La majorité baroque de Jean-Claude Gaudin pour faire adopter le budget de la métropole

Reportage
le 15 Déc 2017
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Le vote du budget de la métropole, placé sous le sceau de la rigueur budgétaire, a encore divisé l'ensemble des familles politiques. Le parti Les Républicains a notamment affiché ses divisions avec les votes contre des élus aixois, dont la maire Maryse Joissains.

La majorité baroque de Jean-Claude Gaudin pour faire adopter le budget de la métropole
La majorité baroque de Jean-Claude Gaudin pour faire adopter le budget de la métropole

La majorité baroque de Jean-Claude Gaudin pour faire adopter le budget de la métropole

“Tu en fais trop !” À peine descendu du perchoir, Jean-Claude Gaudin fonce de son pas de sénateur (qu’il n’est plus) vers Gérard Bramoullé. L’adjoint au maire d’Aix-en-Provence vient au nom de son “éthique de conviction” de voter contre le budget métropolitain. “Vous critiquez mais vous prenez le pognon”, se lâche Jean-Claude Gaudin. “Mais c’est le nôtre”, lui répond Maryse Joissains. “Non ce n’est pas vrai”, tacle le patron de la jeune intercommunalité avant de tourner les talons toujours aussi énervé.

L’échange conclut le long examen du budget (2,4 milliards d’euros) qui a animé la séance du conseil métropolitain ce jeudi. Tous les acteurs le présentent comme contraint, ce qui occasionne de nombreux appels à l’intervention de l’État dans l’hémicycle. Le budget reste pourtant marqué, encore et toujours par les importantes redistributions aux communes qui représentent plus de la moitié des recettes de fonctionnement “quand c’est 30 % dans les autres métropoles”, a martelé Jean-Claude Gaudin.

Mais les opposants d’hier à la nouvelle institution sont toujours là et Gérard Bramoullé, bien que membre comme Jean-Claude Gaudin du parti Les Républicains, a livré la charge la plus lourde. “C’est un budget économiquement mortifère avec un effondrement de l’investissement. En 2016, 600 millions d’euros, 477 puis 407. En moins de 2 ans, on a perdu 200 millions d’investissement sur l’aire métropolitaine qui auraient pu être maintenus si on n’avait pas créé cette métropole”, a-t-il tonné dans l’hémicycle. Un peu plus tard, toujours courroucé, Jean-Claude Gaudin pointera “les 70 millions de l’Arena, la moitié du budget transports qui passe dans leur BHNS” pour montrer que le Pays d’Aix a “chargé la barque de la métropole, merde !”.

Joissains : “Une métropole déjà en faillite”

Mais Gérard Bramoullé a un autre grief : le traitement infligé au pays d’Aix dont il se fait le porte-parole. “Avec 178 millions, on donne 7 % du budget pour un territoire qui produit 21 % de ressources fiscales, ce n’est pas juste”, explique-t-il. Le chargé du budget, le maire de Carry-le-Rouet Jean Montagnac, lui répond : “Nous avons fait au plus juste par rapport à ce qui a été réellement dépensé cette année”. Bramoullé termine : “La métropole est en voie de sous-développement”. “Cette métropole est déjà en faillite”, renchérira Maryse Joissains, la maire d’Aix. “Que ce budget soit voté par notre majorité politique est un minimum”, avait pourtant déclaré au préalable le maire de Gémenos Roland Giberti, président d’un groupe de maires soutiens de Gaudin. Forcément, Stéphane Ravier, qui passe derrière tout ce monde pour le Front national n’a plus qu’à se féliciter de la fracture de la droite : “Avec tout ce qui a été dit, nul besoin d’en rajouter, s’amuse-t-il. Ce n’est que la transcription technique des soins palliatifs que vous nous aviez annoncé. […] Mais nous avions été prévenus dès la création de cette institution”.

Mais, si les discours sont virulents, peu d’élus votent finalement contre le budget Gaudin. Les communistes, malgré les déclarations du maire de Martigues Gaby Charroux contre une métropole “qui détruit les services publics”, choisissent l’abstention. Les socialistes s’y réfugient eux aussi. “Compte tenu des contraintes actuelles, qui sont notamment celles que Gaudin lui-même s’est donné, difficile de mettre en place un autre budget”, estime le maire de Vitrolles Loïc Gachon, nouveau coordinateur départemental du parti. Le groupe “d’intérêt communal”, principalement constitué de maires sans étiquette, s’abstient à son tour “pour obliger l’État à se mettre autour d’une table pour négocier une aide financière” tout en précisant qu’“en aucun cas, il ne s’agit d’une remise en question du président de la métropole”.

