L’eau dans le grand bassin de la métropole

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le 30 Oct 2013
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Pour Bernard Mounier et les partisans d’une gestion publique de l’eau, la bataille était perdue depuis juillet 2011 : la communauté urbaine avait alors reconduit le principe d’une délégation au privé, sous forme de quatre contrats (un pour l’eau, trois pour l’assainissement). Restait pour l’association Eau bien commun – qui regroupe plusieurs associations, syndicats et partis politiques – à s’assurer que le cadre s’améliore, au regard du prix mais aussi de la transparence.

Là encore, la déception domine vis-à-vis de ce qui est proposé au vote des élus ce jeudi. “À première vue, des améliorations ont été apportées, avec beaucoup plus de contrôle par la communauté urbaine”, commente Bernard Mounier. Mais elles restent dépendantes des moyens de la collectivité et de la volonté politique. La durée des contrats – 15 ans – est également critiquée au regard des signatures récentes dans d’autres villes, en grande majorité entre 10 et 12 ans.

Le contrat de l’eau prévoit la mise en place d’un “comité des usagers qui permettra d’associer associations de quartiers et de consommateurs, représentants du monde économique, industriels, artisans, commerçants, syndics, médecins, agriculteurs, bailleurs sociaux, services de secours” et “se réunira quatre fois par an”. Bernard Mounier n’est pas convaincu par ce rôle  purement consultatif, quand Suez, candidat recalé au contrat d’adduction, proposait des sièges au conseil d’administration.

Des dizaines de contrats dans la métropole

Cette question se posera avec une acuité renouvelée lors de la mise en place de la métropole, prévue en 2016. En effet, les six intercommunalités appelées à être fusionnées présentent des modes de gestion variables : un seul contrat pour 17 communes pour l’Agglopole, une régie intercommunale à Martigues… Plus compliqué, le San Ouest Provence dispose de cinq contrats – un par commune sauf Istres et Miramas qui partagent le même. Autre cas de figure : dans le pays d’Aix, ce sont encore les 34 communes qui exercent individuellement les compétences de l’eau et l’assainissement. La gestion est donc éclatée en autant de périmètres. Et on vous faire grâce de la complexité du côté du pays d’Aubagne et de l’Étoile. Au final, voici la carte de la distribution de l’eau au niveau métropolitain :

Métropole eau

Lecture de la carte : en bleu, gestion directe par une régie ou un syndicat intercommunal ; en vert, gestion déléguée à une société privée. Les parties claires désignent des contrats communaux, les parties foncées ceux concernant plusieurs villes ou villages.

N’oublions pas que l’assainissement peut faire l’objet d’une gestion différente, rajoutant une couche de complexité :

Métropole assainissement

Que se passera-t-il en 2016 ? Dans un premier temps pas grand chose, selon toute vraisemblance. Courant jusqu’en 2029, les contrats de MPM engageront les futurs élus pour “deux mandatures et demies”, souligne Bernard Mounier. Les pénalités de rupture de contrats devraient suffire à les dissuader de toute remise en cause. C’est également le cas au SAN Ouest Provence, où les dates butoirs se situent pour la plupart vers 2020.

Néanmoins, au gré des échéances, des choix politiques s’imposeront. Faut-il renouveler la délégation de service public ou bien passer en régie ? Un abandon du public pour le privé sera également possible à tout moment. “Il va falloir être très attentifs. Il est plus facile de faire passer une régie en contrat de délégation de service public que l’inverse”, note Bernard Mounier.

Qui aura voix au chapitre ?

Dans quelles conditions se prendra la décision ? Plus au strict niveau communal – comme à Aix par exemple – c’est certain. La compétence eau et assainissement sera obligatoirement transférée au niveau intercommunal. Mais elle descendra probablement ensuite du niveau métropolitain vers les conseils de territoire, prévus pour assurer l’échelon intermédiaire. Cela pose la question du fonctionnement démocratique de ces instances.

Une stratégie sera-t-elle adoptée au niveau métropolitain, par exemple en tenant compte des spécificités géographiques en terme de ressources, des compétences au sein des territoires ? Les conseils des territoires seront-ils seuls décideurs en la matière ? Ou bien la pratique s’en remettra-t-elle au choix des maires ? Sans oublier la place du débat public, fer de lance de Bernard Mounier : “En permanence concernant la gestion des biens communs, il faut penser démocratie, participation des usagers”. Le passage de la loi au Parlement n’a pas permis d’esquisser de pistes en la matière, si ce n’est par la mise en place obligatoire d’un conseil de développement, sorte d’assemblée de la société civile oubliée dans le texte initial présenté par le gouvernement.

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Commentaires

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  1. ALAIN PERSIA ALAIN PERSIA

    Bravo pour cet article et la qualité des observations de B.MOUNIER.
    Pour ma part je suis encore outré que les élus UMP et PS aient voté le renouvellement du contrat de privatisation de l’eau à cinq mois des élections municipales et qui plus est, sans concertation avec la population!
    Encore un acte à mettre au passif du couple CASELLI- GAUDIN!

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  2. Anonyme Anonyme

    Le problème de la gestion de l’eau est une preuve de la mainmise de certaines sociétés sur les marchés à Marseille et au delà de la corruption générale de nos élus qui ne tiennent aucun compte de l’intérêt des populations

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  3. Anonyme Anonyme

    Pouvez-vous nous dire qui des élus a voté pour et qui a voté contre? Merci

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  4. Anonyme Anonyme

    Monsieur Vincent,
    Pouvez nous nous donner le détail des votes? Merci

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  5. patri patri

    Actuellement l’approvisionnement en eau dans le monde entier est à 80% sous régie public. A l’opposé d’autres pays européens la quasi-totalité de la gestion du service d’eau est confiée au privé en France. Même aux USA seulement 20% de l’eau est géré par le privé alors que c’est un pays connu pour sa politique ultra-libérale ! Il faut aussi savoir que l’eau est le 3em secteur le plus corrompu après l’armement et le BTP … Alors que c’est une ressource vitale pour l’humanité. Que font nos gouvernants pour moraliser tout cela, où trempent-ils aussi dans cette corruption, ceci expliquerai cela ?
    plus d’infos pour un retour en régie de l’eau sur http://www.activeau.fr/retour-regie-eau

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