Mesures anti-pollution : des annonces fortes, des contrôles timides

Actualité
le 20 Juil 2022
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Le dépassement du seuil d'ozone dans l'air a amené le préfet à interdire la circulation des véhicules trop polluants en centre-ville  de Marseille et à abaisser les vitesses limite de 20 km/h sur les grands axes du département. Alors qu'une mesure similaire est prévue en permanence à partir de septembre, les moyens de vérification se limitent pour l'heure aux contrôles routiers "traditionnels" et les radars automatiques ne sont pas reprogrammés.

Une smart arbore une vignette Crit
Une smart arbore une vignette Crit'air sur son pare-brise, rue Fortia, le lundi 18 juillet 2022. (Photo SL)

Une smart arbore une vignette Crit'air sur son pare-brise, rue Fortia, le lundi 18 juillet 2022. (Photo SL)

Rue Fortia (1er), derrière le tribunal judiciaire, une Smart grise arbore un autocollant violet sur son pare-brise. C’est la seule sur la dizaine de voitures garée dans la rue à avoir sa vignette Crit’air, assurant que la voiture rejette peu de polluants. Pourtant, depuis lundi 18 juillet, tous les automobilistes doivent s’en doter s’ils veulent circuler et stationner dans le centre-ville de Marseille.

C’est le préfet des Bouches-du-Rhône qui a pris cette mesure prévue dans le plan d’alerte ozone, en raison d’une pollution persistante depuis une semaine. Concrètement, entre 8 h et 20 h, les deux-roues et les véhicules légers ont l’obligation de présenter une vignette Crit’air entre 0 et 3. Les véhicules ayant une vignette 4 et 5 sont considérés comme trop polluants et ne pourront plus être utilisés jusqu’à ce que l’arrêté préfectoral prenne fin. Pour les poids-lourds, l’exigence est même relevée aux vignettes 0 et 2.

Des contrôles routiers “traditionnels”

En juin 2019, la circulation différenciée avait été mise en place pendant une dizaine de jours, en raison d’un épisode de forte pollution à l’ozone. À l’époque, pour cette première, il n’y avait eu aucune mesure coercitive pour laisser le temps aux automobilistes de l’intégrer. Si lundi, la préfecture a indiqué vouloir mettre “l’accent sur la pédagogie“, dès ce mardi, les personnes sans vignette s’exposaient à une amende entre 68 et 135 euros. Les moyens de vérification des autorités semblent pourtant limités par rapport au vaste de périmètre de circulation différenciée, délimité à gros traits par l’avenue du Prado, le boulevard Sakakini, Plombières jusqu’à l’autoroute A55.

C’est la police nationale qui est chargée des vérifications. Sur les réseaux sociaux, la préfecture de police s’est félicitée du respect des automobilistes sur le port de la vignette, place Marceau (3e).

Mais derrière cette opération de contrôle médiatisée – BFM Marseille était également sur place – aucun effectif n’est dédié spécifiquement au respect de cette mesure. Les vérifications des policiers s’opèrent dans le cadre de leurs contrôles routiers “traditionnels“, explique la préfecture de police. Quant à la réalité du respect de l’affichage des vignettes sur les pares-brises, elle semble bien éloignée de cet exemple isolé.

Une autre mesure instaurée par l’arrêté préfectoral est l’abaissement de la vitesse de 20 kilomètres par heure sur toutes les routes du département, sans aller au-dessous de 70 km/h. Là encore, pas de grand changement de braquet pour aider à résorber le pic. Les radars automatiques ne sont pas recalibrés pour “quelques jours seulement“, nous indique la préfecture de police. Ce sont les policiers dotés de radars mobiles qui, eux, sont censés appliquer la réduction de 20 kilomètres par heure.

L’impossible bilan de l’impact sur la qualité de l’air

L’enjeu sanitaire et même juridique est pourtant réel. En 2019, la Cour de justice de l’Union Européenne a condamné la France pour son inaction face à la pollution de l’air, pointant un dépassement des seuils dans douze agglomérations dont Marseille. Les pics de pollutions sont jugés encore trop nombreux et trop longs. Selon Dominique Robin, directeur d’Atmosud, association agréée par la région pour mesurer la qualité de l’air, les vignettes 4 et 5 représentent 10 % du parc automobile marseillais. En se concentrant sur cette petite partie, leur retrait de la circulation ferait baisser de 20 % les oxydes d’azote près des grands axes routiers. “On n’est pas les premiers de la classe dans ce sujet. Les Italiens ont mis en place depuis très longtemps une circulation limitée dans des petites villes et ça marche, indique-t-il. Le modèle mesure d’urgence, c’est un pansement sur une jambe de bois, mais il faut le faire. Les contrôles vont crédibiliser et je suppose que la préfecture fait de son mieux.” 

