Les logements sociaux du Frioul sont-ils des résidences secondaires ?

Les logements sociaux du Frioul sont-ils des résidences secondaires ?

Place du marché, au-dessus du port du Frioul, la chapelle n'accueille plus les malades contagieux ou ceux soupçonnés de l'être. En face de cet édifice aux allures de temple grec se tient le parc immobilier de l'office HLM 13 Habitat. Construit dans les années 70 par l'Opac – ancêtre de 13 Habitat – il est initialement destiné aux résidents de l'île du Frioul ayant droit à un logement social. Seulement voilà, sur les quarante-trois logements de 13 Habitat, certains pourraient servir de résidences secondaires à des Marseillais peu scrupuleux, tentés de s'offrir un peu de tranquillité à la saison estivale. Le tout bien entendu, pour un prix dérisoire. Soit un loyer compris entre 170 et 262 euros hors charge, du T1 au T3 et "autour de 350 euros pour un T3 charges comprises", témoigne un locataire.

C'est du moins la rumeur, relayée par plusieurs résidents et par l'Echo du Frioul, qui est parvenue sous forme de missive dans les bureaux de 13 Habitat. D'après la direction de la communication de l'office HLM, un candidat dépité, en attente d'un logement au Frioul leur a récemment adressé un courrier. "Il fait notamment état d'un nombre important de volets constamment fermés". Suite à cette lettre, Habitat 13 a décidé de lancer sa propre enquête auprès des résidents. "Nous avons écrit à l'ensemble des locataires du Frioul pour savoir s'ils occupaient bien leur logement au moins huit mois dans l'année. Il s'agit des huit mois minimum nécessaires pour accéder à un logement social". Pour l'instant, d'après 13 Habitat, huit locataires doivent clarifier leur situation.

Des "on-dit" encombrants

Sur place, les abords du parc locatif restent déserts, de nombreux volets sont fermés. Le local du CIQ du Frioul, au-rez-de-chaussée de l'immeuble est vide. Contactée par mail, sa présidente répond : "Hélas, le CIQ n'est pas au courant de tout". Pas un chat ne se risque à s'aventurer dans les couloirs où de nombreuses portes restent closes, malgré une sonnette pressée avec insistance. Un relevé des compteurs a été effectué hier, comme l'indique plusieurs avis de passages restés accrochés sur les portes des appartements. Enfin, un premier locataire ouvre la porte et s'emporte aussitôt : "Je viens tout juste de répondre au téléphone à 13 Habitat, je n'ai rien de plus à dire !".

Mais certains autres rares locataires présents se montrent autrement plus loquaces. Une femme indique sans hésitation : "c'est la réalité, au moins la moitié des locataires utilisent leurs logements comme des résidences secondaires, l'été. Ils vivent le reste de l'année dans les beaux quartiers de Marseille. Pour eux ce n'est pas vital. A côté de ça j'ai une amie qui a vraiment besoin d'un logement et à qui on a répondu qu'il n'y en avait plus de disponible… En plus, souvent, pour accéder à ces logements, les personnes indiquent un autre nom."

Sollicités, les commerçants du port connaissent également bien ce problème de fraude. L'un d'eux se montre catégorique : "80% des résidents sont là uniquement l'été, ils ont été pistonnés par des politiques." La commission d'attribution des logements sociaux de 13 Habitat est donc directement visée. Face à cette allégation relayée par plusieurs Frioulais, 13 Habitat se défend avec véhémence : "Depuis la présidence de Christophe Masse, la transparence est totale. Et même bien avant cela, aussi loin que je me souvienne, elle est effective depuis au moins 15 ans. Ces histoires de piston, ce sont des rumeurs. Mais l'investigation sur les résidences secondaires reste en cours."  En fonction du résultat de celle-ci, 13 Habitat décidera des suites à donner pour rectifier cette situation illégale. Les Frioulais concernés peuvent d'ores et déjà préparer un duplicata de leur feuille d'imposition… ou relever leur courrier, pour faire illusion.