Michael O'Leary "loves France", mais la quitte
Michael O'Leary "loves France", mais la quitte
Arrivé avec son jet la veille au soir, Michael O'Leary avait choisi le Novotel de Vitrolles, perdu au fin fond d'une zone industrielle, pour recevoir la presse en jean et en basket. La compagnie low cost a regroupé trois ouvertures de lignes déjà annoncées (Chania en Grèce, Varsovie en Pologne et East Midlands au Royaume-Uni) et deux autres au Maroc (Rabat et Essaouira).
Michael O'Leary, c'est le (very) bad boy du transport aérien mondial. Cynique, arrogant, richissime. Son rêve : des avions sans pilote, sans hôtesse mais remplis de passagers. Qu'il est même prêt à faire voyager debout. Il s'appelle Michael O'Leary, il est le patron de Ryanair, qui est aujourd'hui la première compagnie européenne avec 79 millions de passagers transportés, pour plus de 3 milliards de chiffre d'affaires en 2011 et 500 millions de bénéfices. Sur la même période, Air France perdait 800 millions d'euros.
O'Leary, qui possède un peu moins de 5% de sa compagnie, en maîtrise parfaitement son modèle économique. Un : une flotte d'avion unifiée et négociée à la shlag, aujourd'hui des Boeings, peut-être demain des avions chinois, mais surtout pas des Airbus. Deux : des salariés basés en Irlande – et demain au Maroc, où le coût du travail est encore plus low cost. Trois : des aéroports "régionaux" où il peut profiter de coûts aéroportuaires largement "discountés". Quatre : une communication uniquement basée sur des tarifs, généralement imbattables, au moins pour les billets les moins chers, mis en avant dans ses publicités. Tout est vendu sur le web, les passagers impriment eux-mêmes leur carte d'embarquement et payent un supplément bagage. Et aussi s'ils veulent boire un coup dans l'avion.
Turbulences à Bruxelles
Et ça marche. Bingo. Seuls nuages dans le ciel, la commission européenne, qui n'est pourtant pas un repaire de dangereux gauchistes commence à se demander si tout ça est bien compatible avec les règles de la concurrence et a ouvert de nombreuses enquêtes, notamment sur les contrats passés entre les aéroports publics et Ryanair, qui offrent d'importantes réductions sur leurs taxes aéroportuaires, et qui pourraient être considérées comme des aides publiques déguisées. "Pas du tout" nous à répondu Michael O'Leary, pour qui il s'agit de simples contrats où sa compagnie bénéficie de réduction, en échange d'un trafic garanti. Mais qui a quand même embauché un ancien commissaire européen comme lobbyiste en chef. On n'est jamais trop prudent.
La chambre de commerce et d'industrie Marseille Provence est également dans le collimateur de Bruxelles, qui soupçonne là-aussi Ryanair de bénéficier d'aides publiques déguisées sous forme de contrats marketing. Des contrats d'achat d'espaces publicitaires payés par la CCIMP à la filiale marketing de la compagnie aérienne basée dans l'île de Man, discret paradis fiscal. Jacques Pfister, plutôt généralement prolixe, se fait bavard comme un banquier mannois sur le sujet : "L'enquête avance, mais nous sommes sereins", nous avait-il répondu lors d'un récent point presse.
Procès le 31 janvier
Autre souci pour Michael, la justice française qui, l'a mis l'an dernier sa compagnie en examen pour travail dissimulé. Coïncidence ? Le procès démarre le 31 janvier. Les juges pensent que les salariés qui travaillaient à Marseille, alors une base française de Ryanair, et qui étaient embauchés sous des contrats irlandais, siège de la compagnie, auraient dû en réalité avoir des contrats de travail français, et payer leurs charges sociales en France. La justice se base sur un décret , qui impose à une compagnie dont les avions sont basés en France, d'avoir des salariés sous contrat de travail français.
Pour O'Leary, ce décret est "stupide" et est en contradiction avec les lois européennes, qu'il dit respecter. Il avait à l'époque menacé de quitter Marseille, si la justice française le mettait en examen. Ce qu'il a en partie fait : la base est fermée l'hiver, rouvre l'été, mais cela fait moins de 6 mois donc ses employés ne sont pas considérés comme basés en France. Imparable.
Une délocalisation au Maroc
Pas fou il n'a donc pas totalement mis ses menaces à exécution. Car l'aéroport de Marignane n'est pas un petit aérodrome de Trifouillis-les-Oies, mais celui qui a réalisé l'an dernier la plus forte progression des aéroports français avec plus de 8 millions de passagers, dont 1,8 pour l'aérogare low-cost MP2 (+32%). La véritable annonce de ce mercredi, c'est pourtant une nouvelle étape dans la chasse aux coûts de la compagnie : Ryanair a décidé d'ouvrir sa première base non-européenne, où les salaires sont encore plus doux qu'en Irlande, ce qui va lui permettre d'opérer cette fois toute l'année son trafic marseillais (9 lignes) depuis l'autre côté de la Méditerranée. Une belle délocalisation. "We love France", nous a déclaré Michael O'Leary dans l'interview qu'il nous a accordée. Sauf ses lois, ses juges, et son droit du travail.
Commentaires
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Ryanair, c’est un peu l’horreur libérale mondialiste incarnée en une seule entreprise. Pour couronner le tout, elle profite largement de subventions publiques et pollue à mort.
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“Attrape-moi si tu peux” ^^
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Depuis QUAND le modèle éco qui a fait la réussite de RYANAIR est-il libéral ???
C’est sur du subventionné par le public à 99% qu’il s’est développé: nan mais sérieux, y’a des gogos pour croire qu’on peut payer un billet 10 euros ???
Le succès de RYANAIR repose sur les “carambouilles” entre la compagnie et les Chambres de Commerce et d’Industrie, gestionnaires des aéroports et collecteurs des taxes afférentes (“j’atteris sur ton aérodrome pourri, je t’amène X centaines de milliers de passagers qui payent des taxes et toi tu me les reversent. Et maintenant que c’est démarré, je me barre”).
Que d’argent brassé de manière bien occulte, que d’emplois clientélistes AUSSI dans ces institutions moyen-ageuses que sont les CCI.
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UN LIBÉRAL SUBVENTIONNÉ
Si vous voulez savoir comment marche ce “modèle” économique vous pouvez regarder le film suivant:
http://verite-lowcost.com/
Toute ressemblance avec un low cost maritime, lui aussi subventionné n’est pas tout à fait une coïncidence.
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