En 2019, pour la première application de la mesure, l’impact s’est révélé difficile à évaluer, d’autres facteurs étant à l’origine d’émissions d’ozone comme les industries ou le trafic maritime. Pour autant, le nombre de commandes de vignette ainsi que le trafic routier pourraient être scrutés afin d’évaluer l’impact de la décision préfectorale. Du côté du contrôle, la préfecture de police n’était pas en mesure de communiquer immédiatement le nombre d’amendes distribuées ce mardi.

Si la circulation différenciée est temporaire ce mois-ci, elle donne toutefois un avant-goût de l’instauration d’une restriction permanente prévue dès septembre 2022. Le périmètre de cette future zone à faibles émissions (ZFE) sera quasi-identique. S’y imposera aussi le port de la vignette Crit’air. La métropole assure que la police nationale, la municipale et la gendarmerie seront mobilisées sur ces missions. Mais pour la préfecture de police, “il est encore trop tôt pour parler des moyens de contrôle de la ZFE“. La Ville de Marseille se refuse elle aussi à communiquer sur le sujet. Cette fois-ci l’évolution de la pollution sur les mois qui viennent devrait permettre d’évaluer plus précisément l’impact sur l’air respiré par les Marseillais.

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Commentaires

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  1. MarsKaa MarsKaa

    Par votre article on comprend qu’une fois de plus, des responsables de collectivités ont mis beaucoup d’argent dans des études et dans la communication , pour, dans les faits, ne pas aller au bout des décisions. Où est la volonté politique de protéger la santé des habitants ? Où est l’obligation de résultats ?

    Question annexe : la vignette crit’air est-elle valable plusieurs années ? Celle de 2019 est-elle toujours valable ?

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    • Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

      Malheureusement, nous sommes en présence d’un enjeu de santé publique où chacun doit prendre sa part, et cela ne peut fonctionner que si le civisme existe : il n’y aura jamais la possibilité de contrôler en temps réel des milliers de voitures en circulation dans une zone aussi étendue que celle de la très prochaine ZFE (sauf si l’on met en place à toutes les entrées de cette zone des caméras capables de repérer la vignette Crit’Air ou son absence sur un pare-brise). L’obligation de résultat repose donc en partie sur les comportements individuels.

      Mais quand, 5 ans après l’apparition de la vignette Crit’Air, les deux tiers des automobilistes marseillais n’ont pas pris 3 minutes pour la demander, il est permis de douter de l’espèce humaine, qui préfère manifestement scier la branche sur laquelle elle est assise.

      Pour répondre à votre deuxième question : la vignette CritAir dépend de la norme que respecte le moteur du véhicule (Euro 6, Euro 5, etc.). Elle est donc valable pour la durée de vie du véhicule.

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    • MarsKaa MarsKaa

      Merci pour votre réponse précise !

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  2. Oreo Oreo

    Et pour quand les contrôles du bruit excessif ? Particulièrement insupportable en ces temps de canicule alors qu’il convient d’ouvrir les fenêtres la nuit pour rafraichir les logements.

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  3. Assedix Assedix

    Petite question à ceux qui connaissent les compétences des collectivités territoriales :

    La ville aurait-elle le droit de mettre en place un péage urbain à ses limites ?
    Je rêve un peu, sans doute, mais il me semble que la mesure aurait à la fois une vertu écologique et politique dans le contexte de notre métropole où les vill(ag)es satellites vampirisent la ville-centre. Je suis même prêt à parier qu’elle accélérerait énormément de déploiement des transports en commun au sein de la métropole.

    C’est sans doute l’effet de la canicule, mais là tout de suite je me dis: pourquoi pas ?

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    • Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

      La possibilité d’instaurer à titre expérimental un péage urbain existait dans la loi, mais en pratique elle n’a jamais été utilisée. Les automobilistes sont aussi des électeurs, et les élus sont peu courageux. Conclusion : cette possibilité a été supprimée (https://www.actu-environnement.com/ae/news/gouvernement-fin-possibilite-instaurer-peages-urbains-38214.php4).

      C’est le syndrome de l’écotaxe poids-lourds : chaque fois qu’on imagine un dispositif pour faire prendre en charge les externalités négatives des véhicules routiers par ceux qui les créent, on s’empresse de ne pas l’appliquer.

