Max, semeur de graines urbaines
Max, semeur de graines urbaines
Carrure de boxeur, Max, 38 ans, a le mental du gars qui ne s'enquiquine pas de formalités pour concrétiser ce qu'il a en tête. Avec sa pelle et sa pioche, il a transformé un bout de terre en friche en un jardin d'Eden. Et ce qui était au départ une simple initiative personnelle est aujourd'hui le projet de tout un quartier.
Aux abords de la cité de Font-Vert (14ème), le long de la voie ferrée où passe à toute allure le TGV, poussent tomates noires, maïs blanc, piments d'espelette, citrouilles géantes… Ce jardin de "non-droit", on l'appelle "le jardin de Max", mais il est en réalité ouvert à tous les habitants du quartier. Il y a deux ans, l'espace était un tas de broussailles où gisaient encore les débris d'un bâtiment détruit dans les années 90. Avec l'aide de deux amis tous deux nommés Fathi – et donc pertinemment surnommés "José" et "Bové"- Max a aménagé 350 mètres carrés de terrasses potagères. "Tout ça, c'est de la récupération" sourit Max, en balayant d'un regard les rambardes en bois, les escaliers de briques et les grillages qui entourent le jardin pour éviter toute intrusion nocturne. Même la bonne terre, le fumier de cheval et les graines (bio) lui ont été offertes, grâce à un bouche à oreille efficace.
Lui est un jardinier du dimanche qui a appris sur le tas. "Quand tu travailles bien, il n'y a pas besoin de diplôme" déclare ce sportif, qui a enchaîné les jobs pour gagner son pain : de videur de boîtes à entraîneur de boxe, il est aujourd'hui chef de projet dans le BTP, ce qui explique en partie l'aboutissement de son jardin. Amateur de viande, il jardine avant tout pour se détendre, se vider la tête, évacuer le stress de ses journées de travail à rallonge. Avec son tee-shirt arborant la gueule ouverte d'un requin menaçant, Max est capable de beaucoup de poésie : "La plante, quand tu la touches, elle ressent ta présence et toi la sienne. Rien que de regarder les fleurs, ça repose, ça fait du bien. C'est un peu magique. Les anciens connaissaient bien l'alchimie entre l'humain et la terre." Les siens étaient italiens, sûrement paysans, et un petit drapeau flotte en leur mémoire près des plants de poivrons.
Petites pousses, grandes ambitions
Le jardin de Max est vite devenu un modèle à suivre dans le quartier. Pour les amis et habitants de Font-Vert qui ont participé à sa construction et profitent de ses récoltes, le jardin a suscité des désirs de retour à la terre insoupçonnés. Quand ils ont goûté à la tranquillité du lieu, aux tomates juteuses ou aux barbecues du weekend, tout le monde a soudainement eu "envie de jardiner." L'idée de créer des jardins partagés dans la cité a germé, et en deux ans, elle a fait un bon bout de chemin.
Ahmed et Rachid, venus se restaurer en ce dimanche matin sur la petite véranda qui surplombe le jardin, font partie des habitants de la cité convertis. Avec l'aide des militants du Pades (Programme autoproduction et développement social), de Jean-Yves Pichot, ancien directeur de la Maison des Familles (14ème) et de Maurice Monnier (aussi appelé "maître Yoda" pour ses multiples connaissances), chef du projet à Font Vert, ils ont convaincu le bailleur Logirem de créer quarante parcelles de quarante mètres carrés chacune pour les habitants de la cité. Un aussi gros projet : une première à Marseille.
Avec le financement qu'ils ont réussi à obtenir, Max promets un "paradis". Sauf que Jean-Yves Pichot est brutalement décédé au mois de mars dernier. Depuis, tout est en stand-by : "les parcelles sont prévues pour le mois de septembre, mais on n'a plus de nouvelles de la Maison des Familles qui est en charge du projet. On a été patient, on a fait bouger le quartier avec l'animation d'un jardin pédagogique entre la mosquée et l'école, il y a l'argent, alors il faut que ça avance" s'impatience Ahmed, qui commence à la rentrée une formation en jardinage.
Récolte de septembre
Pour lui, l'essentiel est de maintenir la dynamique qui s'est créée. Grâce à un joli petit film de Daniel Tromben, un réalisateur chilien qui s'est attaché au projet, les jardins de Font-Vert ont bénéficié d'une belle visibilité. De nombreuses associations sont venues de toute la France visiter le jardin de Max, et étudier les différentes initiatives qu'il a suscitées : du jardin pédagogique au compost, du poulailler du coin à l'ambitieux projet des parcelles de Logirem. Le 4 septembre, trente personnes de tous les âges viendront d'Espagne et d'ailleurs pour mettre la main à la pâte. "Le film a été un vrai tremplin, un déclic. Les images ont beaucoup accéléré les choses. Car la parole ne vaut rien. C'est seulement quand les gens voient de leurs propres yeux que c'est possible qu'ils y croient", estime Max, tuyau d'arrosage en main.
