été accessible aux horaires habituels de présence de l’association dans le square. Dans la convention signée pour l’année 2018 entre l’association et la mairie de secteur, l’installation du composteur collectif était actée. Selon l’association vingt familles du quartier étaient partantes pour participer, et la métropole s’apprêtait à fournir le matériel nécessaire après plusieurs mois d’attente. Mais pour le groupe de jardiniers, ce projet pourrait avoir braqué certains riverains, et en premier lieu, le comité d’intérêt de quartier.
“Pour le CIQ, depuis le début, cette place doit rester fermée. On s’est rendu à une de leur réunions en décembre dernier pour présenter le projet de compost, et on s’est fait découper en morceaux. Pour eux, nos bacs sont moches et ils attirent les rats, poursuit-il. On a toujours eu de bonnes relations avec la mairie et la métropole, jusqu’à ce qu’ils demandent l’avis du CIQ” Sollicitée, la présidente du CIQ n’a pas souhaité répondre aux questions de Marsactu. Interrogée en 2016 par Marsactu, sa position quant à l’ouverture du square était toutefois proche de celle dépeinte par l’association : “Fermer est la seule solution pour protéger un espace vert à Marseille (…) Il est évident que nous surveillons, pour faire en sorte que le jardin ne parte pas à la dérive”.
Un espace “pas valorisé comme il devrait l’être”
La maire des 1er et 7e arrondissement LR Sabine Bernasconi confirme que la convention est suspendue suite à “beaucoup de plaintes de riverains nous disant que l’espace était mal entretenu”. “Quand je dis mal entretenu cela veut dire que l’espace n’est pas valorisé comme il devrait l’être. D’autres associations seront donc conventionnées”, précise l’élue. Les réticences du CIQ ne lui sont pas non plus inconnues. “Ils auraient souhaité que cela soit mieux entretenu. Quand l’association a eu la convention, cela a fait naître des espoirs autour de l’idée d’un jardin partagé. Aujourd’hui, le CIQ et l’association n’ont pas le même regard sur ce que veut dire entretien et fleurissement.”
La maire indique pourtant que des échanges avec l’association sont encore possibles et que le projet de compost n’est pas forcément remis en question. “L’idée plaît au CIQ mais ils peuvent aussi avoir peur de l’entretien que réalisera l’association alors qu’elle a déjà mal fait ce qu’elle avait à faire. Mais les discussions continuent. Si un projet commun est possible, pourquoi pas”. D’autant qu’un arrêt définitif du projet, alors que la métropole lance une campagne autour de l’utilisation du compost faisant d’avril “le mois du compost” ferait tache.
Une pétition avec 200 signatures
De son côté, l’association du Jardin de la Rotonde ne reçoit pas de réponse à ses demandes d’entretien en mairie depuis plusieurs jours. Elle a aussi lancé une pétition ayant recueilli plus de 200 signatures en ligne “et autant en papier”, assure Alexandre Bartoli qui pointe le “lien social” créé dans le quartier par les activités de l’association, ainsi que la “paix sociale” induite : “quand on ouvre, il n’y a plus de problèmes autour de la place”.
“La mairie pourrait formuler des attentes, nous demander des améliorations, mais là, on ne nous dit rien”, regrette Vincent Jacomond. “Les reproches que l’on nous fait sont surtout sur l’esthétique, déplore à son tour Myriam Guettard, auteure de la pétition et membre de l’association. C’est vrai que ce n’est pas notre plus gros souci mais on avait prévu de peindre les bacs et de mettre davantage de fleurs”. Quant à l’attrait que pourrait susciter les bacs pour les rats, les jardiniers ont déjà pour habitude d’y insérer des cheveux, récupérés chez des coiffeurs du quartier, réputés les faire fuir. De même, le futur composteur fourni par la métropole prévoyait une grille pour empêcher les intrusions de rongeurs.
Pour l’association, le revirement des collectivités est donc dur à comprendre. “Alors qu’on inaugure des composteurs dans le 7e arrondissement, ici ça coince”, déplore Alexandre Bartoli. Dans un communiqué en date d’octobre dernier pour inaugurer un équipement square Bertie-Albrecht, la mairie de secteur se vantait justement d’avoir “déjà participé à l’implantation des composteurs des allées Léon-Gambetta (1er), de la place Labadie (1er) et du jardin du Théâtre Silvain (7e)”. Sauf qu’en dehors des bacs de plantation actuels, qui comportent une petite partie de déchets compostés, place Labadie, il n’y a toujours pas l’ombre d’un composteur.
