La République en marche a huit députés dans les Bouches-du-Rhône mais toujours pas de parti
Après le débarquement de Corinne Versini à la tête de son antenne départementale, la République en marche cherche à bâtir un édifice politique plus solide pour faire face aux prochaines échéances, européennes et municipales. Pas simple.
Des militants LREM lors de la campagne pour les législatives. Photo CB
Voilà au moins un sujet qui fait l’unanimité. De l’adhérent de base au député, de l’animateur de comité local au cadre, tous sont d’accord : la République en marche doit se (re)construire dans les Bouches-du-Rhône. Lorsque le 10 septembre dernier Corinne Versini rend son tablier de référente départementale, sa démission – réclamée depuis plusieurs mois par nombre de marcheurs – acte deux ans de difficultés profondes à structurer le mouvement naissant. “Il faut tout bâtir. On ne sait pas encore se servir de ce mouvement, d’abord parce qu’il est jeune”, note Yves Delafon, animateur de comité à Aix-en-Provence et opposant de longue date à l’ancienne cheffe.
Comme lui, de nombreux militants de la première heure laissent percer leur inquiétude. “Il y a de vrais questionnements sur notre fonctionnement interne et la verticalité de la structure”, analyse Jean-Marc Maini, qui pilote un comité dans le 8e arrondissement de Marseille. “Pendant la campagne, on était parti sur du participatif mais maintenant ça coince. On nous demande d’animer des ateliers mais l’échange n’est que descendant… Jamais remontant ! On reçoit des mails et des messages via Telegram [réseau social de messagerie instantanée, Ndlr. ] pour relayer la politique gouvernementale : OK, très bien. Mais l’enjeu aujourd’hui c’est d’être capables de créer une dynamique et de remobiliser les gens pour les prochaines élections. Et là, on n’y est pas !” La démobilisation guette et certains animateurs locaux ont l’impression “de prêcher dans le désert”. Or, le calendrier politique devient pressant : les européennes sont pour demain (26 mai 2019) et les municipales de 2020, après-demain.
LREM découvre donc l’urgence de s’organiser pour ne pas se présenter à ces scrutins-là en parti sans substance, à la fois coupé de sa base et de ses députés. “Cette déconnexion entre les instances départementales, la base et nous, c’est l’ancienne référente qui l’a voulue”, tape Saïd Ahamada, député de la 7e circonscription, à Marseille. “Les militants ont besoin de voir les élus. Il faut qu’on apprenne à mieux exister. On bosse, il faut arriver à le faire savoir ! Nous devons imposer de nouveaux visages, de nouvelles pratiques, de nouvelles méthodes.”
Le changement (de référent) c’est maintenant
D’ici à cette mutation en profondeur, l’appareil jupitérien devra, d’abord, se trouver un nouveau leader départemental. Les candidats ont, selon les statuts du mouvement, du 1er au 8 octobre pour se faire connaître. Puis jusqu’au 22 octobre, les comités locaux seront consultés pour désigner leur “profil idéal”, explique le topo transmis aux adhérents. “Mais cette consultation n’est pas un vote”, cadre Anne-Laurence Petel, députée de la 14e circonscription des Bouches-du-Rhône. “Les candidats doivent surtout remplir des conditions managériales comme politiques et des critères précis dans la relation avec les élus”, ajoute celle qui est aussi membre du bureau exécutif de la REM. Manière, en creux, de lister les critiques les plus souvent reprochées à l’ancienne responsable départementale. Manière, aussi, de rappeler que les députés entendent peser sur ce choix. Longtemps écartés du centre névralgique départemental, ils annoncent sans le dire sa reprise en main.
Plusieurs noms circulent pour endosser le costume laissé par Corinne Versini : celui de Jean-Pierre Serrus (maire de La Roque d’Anthéron) notamment ; mais aussi de Violaine Richard (issue de la société civile, elle est l’ancienne directrice générale adjointe en charge des finances et de l’administration Euroméditerranée) et de Bertrand Mas-Fraissinet (ancien candidat du PS, médecin, il incarne le lien avec les comités locaux). Jean-Pierre Serrus reconnaît son “intérêt pour tout l’aspect local du développement la politique de la République en marche” et se dit “à la disposition du mouvement”. Un cadre lâche, cruel, “et puis maintenant qu’il n’est plus vice-président de la métropole, il va avoir du temps…”
Marseille, territoire emblématique
Serrus, Richard et Mas-Fraissinet offrent trois profils très complémentaires. Leur association au sein d’une direction départementale offrira-t-elle des fondations assez solides pour y asseoir une machine de guerre en vue des échéances électorales ? Pas sûr. Avant même toute désignation, les députés affichent des visions divergentes sur la forme du prochain leadership. “Marseille est un territoire emblématique, avec un enjeu fort. Comme à Paris où il n’y a pas qu’un seul référent, une organisation avec plusieurs personnes peut aussi être plus adaptée ici” glisse Saïd Ahamada. Tandis qu’Anne-Laurence Petel affirme qu’il n’y aura “qu’un seul référent” associé à une équipe de direction complémentaire. Avant de promettre : “on sera dans les starting blocks dès qu’il sera nommé”.
Saïd Ahamada dit, sans rire, compter sur les européennes pour “remobiliser les troupes”. Mais certains marcheurs font part de leur “trouille”. “Il y a une différence entre une campagne et le fait de devenir un parti de gouvernement. Notre réussite c’était d’avoir réuni des gens qui n’avaient jamais milité. Mais sans structure pour les encadrer, c’est un peu notre faiblesse aujourd’hui…”, synthétise Jean-Marc Maini.
Faire campagne “en mode amateur” lors des prochaines élections aiguise les craintes et pointe la responsabilité du QG parisien. “C’est une erreur d’avoir Castaner à la fois au gouvernement et à la tête de notre mouvement”, se désole un marcheur marseillais. “Aujourd’hui on est une coquille vide. On a tout à construire, mais on est seuls. On a besoin qu’il soit avec nous pour mettre les mains dans le cambouis.” La rumeur annonce parfois Christophe Castaner candidat à la mairie de Marseille (ce qu’il n’a jamais confirmé) ; ses militants l’attendent surtout comme patron.
Commentaires
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Cette situation peut être dupliquée sur beaucoup de territoires pour LREM. Si rien n’évolue çà annonce une jolie déconvenue aux municipales.
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Et il avait fait quoi déjà le Modem, ce parti “ni de droite, ni de gauche” ?
En 2007, super élan populaire avec des T-shirt oranges: au premier tour des présidentielles 18,57%, pas loin de celui des finalistes de 2017.
En 2012, 5 ans plus tard, 9,13% aux présidentielles.
En 2017, il lui faut tordre un peu le bras du marcheur pour avoir 45 sièges à l’assemblée …
Les beaux jours d’LREM sont peut-être derrière eux !
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