Mais Ahmed sait que le plus gros reste à faire : "toutes les familles vont devoir travailler ensemble, désherber les parties communes, bien s'entendre. Il va falloir aller contre le chacun pour soi. On va leur apprendre à jardiner, mais aussi à communiquer", explique-t-il doucement. Car l'idée des jardins partagés, c'est aussi de changer l'image et le quotidien du quartier. Pour qu'on ne parle plus de Font-Vert comme "d'un repaire de kalachnikovs et de gangsters, mais comme un village, comme un lieu convivial", entonnent Max, Rachid et Ahmed, soucieux que les jeunes du quartier – pour l'instant réticents – participent à cette aventure verte. Quand les quarante parcelles prévues bruisseront de tous ces jardiniers en herbe, Font-Vert portera enfin bien son nom.
Précision : Modification le 8 septembre. Suppression du montant des subventions attendues par la Maison des familles au titre des futurs jardins partagés de Font-Vert. En complément, le responsable du projet des jardins partagés de Font-Vert, Maurice Monnier a tenu a préciser la chronologie du projet et corriger quelques inexactitudes.
Commentaires
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Bravo pour cet article inspirant et qui révele concretement le meilleur de l’ homme
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Encore une fois, a Marseille et plus generalement en France, les gens demontrent qu’ils sont dynamiques, inventifs, capables de prendre en main leur destin et de creer du lien social. Il n’y a pas besoin de l’Etat, des collectivites publiques, de depenses ou de subventions pour cela.
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Dans cet environnement urbain hostile, les coups de pioches déterminés de Max, Rachid et Ahmed pour substituer les couches de sol minéral par des terres fertilisables vont raviver cet instinct intemporel du cueilleur toujours bien inscrit dans notre paléo mémoire. Ainsi les familles des cités pourront aussi profiter des plaisirs les simples qu’offrent la terre et la nature à notre vie.
Comme la musique le jardinage apaise et adoucit les mœurs. Cette démarche me semble plus que d’intérêt public, elle doit être encouragée.
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Voilà une idée pour les vendredis après midi et les rythmes scolaires atelier jardin
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Bravo et continuez
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IL EST LIBRE MAX, comme dit la chanson…Bravo à Max, bravo aux deux Fathi, surnommés “José” et “Bové” !!!, bravo à Ahmed et Rachid, bravo à Daniel Tromben pour son petit film (sans compter que le titre “les graines urbaines” et la musique latino sont formidables). Bravo à Carlotta pour sa belle écriture. Entièrement d’accord avec les propos du citoyen de l’Estaque et des autres. Un vrai bol d’air, qui nous change des turpitudes de “nos” politiciens.Vive le jardinage et la musique !
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Où est passé mon message félicitant tous les acteurs de ces graines urbaines ? : Max (IL EST LIBRE, MAX… comme dit la chanson)…les deux Fathi, surnommés “José” et “Bové” !!! Rachid et Ahmed, sans oublier Daniel Tromben (c’est vrai qu’il est joli son petit film, avec un titre et une musique latino formidables !)et la belle écriture de Carlotta…Que du bonheur ! Cela nous change des turpitudes de “nos” politiciens ! Tout à fait d’accord avec les autres commentaires, notamment ceux du citoyen de l’Estaque, en faveur du jardinage et de la musique !
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Belle initiative que de mettre en place ces jardins partagés pour créer du lien et développer un travail en commun, car tous les acteurs seront gagnants.
Bonne continuation à ces pionniers en souhaitant que beaucoup s’inspirent de cet exemple et en prennent de la graine …
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Merci pour magnifique article. Je perçois l’ accueil et la convivialité qui cous a ete réservée. J’ espere que vous retournenerez les voir afin de creer un autre article sur ces initiatives brillantes et nourrisantes. Merci encore
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Bravo pour l’article et cette belle initiative! Enseignante dans un collège voisin, nous essayons de créer notre potager et nous aimerions vraiment avoir la chance de visiter celui de Max et d’écouter ses bons conseils. Serait-il possible de savoir comment le contacter? ça serait vraiment une belle opportunité pour nos élèves! Merci d’avance
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pour informations nous avons signiez le règlement intérieur et la charte des jardinier merci pour votre soutien
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