“Lâche abstention”

“Je sais qu’il n’y aura pas de faux-fuyant qui se réfugieront dans une lâche abstention. Ou pour ou contre”, avait pourtant réclamé Gérard Chenoz, président du groupe gaudiniste. En réalité, le travail avait été fait en amont toute la semaine, pour essayer de sécuriser le vote. La crainte de représailles avec un tour de vis supplémentaire a pesé, suscitant des débats au sein de l’ensemble des groupes. “Ils distribuent des sucres d’orge à tout le monde avec des postes. Et ensuite, ils ont peur des représailles, qu’on leur coupe les vivres”, s‘agace René Raimondi, maire (ex PS) de Fos, satisfait d’être “un des cinq maires à avoir voté contre”. “Le vrai problème, c’est la gestion actuelle où on dit qu’on a des problèmes mais où on continue à financer les aménagements de nouveaux bureaux pour trois millions ou la Formule 1 au circuit Paul-Ricard”, peste-t-il.

Mais les inquiétudes ont été réelles au sein de l’exécutif de la métropole. Toute la semaine, un autre argument a été déployé : la perspective d’un budget adopté sous la tutelle par l’État. “Imaginez l’image que nous renverrions aux citoyens et au monde économique”, a encore avancé dans l’hémicycle Gérard Chenoz. Beaucoup ont compris le message, sans pour autant donner un blanc-seing à la gestion Gaudin. Ainsi, le vice-président et 1er adjoint de Salon-de-Provence Michel Roux (UDI) qui a exprimé son amertume dans un tweet.

La ficelle a aussi fonctionné avec les élus marseillais ayant quitté le Front national qui ont tous voté le budget Gaudin. Même chose pour l’ancien président de feu la communauté urbaine de Marseille Eugène Caselli (PS) qui a joint sa voix à la majorité. Même André Molino et Georges Rosso, les maires de Septèmes et du Rove y sont allés de leur vote pour, mais “uniquement pour soutenir le président Gaudin”. Cette majorité hétérogène, qualifiée de “raisonnable” par Gérard Chenoz, vient surtout signaler combien la métropole divise toujours l’ensemble des courants politiques. On ne voit pas bien comment il pourrait en être autrement jusqu’à la fin du mandat.

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Commentaires

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  1. Dark Vador Dark Vador

    « Vous critiquez mais vous prenez le pognon », se lâche Jean-Claude Gaudin… La ficelle a aussi fonctionné avec les élus marseillais ayant quitté le Front national qui ont tous voté le budget Gaudin. Même chose pour l’ancien président de feu la communauté urbaine de Marseille Eugène Caselli (PS) qui a joint sa voix à la majorité.

    Tout est dit…

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  2. LaPlaine _ LaPlaine _

    La pétaudière habituelle quoi, un territoire ingouvernable, une gabegie financière,un appauvrissement, des intérêts de petits roitelets locaux, c’est en effet la pire image d’une métropole au niveau national, à l’heure où toutes le autres se structurent et avancent. Finalement la tutelle de l’Etat serait presque préférable (tout comme pour la ville de Marseille du reste).

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  3. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    Les Aixois, ou du moins les Aixois tendance Joissains, sont dans leur rôle d’opposants systématiques et sans nuance à la métropole. Dans La Provence d’hier, on trouve quelques chiffres qui permettent de mesurer la pertinence de cette opposition : les dotations budgétaires à l’ex-Pays d’Aix atteignent 175 millions d’euros pour environ 400 000 habitants, tandis que l’ex-CUMPM se contente de 210 millions d’euros pour 1 million d’habitants. La ligne politique de Joissains reste l’égoïsme et l’apartheid social.

    Mais cette ligne est partagée par beaucoup : les reversements aux communes, scandaleusement élevés, tuent l’idée même de métropole, ce qui n’a pas empêché ses opposants de bien charger la barque métropolitaine d’équipements pas tous métropolitains. Quand on veut tuer son chien, on l’accuse de la rage.

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    • Blachère Blachère

      Il est vrai que la barque de la métropole a été bien chargé mais il est vrai aussi que celle ci n’est pas en mesure de prendre en mains les compétences qui lui ont été transféré par la loi. Des conventions de gestion ont d’ailleurs été voté par dizaine qui n’ont aucun fondement juridique. Dans la mesure où les communes assurent les missions de la métropole on ne voit pas pourquoi elles ne bénéficieraient plus du budget qui va avec… D’ailleurs, le vrai problème de cette métropole cela va être le quotidien de son administration dans une extension du modèle marseillais qui a si bien fonctionné depuis l’après guerre. Si sur le papier on peut être parfaitement en accord avec l’idée métropolitaine, concrètement…