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    • Assedix Assedix

      Merci pour l’info. 🙂

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    • BRASILIA8 BRASILIA8

      Autrefois avant la “start up” nation l’accès aux villes était contrôlé par l’octroi qui percevait un droit d’entrée
      au XXI siècle nous allons réinventer l’eau froide

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  4. Haçaira Haçaira

    Quand on connaît la mesure de l’auto-discipline du citoyen lambda (il suffit de voir la saleté des rues pour s’en convaincre) on n’est pas prêt de bien respirer

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  5. Patafanari Patafanari

    Je vais enlever ma vignette. Marre de me faire traiter de payot . (En plus c’est une Critair 4, double payot).

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  6. Alceste. Alceste.

    Cher 8e , les autos sous prétexte d’écologie sont sur taxées à l’achat (pourquoi pas) , les autos dont la technologie a évolué ( diesel propre, reduction de la consommation quand les constructeures ne trafiquent pas les systèmes de mesures, sans plomb, pot catalytiques)) sont de plus en plus chères, l’éléctrique poursuit cette tendance et avec l’hydrogéne cela sera encore “plus pire”.Je ne vous parle pas des taxes appliquées sur le carburant, des contrôles techniques, des prix des péages, des prix des parkings , des assurances, des obligations diverses et variées (pneus hiver) . Tout ceci pour dire que l’auto est au delà d’une pompe à fric, sans parler des impots qui parait t’il servent à entretenir le réseau routier ( surtout quand l’on voit la qualité du revétement et des trottoirs marseillais).
    Alors faire payer l’accés aux villes ?. Concernant Marseille , pour l’hyper centre ville pourquoi pas ? mais à condition d’avoir des transports en commun dignes de cette appelation, des parking relais et tout l’arsenal classique présenté par les écolos. Mais il y a un hic , nous sommes à Marseille . Et là tout est dit !.
    Alors faire payer l’accès au centre ville ? : Pour les touristes la taxe de séjour est là pour cela ( l’étendre aux croisièristes surement) , les marseillais, du moins ceux qui le paye , l’impôt local est fait pour cela. Alors tapons sur les automobilistes pour l’accés en ville c’est tellment plus facile, ce qui est déjà fait en partie par les tunnels urbains , qui en fait ne servent qu’a engraisser la société du tunnel prado carénage, c’est tellment plus simple. Et oui c’est Marseille.Mais vous devriez “taxer” aussi l’ensemble des entrants dans Marseille aussi, car si vous vous penchez sur les merdes de chiens , les canettes et les déchets, ce sont aussi des sources de pollution.
    ET puis faire payer des taxes n’a jamais fait réduire la pollution en quoi que ce soit, la preuve il existe un marché des pollueurs par l’achatt de droits à polluer.
    Mais de plus, votre débat est mort né : le centre ville marseillais est mort .Tué par les zones commerciales équipées de parking , chers, mais accessibles ou gratuits: Plan de Campagne, les Terrases, la Valentine, etc.. jouent ce rôle destructeur.
    Vous allez me dire et justement : que faisons nous alors ?
    Rendre piéton le centre ville , cela est déjà fait en partie , ce n’est pas ce qui à fait baisser la pollution de façon significative ces derniers jours.
    Je ne suis pas architecte , ni urbaniste , mais je suppose que mettre beaucoup plus de vert , d’aérer cette ville, d’avoir des transports en commun propres , d’arréter ces programmes dingues d’urbanisme devraient limiter ou réduire la casse.
    Alors oui la bagnole, il faur réduire son impact mais au même titre que les autres activités ou aménagements humains et utiliser des moyens énérgétiques autres ( la mer est là pour cela et il existe deja des utilisations pratiquées).
    Mais vous allez in fine vous confronter à un mur , celui du marseillais de base avec son m’en fouti génétique. Et là…………
    Ou alors , solution, se faire envahir par des Nordiques qui sont sur ce point environnemental beaucoup plus évolués .On peut réver.

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  7. Thierry Noygues Thierry Noygues

    Y’en a mare de mettre la pression toujours plus sur les pauvres, ceux qui n’ont pas les moyens l’acquérir un véhicule plus propre surtout a Marseille où les transports en commun (notamment propre a l’évidence) et leur maillage ont un siècle de retard. C’est bien sûr sans compter la pollution bien plus grande des bateaux a qui on laisse bien plus de temps à se mettre en conformité. Que dire de la métropole qui a défini le périmètre qui englobe des quartiers les plus pauvres d’Europe et qui dans le même temps privilégie le tram vers les Catalans plutôt que vers le bd National, là où sont ces populations les plus pauvres C’est scandaleux ! C’est tout simplement de la gentrification a grande échelle Si les responsables politiques continuent ainsi, le chaos n’est pas bien loin…et la crise des gilets jaunes va revenir en force… version urbaine cette fois. Plus question de rond point. Tout le monde sait où sont les riches … Où d’ailleurs le stationnement dans la rue est gratuit ( ben voyons !)

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