Commentaires
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C’est la place Labadié, pas Labadie; Alexandre Labadié.
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Bien vu, c’est corrigé ! On rencontre souvent la faute, et après hésitation nous avions opté pour la mauvaise … merci !
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Visiblement pas corrigé dans le corps de texte.
Moyen mnémotechnique : musée Grobet-Labadié (ça rime).
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Bonjour
L’entretien des espaces vert est à la charge des associations, je finis par me demander à quoi servent mes impôts dans cette ville de Marseille.
Le compost reste une question essentielle à intégrer à la gestion des déchets, mais je pense que pour la mairie, c’est “gadget”.
Merci pour votre article.
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ça fait rager toute cette matière organique que la nature a mis longtemps à fabriquer et qu’à Marseille, on est obligés de jeter à la poubelle…
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En revanche les matières organiques rejetées par nos amis canidés dans le quartier des Réformés (comme ailleurs) ne gênent pas la mairie.
Ce qui nous sert de maire avait pondu en son temps un décret municipal suite à l’un de ses nombreux cacas nerveux prévoyant de sanctionner les propriétaires des “dèjecteurs” canins , mais bien sûr non appliqué.
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Les CIQ! Defferre, Gaudin, mêmes pratiques = on contrôle toutes les émergences d’idées et de personnes n’entrant pas dans les moules pré-découpés qui déservent les mairies de secteurs et in-fine la mairie centrale.
Un ami a voulu monter une association de quartier pour créer du lien il y a dix ans, le CIQ l’a pourri car non marseillais, un adjoint est devenu son ami en le caressant dans le sens du poil pour mieux savoir, le maire de secteur l’a invité au resto. pensant qu’il en voulait à son poste…. ubuesque…
Chercher pas, vous avez vos ennemis parce que ce que vous faites leur fait de l’ombre, point barre!
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L’article me semble un peu à sens unique, et il est dommage que la présidente du CIQ n’ait pas répondu. L’association avait effectivement monté un beau projet mais dans la réalité, sa gestion des bacs s’est révélée bien moins rigoureuse que promis et le “jardin” en question a vite pris l’aspect d’une décharge … En l’occurrence, le CIQ s’est fait le porte-parole des riverains qui se désolaient de la dégradation de leur environnement … Pas de quoi hurler aux pratiques mafieuses ni aux abus de pouvoir …
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en tout cas sur la photo le jardin n’a rien d’une décharge?
Curieux de comparer des images avant 2016 et de 2019.
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@pm2l
Une phase de concertation / dialogue entre asso et CIQ, un dénombrement réel des riverains que représente le CIQ, une position du CIQ assumée jusque dans la presse, … tout cela fait défaut. Je trouve qu’il y a matière à indignation sur le procédé d’une interdiction brutale. C’est du temps perdu pour tout le monde : en négociant il y a un an, il y aurait pu y avoir compromis et pas besoin de retrouver une autre asso, à mettre à l’épreuve … Quand aux rats, soyons sérieux, toutes les rues de Marseille sont infestées de l’Estaque à Montredon en passant par le vieux port. Fermer n’y changera rien.
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Merci pour cet article qui résume bien la triste situation… ce manque de dialogue entre les citoyens et les élus est déplorable. En effet, ce serait bien le rôle des agents de la Ville de collaborer avec ceux qui essayent de porter des initiatives qui je pense vont plutôt dans le bon sens.
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On pourrait même prélever un des nombreux gardien de parc qui s’ennuient toute la journée dans leur bureau pour l’envoyer accompagner et vérifier ces petits projets d’espace vert. On pourrait faire intervenir des médiateurs/initiateurs en écologie, par exemple des volontaire du service civique …
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Les riverains semblent moins dérangés par leurs bagnoles garées sur le trottoir et les merdes de leurs chiens qui y pullulent.
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Je dis non à la victimisation ….
Et oui au compost. J’y vais plus régulièrement depuis que nous pouvons profiter du jardin Levât. “Nous” habitants du troisième …ou pas. La Rotonde était appelée à rester comme elle était avant que ces illuminés de jardiniers tentent un compost collectif. Vivent les dames qui fleurissent sur les trottoirs et aux chiottes ces gens nantis du tour de la place. Le mélange n’est pas pour demain, bien dommage !!!
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