Périmètre, mobilier urbain, végétalisation : l’avenir piéton de la place Labadié en question

Reportage
le 24 Nov 2023
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Ce jeudi, la mairie de secteur soumettait à la concertation plusieurs scénarios de piétonisation de la place Labadié, au Chapitre, théâtre d'une prostitution et de trafics endémiques. La question de la place de la voiture et du rôle de la métropole occupaient une bonne part des débats.

Périmètre, mobilier urbain, végétalisation : l’avenir piéton de la place Labadié en question
Périmètre, mobilier urbain, végétalisation : l’avenir piéton de la place Labadié en question

Périmètre, mobilier urbain, végétalisation : l’avenir piéton de la place Labadié en question

Piétonisation et lutte contre la prostitution de rue en période de cohabitation glaciaire avec la métropole, vous avez deux heures. Ce jeudi, la mairie de secteur des 1/7 dirigée par Sophie Camard au nom du Printemps marseillais se lançaient dans l’exercice délicat de la démocratie participative autour du quartier bien circonscrit de la place Labadié. Depuis plusieurs mois, la place circulaire et les rues adjacentes sont le théâtre de grandes tensions, souvent liées à la prostitution de rue dont l’endroit est coutumier. Ces tensions sont l’objet de larges remontées, tant citoyennes que médiatiques.

En réponse à ces tensions, outre la saisine des autorités policières et judiciaires, la maire de secteur sort de ses cartons une revendication ancienne du comité d’intérêt de quartier et des autres associations de riverains : piétoniser la place Labadié et les rues adjacentes, dans un périmètre plus ou moins large. La proposition et ses différentes options faisaient donc l’objet d’une réunion de concertation dans une salle étroite du centre municipal d’animation, rue Sénac, avant un vote, au même endroit, la semaine prochaine. L’exercice est familier à l’édile comme aux habitants puisqu’une partie d’entre eux avait participé à une consultation du même type, sur le devenir du square longtemps fermé de la place Labadié.

La maire de secteur Sophie Camard à la réunion de concertation.

Tensions sécuritaires et espace piétonnisé

Cette fois-ci, le thème est plus délicat, notamment en raison du contexte sécuritaire mais aussi du sujet toujours clivant de la voiture et de sa place dans l’espace public. Dans une courte introduction, Sophie Camard revient sur l’intranquillité publique manifeste, avant de céder la parole à ses adjoints, Monique Rolbert, pour le point sécuritaire, et Étienne Tabbagh, en maître de cérémonie, en sa qualité d’adjoint aux mobilités et au quartier du Chapitre.

Le point sécuritaire est rapidement évacué  : l’information essentielle étant la fermeture administrative annoncée d’une alimentation présentée par tous les riverains comme un rouage des dérives du quartier. Très vite, le débat est lancé sur la piétonisation, ses diverses modalités, assorties de voies végétalisées, de rues dédiées à l’autopartage, voire de zone de trafic limitée, ou seuls les résidents pourraient circuler.

La question métropolitaine

Et très vite, deux données s’imposent aux débats : “Nous n’avons pas la compétence de l’aménagement des voies, prévient l’adjoint de secteur et conseiller métropolitain. Si on décide avec vous d’un aménagement, on peut ensemble porter ce projet et en faire la demande de manière insistante auprès de la métropole“. Le jeune élu lève les mains en l’air avant de tacler : “Je ne peux vous garantir la réalisation de ces aménagements par la métropole“. Un brouhaha s’installe. Il reviendra périodiquement, au même rythme que le refrain de ce partage de compétences.

La deuxième inconnue intervient sous la forme d’une question d’une habitante venue d’un quartier voisin : “Comment pouvez-vous déterminer que la piétonisation aura un effet sur la sécurité dans le quartier ?  Avez-des retours d’expérience à ce sujet ?”. Là encore, la question reviendra, lancinante, sous plusieurs formes, avant qu’Etienne Tabbagh reconnaisse l’absence de certitudes sur ce point.

Le drive de la prostitution

Ce qui est clair, raconte un habitant de la place, c’est que nous voyons tous les jours les clients faire des tours et des tours de la place. Cela génère du bruit, de la pollution et de l’insécurité au point que nous ne laissons plus nos filles aller seules au square“. Une dame abonde en son sens : “J’ai un certain âge et je me fais aborder même en habit d’ouvrière avec mon pot de peinture, raconte Marie-Laure, avec rage. Et ma fille vit de cela depuis ses dix ans. En 2030, ils vont doubler la capacité de la gare et il y aura de plus en plus d’hommes, qui ne font pas la différence et qui voient en nous des proies, de huit ans à je ne sais pas quel âge“.

Dans la salle remplie, beaucoup maugréent : une zone piétonne a des limites et certains craignent de voir les problèmes glisser, d’une place à leur rue, voire au quartier voisin du Crédit municipal, au-dessus des allées Léon-Gambetta. “Ça, je ne peux pas vous dire, ce qu’il adviendra des prostituées et de leurs clients, reconnaît Etienne Tabbagh. D’ailleurs, nous comptons lancer une concertation sur le bas du Chapître, dès 2024, pour éviter ce type de glissement“.

