Le Festival des suds à Arles perd sa subvention du département

Actualité
le 31 Mai 2018
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Événement phare des étés arlésiens, le festival des Suds a perdu la subvention que lui versait jusqu'ici le département. La collectivité invoque des choix nécessaires en période de restrictions budgétaires et aidera désormais le festival sur ses actions en lien avec la culture provençale.

M en concert au théâtre antique. Crédit : Festival des Suds.
M en concert au théâtre antique. Crédit : Festival des Suds.

M en concert au théâtre antique. Crédit : Festival des Suds.

“C’est assez étrange de vivre ça…”. Marie-José Justamond, directrice du festival Les Suds à Arles, événement majeur de la saison estivale depuis plus de vingt ans, choisit prudemment ses mots. Alors que la programmation de l’été 2018 a été dévoilée vendredi dernier, l’équipe du festival a annoncé avoir perdu la subvention du département qu’elle touchait chaque année de longue date et qui s’élevait encore à 80 000 euros il y a deux ans.

“Tout s’était très bien passé depuis le changement de majorité, précise Marie-José Justamond. C’est l’an dernier qu’une baisse importante a eu lieu, de 50%. Nous avions alors écrit à la présidente pour lui expliquer notre travail, on comprend que ce n’est peut-être pas si simple depuis Marseille de savoir ce qui se fait à Arles… Mais on n’imaginait pas que l’année suivante se soit aussi radical”. Pour 2018, le festival fera sans l’aide du département, qui continue simplement d’aider certaines activités culturelles, pour un peu moins de 25 000 euros – un montant qui doit encore être validé en commission permanente en juin. En 2017, le budget total de la manifestation dépassait le million d’euro.

Conséquence directe sur la programmation, une scène, celle de Saint-Césaire et les huit concerts qui devaient s’y jouer en journée, restera fermée. Des projections de documentaires sur la musique seront proposées en remplacement. La première partie du concert de Gilberto Gil a aussi été annulée pour des raisons d’économies.

“On n’a pas besoin de deux festivals de musiques du monde”

“Ce changement n’a rien de brutal, se défend Sabine Bernasconi (LR), vice-présidente du département en charge de l’action culturelle. Ils ont été prévenus, accompagnés, on les a programmés sur des actions hors les murs au cours de l’année, notamment dans le cadre des capitales culturelles du département”.

Sur le choix de mettre fin à la subvention principale, en revanche, l’élue évoque un arbitrage budgétaire. Sur les musiques du monde, on a déjà un gros festival, la Fiesta des suds à Marseille et les budgets sont contraints, il faut faire des choix. On n’a pas besoin en l’état de deux festivals de musiques du monde de cette ampleur financés par le département”. Un choix qui peut se lire à l’aune des choix d’une autre collectivité, la région, qui a mis fin, de son côté, aux subventions de Babel Med, festival porté par la même association que la Fiesta des suds, et lui spécialisé dans les musiques du monde contrairement à la Fiesta. Le département viendrait-il remplir les creux laissés par la région ? “C’est un choix qui peut s’entendre, même si ce n’est pas agréable”, admet la directrice du festival arlésien, qui espère que ses collègues marseillais pourront constater une réelle amélioration de leurs financements en conséquence.

Sabine Bernasconi souligne que les subventions au titre de l’action pour la culture provençale ont, elles, été maintenues : “ils ont été redirigés vers le volet culture provençale [de nos financements]“. Si le festival a toujours défendu la création en langue provençale, il paraît curieux d’opérer des choix entre culture locale et du reste du monde.

Fin des partenariats avec les musées départementaux

Mais un autre volet de l’appui départemental a aussi disparu pour les Suds cette année : les deux musées départementaux arlésiens, le museon Arlaten et le musée de l’Arles antique, ont mis fin aux partenariats qui les liaient au festival, et qui donnaient lieu à des projets communs “depuis 18 et 17 ans”“Pour nous c’est le plus violent, c’est une collaboration qui a beaucoup de sens, regrette Marie-José Justamond. On espère que ce ne sera que provisoire”. Sabine Bernasconi évoque en effet une nécessité pour les musées de “faire tourner les partenaires, pour que ce ne soit pas toujours les mêmes”, sans lien avec le choix de mettre fin à la subvention assure-t-elle. En remplacement, la ville d’Arles a proposé d’accueillir des actions au musée Reattu.

Du côté du festival, même si l’heure n’est pas à la dramatisation, une réflexion sur le modèle économique s’impose. “On va déjà voir pour cette année, pose Marie-José Justamond. On est plutôt du genre à être entreprenant, inventifs, on dispose déjà de financements variés. Mais la partie de financement privé n’atteindra jamais les sommes du public”. Un système de mécénat pour les particuliers a notamment été mis en place, avec la possibilité de dons défiscalisés. 

Le festival envisage aussi de créer un poste à plein temps pour chercher de nouveaux partenariats économiques… mais manque justement de fonds pour y parvenir. “La perte des subventions, paradoxalement, ne nous aide pas à aller vers l’autonomie”, note la directrice. Avec les budgets de la culture réduits, que ce soit par la région ou le département, pour les acteurs du milieu, l’inventivité est de mise… quand il est encore temps.

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Commentaires

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  1. manu théron manu théron

    La captation idéologique de la “culture provençale” par les majorités départementale et régionale constitue une sinistre ambigüité, et les musiciens s’exprimant en Provençal, dans leur ensemble, ne souscrivent en rien à cette substitution arbitraire, qu’aucun argumentaire sérieux ne pourrait étayer. Nous ferons en sorte de nous exprimer sur cette instrumentalisation honteuse, tendant à rapprocher notre travail des préoccupation identitaro-électoraliste d’une classe politique qui, en réalité, n’a que méfiance et hostilité pour les expressions populaires que notre culture véhicule. Il va venir le temps d’être offensifs, et nous passerons à l’action assez rapidement. En attendant les écoles en Provençal perdent aussi leurs subventions et les enseignements en collège se restreignent ou disparaissent, tandis que les structures de transmission des patrimoines immatériels (musiques, langue, sociabilités, anthropologie ou accession aux savoirs) sombrent dans une quasi-clandestinité, ou sont récupérées par des incompétents dont la culture est le dernier des soucis.

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