Le multiplex de Luc Besson à Marseille : encore un grand projet qui prend l'eau ?

Luc Besson vient déjeuner

Printemps 2006 . Ce n’est pas un taxi 407 blanc qui vient se garer au pied de l’escalier du palais du Pharo, avec dérapage au frein à main, mais une Mercedes noire, vitres fumées, immatriculée dans le 83, qui roule à un train de sénateur. En haut des marches Jean-Claude Gaudin attend son visiteur, tout cravaté et traditionnel blazer marine croisé de directeur commercial. Le réalisateur-producteur Luc Besson descend de la berline allemande, jeans vintages, teeshirt noir, accompagné d’un ou deux assistants et de l’attaché de presse de sa société de production, Europacorp. Blonde, grande, yeux calanque d’En-Vau, forcément. Hollywood arrive à Marseille, con.

Le maire de Marseille a invité à déjeuner le réalisateur du Grand Bleu et la presse locale pour annoncer le futur grand projet de Jean-Claude le bâtisseur, en plein coeur d’Euromed. Grandiose, forcément grandiose. Un multiplex de 3000 fauteuils, 10 millions d’euros d’investissement et un geste architectural fort, en forme de dauphins, signé par la star italienne Massimiliano Fuksas.

 » Savez-vous que Luqueu Beusson et moi nous avons un point commun ? » démarre très fort le maire de la deuxième ville de France, à l’apéro. Regard inquiet de Besson… « Eh bien nous partageons le même embonpoint » . Un ange passe très, très lentement sous les lambris du palais du pharo, l’attachée de presse devient diaphane, et le taiseux Besson part en apnée, avec un mauvais rictus aux lèvres, pour ne ressurgir qu’à l’heure du café. Et ce pour dire à son ami Jean-Claude tout le bien qu’il pense de son champion Sarkozy, à l’époque candidat aux présidentielles, en des termes surement peu entendus au palais construit par l’impératrice Eugènie. Fin du premier acte.

Quand la crise fut venue

On connait le deuxième acte. Films en 3D pendant la campagne des municipales, grandes affiches sur le stand de la ville de Marseille à la foire, le multiplex de Fuksas illustrant même la carte de voeux de Gaudin l’an dernier, et malgré la crise; la traditionnelle méthode Coué  » le multiplex de Luc Besson sur les rails » titrait  La Provence, en juin 2008. Troisième acte ces derniers jours. Gaudin ayant refilé la patate chaude à Guy Teissier en tant que Président d’Euromediterranée, quelques recours plus tard, on sent qu’une fois de plus ce projet qui devait sortir de terre en 2008, et qu’on annonce toujours pour 2013, semble avoir du mal à respecter tous ses paliers de décompression.

D’ailleurs lors de ses voeux à la presse en début de semaine, Guy Teissier ne s’en cachait pas vraiment.  » le projet est beaucoup plus difficile que prévu, il est déjà revu à la baisse, mais je cherche activement des solutions, notamment en faisant venir à côté de Besson un autre opérateur, Pathé est intéressé ». Son directeur général à Euromed, Françis Jalinot déclencha d’ailleurs un beau fou rire dans la salle pleine de journalistes en ajoutant « euh, oui, enfin, Pathé il faut pas le dire, hein... » Un petit scoop qui se retrouva bien évidemment dans les colonnes des quotidiens locaux dès le lendemain matin.

Europacorp dans la tempête

Et pas de chance une fois de plus pour Jean-Claude, et surtout pour Marseille, Europacorp, la société de Luc Besson est en pleine tempête . On vient d’apprendre en effet, que Pierre-Ange Le Pogam, associé de la première heure et directeur général d’Europacorp avait discrètement sauté du navire ces dernières semaines, sous fond de guerre des chefs, et de mauvais résultat avec près de 10 millions de pertes l’an dernier comme viennent de l’annoncer les Echos ce matin. Et forcément ça sent pas bon du tout pour nos dauphins. Mais bon, à défaut de films on aura vu au moins une belle affiche et une belle bande-annonce.

Pierre-Ange Le Pogam quitte Europacorp sur fond de crise sur lefigaro.fr

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