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    • Avé Avé

      Je suis d’accord avec votre commentaire et avec la réponse apportée, qui se complètent. Une métropole qui n’en est pas une, et l’aveu par la délégation de la gestion aux communes. Tant de bruit durant le quinquennat précédent pour rien. En charge du dossier, la ministre Lebranchu aurait sûrement dû adopter le remède de cheval et forcer à une métropolisation sans concession, conseils de territoires et conseil des maires. En échange, la métropole ne devrait assumer que quelques fonctions primordiales (transports, aménagement, grands équipements, etc.).
      Maintenant on en est réduit à assister à ce spectacle inique, où Gaudin se fait l’étendard d’un “esprit d’équipe” à la métropole sous la pression (l’abstention plutôt) de l’Etat, alors qu’il a lui-même tiré une balle dans le pied du nouveau machin en le vidant de toute substance via les transferts aux communes. C’est bête quand même, il aurait été bien de réfléchir avant! Et Joissains pendant ce temps-là, dans son fauteuil…
      Une chose est sûre, le meilleur service que pourrait encore rendre la métropole à Marseille serait que sous la pression de ses collègues, même débilement contre, la ville soit forcée à changer son mode d’administration, qui ne sera à juste titre jamais accepté par les villes environnantes. Je ne crois pas que la gestion RH de la ville d’Aix soit franchement meilleure mais ça n’est pas la ville centre qui pourrait se permettre de lui faire la leçon.

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  4. julijo julijo

    Baroque…..oui bancale aussi. M

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  5. Helene Goldet Helene Goldet

    Cette métropole recouvre en gros le département des Bouches du Rhône, à l’exclusion de la Camargue. 80 % de la surface et 90 % des habitants, de mémoire.
    Elle a été pensée comme outil politique pour contourner l’équipe Guérini, à l’époque solidement installée dans l’ex conseil général.
    Depuis, le conseil départemental a changé de majorité, et la métropole est un échec politique total.
    Il faut envisager la métropolisation du département des Bouches du Rhône. Que les forces progressistes du département s’emparent de ce projet serait une belle ambition.

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  6. julijo julijo

    Baroque…..oui bancale aussi. Mais ça on le savait dès l’origine.

    La position d’Aix ne varie pas depuis des siècles. Celle des autres communes aussi. Chacun défend son pré carré. Avec raison ! après tout.

    Ce qui m’amuse le plus c’est la géométrie variable des élus présents. Leur idéologie est réellement primaire, légère, quasi inexistante et je trouve que ça pimente un peu. Et comme ça patouille de tous les côtés, gaudin devient franchement hilarant.

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  7. Happy Happy

    Joissains : “I want my money back !” Avant l’Aixit ?

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  8. Alceste. Alceste.

    Ce budget est simplement acheté à coup de vice-présidences, tout le monde est contre mais cela vote pour. Donc nous sommes en pleine comédie, comme d’habitude.
    Joisains bombe le torse pour les aixois, Gaudin fait les gros yeux à Bramoullé pour les marseillais . Mais l’objectif principal du jeu est atteint , rester en place.
    Dans cette histoire il n’est pas question d’idéologie, de concepts politiques ou autre fariboles. L’objet principal est : garder la place et se goinfrer.
    Le comble étant atteint quand même par CHENOZ qui se pose encore la question de savoir l’image qu’ils donnent . Encore un effort CHENOZ et vous dépassez MIRON

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  9. graindesable graindesable

    Comme à dit l’autre : j’ai fais un rêve. La Métropole ou une chance à saisir ! L’occasion de réinventer les modes de gouvernance des collectivités territoriales, l’occasion d’envisager de manière plus transversale, plus horizontale, la gestion des affaires publiques. Bref, profiter de la naissance de cette nouvelle institution pour expérimenter un autre rapport au politique, au pouvoir, à l’interêt collectif… Un rêve !
    Nous sommes ici dans la caricature la plus totale. Un système vieillissant ? Non à l’agonie. Une métropole qui est née en ruine et qu’un vieillard cynique maintient artificiellement en vie. Avec pour seul argument : vous êtes moribond, mais sans moi vous seriez mort. Et tout le monde, je dis bien tout le monde, sait que la catastrophe est inévitable. C’est écrit : demain ne peut être que pire qu’aujourd’hui.
    Kafka, Beckett, n’en croiraient par leurs yeux.

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  10. neomars neomars

    Il ne nous reste plus qu’à lancer un référendum d’initiative populaire pour les aider à s’unir sur la base de leur seul point d’accord: la peur de la mise sous tutelle !

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  11. Trésorier Trésorier

    La métropole a été victime d’un doble compromis sous la pression des antimétropole :

    – compromis de l’Etat qui a maintenu les conseils de territoire, refusé l’élection directe des conseillers métropolitains, multiplié les structures parasites ;
    – compromis de Gaudin, identique à ce qui s’était passé au niveau de MPM : sur-représentation des communes au Conseil, dotations aux communes, compétences déléguées, compétences métropolitaines sus vétos des maires.

    Bref, tout changer pour que rien ne change, système ruineux financièrement et qui a vidé de sa substance la métropole. Comme on l’avait fait de MPM.

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