Question de déplacements

Moi, je pense que cela va déplacer le problème, assène Patrick Coulomb, qui habite la rue des Héros, l’une des limites proposées pour le périmètre le plus étroit. Et puis aujourd’hui, je paie pour me garer dans la rue. Qu’est-ce qui va se passer quand vous aurez piétonisé ?  C’est une très mauvaise idée“.

La question des déplacements, de l’insécurité des parkings souterrains revient régulièrement. Dans ce quartier plutôt favorisé, on débat avec des arguments de bon aloi des avantages comparés de l’autopartage, en fonction de la fréquence, de la distance… “Mais moi, comment je vais faire pour aller à ma campagne ?, s’émeut Eliane. J’irai à pied ?“. La dame qui vit dans le quartier depuis 60 ans, trouve que décidément les choses ne vont pas assez vite, ou cèdent trop facilement “à la mode“.

“Vous êtes un peu mou”

“Vous aviez promis la fin du stationnement à cheval sur les trottoirs autour du square et rien n’est fait, constate-t-elle en jouant du micro comme d’un hochet. Vous dites que c’est la métropole, mais vous êtes un peu mous. Allons, vous manquez de poigne”. Étienne Tabbagh s’étouffe : “Vous savez, on a pris l’arrêté d’interdiction il y a un an et ils n’ont rien fait.  J’y retourne la semaine prochaine, j’insisterai à nouveau“.

Mais Eliane, je sais que tu as des contacts auprès de la métropole, tu peux passer par eux, suggère une jeune voisine, faussement naïve. Plus sérieusement, comment on peut vous aider à mettre la pression sur la métropole qui laisse nos quartiers à l’abandon ?Donnez-nous leur adresse mail qu’on les spamme“.

Etienne Tabbagh joue sur du velours : “Depuis la disparition du conseil de territoire, il n’y a plus d’élu à la voirie. Il faut voir directement avec le cabinet de Martine Vassal. On peut aussi organiser une manifestation lors d’un conseil métropolitain pour porter vos revendications“. Dans l’éventail des possibles que l’élu de secteur déploie, il y a la possibilité d’un “urbanisme tactique” qui ne passe par l’échelon intercommunal mais par quelques arrêtés et la pose de “mobiliers urbains, barrières ou pots de fleurs qui bloquent la circulation sur un périmètre restreint, le temps de voir“.

L’idée plaît, elle a l’avantage de la souplesse, elle figurera parmi les différentes questions soumises au vote, avec la taille du périmètre, la végétalisation ou les différents modes de circulation. “S’il y a 150 votants, ça sera déjà une victoire…“, souffle l’élu. Rendez-vous dans une semaine au même endroit pour la suite de l’exercice et dans quelques mois, pour passer au cas pratique.

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Commentaires

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  1. Patafanari Patafanari

    Qu’on rase tout. Une esplanade en béton eclairée « à giorno » 24 h sur 24 avec le « pouce » de César installé au milieu. Ça fera fuir les sacripants.

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  2. Leloup Leloup

    Nouvel abonné, je constate que le compte n’y est pas.
    Tant en termes de nombre d’articles (deux par jour en moyenne) que de localisation, seul Marseille étant “couvert”, le reste de la métropole oublié.
    Je ne vais certainement pas poursuivre mon abonnement dans ces conditions indigentes.

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    • vékiya vékiya

      au revoir

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  3. Patafanari Patafanari

    Difficile de trouver de nouveaux sujets chaque jour. Heureusement un personnel politique pittoresque, souvent incompétent, pas très malin dans l’ensemble, parfois filou mais toujours pourvu d’un culot à toute épreuve, fournit aux journalistes une matière première inépuisable dont l’analyse fera la joie du lecteur attentif.
    Par ailleurs, Il est faux de prétendre que seule la ville de Marseille est couverte.

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  4. Peuchere Peuchere

    A quoi servent nos élus municipaux et d’arrondissements? A rien !!!! Et on les payent cher pour qu’ils nous expliquent à longueur de journée qu’ils ne peuvent rien faire car c’est la compétence de la métropole !
    Ils sont pathétiques

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  5. Happy Happy

    Si on rapporte 2 articles quotidiens au prix mensuel de l’abonnement à marsactu, ça fait environ 1 centime pour un article approfondi et bien écrit. Alors oui, on ne sait pas tout ce qui se passe dans la métropole ni même dans Marseille, mais pour moi “j’en ai pour mon argent”, s’il faut raisonner comme ça. En comparaison de qualité, même la presse gratuite me paraît trop chère. Soutien et encouragements à la rédaction de marsactu.

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  6. Electeur du 4-5 Electeur du 4-5

    Idem

    Soutenons la presse libre (critique mais pas manichéenne et ne faisant de cadeau ni pour un bord ni pour l’autre) et avec un peu d’espoir elle reprendra racine au delà des grandes villes.

    La PQR est morte ou moribonde depuis 40 ou 50 ans d’accaparement par des empires qui la détournent de sa mission première : informer

    Marsactu n’est pas parfait mais beaucoup plus utile et sain que la “concurrence”

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  7. kukulkan kukulkan

    super exercice de démocratie participative ! à multiplier !

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