La longue chute de Jean-Noël Guérini

Enquête
par Jean-Marie Leforestier & Benoît Gilles
le 14 Mar 2021
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De presque maire de Marseille à prévenu dans une affaire de prise illégale d'intérêts ce lundi 15 mars, le destin de Jean-Noël Guérini a basculé en douze ans d'enquête judiciaire. La chute du baron socialiste a emporté avec elle une bonne part de la gauche départementale.

Jean-Noël Guérini et son avocat Dominique Mattei en 2016. (Photo : BG)
Jean-Noël Guérini et son avocat Dominique Mattei en 2016. (Photo : BG)

Jean-Noël Guérini et son avocat Dominique Mattei en 2016. (Photo : BG)

Ce lundi, Jean-Noël Guérini a rendez-vous avec son destin. Dans la grande salle du palais Monthyon équipée pour accueillir ce procès monstre, il va s’asseoir sur le banc des prévenus pour l’épilogue d’une affaire qui depuis 12 ans porte son nom. Guérini. Ce nom est un stigmate. Le symbole d’une façon de faire de la politique, hâtivement attribuée à des mœurs locales, mêlant sans cesse intérêts publics et privés, y compris familiaux et des entrepreneurs plus ou moins recommandables. Comme pour la députée Andrieux avant lui, ce nom est désormais le symbole d’un clientélisme structurel, devenu insupportable, condamnable.

Pendant un mois, les magistrats auront face à eux un élu, toujours ceint de l’écharpe tricolore de sénateur de la République. Depuis douze ans, au gré des soubresauts de l’enquête judiciaire et des successions de magistrats, Jean-Noël Guérini n’en finit plus de chanceler sans jamais vraiment tomber. À 69 ans, il est toujours dans le jeu politique, jadis au centre, aujourd’hui en coulisses. L’issue de ce procès risque de sceller définitivement sa carrière, s’il est condamné à une peine d’inéligibilité.

De porteur de serviette à patron du CG13

Dans les longues heures d’instruction où les différents volets de l’affaire seront disséqués par le tribunal, il aura tout loisir de remonter le fil de ce destin politique que cette affaire hors norme a définitivement brouillé. L’enfant de Calenzana débarque à cinq ans au Panier dans ce fief corse où il a fait ses armes politiques au côté de son oncle Jean-François Guérini. Avec lui, il a appris à jouer à l’infini la partition du service rendu, de la recommandation, de la pression amicale pour obtenir des emplois, un logement. Conseiller municipal de Gaston Defferre dès les années 1970, il se décrit lui-même comme “un porte-serviette” du maire auprès de qui il gravit patiemment les échelons du parti.

Petit employé de l’OPAC 13, le bailleur social du département, il finit à 31 ans conseiller général sur les terres de son oncle, puis président de l’office et enfin président du conseil général. Condamné par la justice, son prédécesseur François Bernardini est contraint de quitter son poste en 1998. Il cherche quelqu’un sans réelle envergure pour le remplacer, le temps, croit-il, d’une parenthèse judiciaire. Cela tombe sur Jean-Noël, ce Marseillais que l’on moque volontiers pour son parler haut et ses manières frustes. Son mérite sera de prendre la mesure du poste et du pouvoir qu’il offre, nanti de deux milliards d’euros de budget annuel. Il va s’y accrocher, prendre la fédération et partir à la conquête de la Ville, Graal de tout homme politique local.

Le coup de force de la communauté urbaine

Quand l’enquête démarre en 2009, Jean-Noël Guérini est au faîte de sa puissance. En mars 2008, il lui a manqué moins de mille voix pour rafler la mairie de Marseille à Jean-Claude Gaudin. Il s’est juré d’y revenir six ans plus tard pour enfin faire tomber un trône qui a vacillé. La même année, il se fait réélire président du conseil général et réussit à propulser un socialiste, Eugène Caselli, à la tête de la communauté urbaine, en lieu et place de Renaud Muselier qui a pourtant battu Guérini dans son secteur et, ce faisant, offert la Ville à Gaudin.

Dans l’assemblée intercommunale siègent des élus locaux que Jean-Noël Guérini connaît bien. Avec l’aide aux communes du conseil général, il sait répondre à leurs attentes. Quant à Gaudin lui-même, il ne voit pas d’un si mauvais œil la chausse-trape qui s’ouvre sous les pieds de son dauphin désigné. Secrètement, Guérini convainc des élus hors Marseille de ne pas porter leur suffrage sur le candidat de droite. Gaudin sait-il et laisse-t-il faire ? Nul ne sait. “Aujourd’hui encore, je ne connais pas l’alchimie de ce vote, note un acteur de premier plan de l’époque. Elle est trop complexe pour que quelqu’un puisse complètement la décrypter, même si certains le clament.”

Après l’élection municipale et la présidence de la communauté urbaine, Guérini est une menace, Gaudin le craint.

Ce coup de force politique va paradoxalement précipiter la chute de Jean-Noël Guérini. “2008, c’est un coup de canif dans le contrat qu’il avait avec Jean-Claude Gaudin, poursuit cet homme politique. C’est la fin d’un partage des pouvoirs accepté qui était aussi le garant d’une certaine paix sociale. L’un n’embêtait pas l’autre au département et l’autre n’embêtait pas l’un à la mairie. Après l’élection municipale et la présidence de la communauté urbaine, Guérini est une menace, Gaudin le craint.”

L’affront fait au dauphin

L’équipe Muselier ne digère pas l’affront fait à son champion. Ses lieutenants, le maire des 4e et 5e arrondissements Bruno Gilles et l’avocat et élu Xavier Cachard ont vu de près les méthodes des deux frères. Dans son livre, Les Nouveaux parrains de Marseille, Xavier Monnier décrit comment des voyous interviennent dans la campagne pour faire le coup de force dans un bar du Camas. Les amis d’Alexandre trouveront en face d’eux d’autres gros bras. Les gens qui savent mettent un pluriel au nom de famille. Jean-Noël ne monte pas sans Alexandre, le plus craint des deux hommes.

Car l’affaire Guérini n’est pas celle d’un seul homme. Depuis leurs débuts, Jean-Noël doit son ascension à son frère. L’affaire Guérini est surtout celle de ce dernier. Sur les bancs des prévenus, c’est celui qui doit répondre des charges les plus lourdes quand celles pour lesquelles son frère est poursuivi ont fondu au fil de l’instruction.

Si Alexandre Guerini préfère l’ombre, il est l’artisan de toutes les victoires électorales, dans les scrutins publics comme au sein du parti. Son aîné a choisi les mandats électifs, lui a fait carrière dans le privé. Ses entreprises progressent et se diversifient à mesure qu’elles emportent de nombreux marchés publics. Encarté au Parti socialiste dès le début des années 1970, il vit la politique en coulisses, au service des intérêts de son frère… et des siens.

“Un système mis en place pour détourner des sommes considérables”

Si je venais à signer ce courrier, je n’engagerais pas que moi, mais aussi mes proches, et cela je ne le puis.

L’auteur de la lettre anonyme de 2009

Quelques mois plus tard, le destin des Guérini va basculer. Le 2 février 2009, une lettre anonyme – la première d’une série – atterrit au parquet de Marseille sur le bureau du procureur d’alors, Jacques Dallest. Jean-Noël Guérini jurera un temps que son ennemi de droite en est l’auteur, parmi d’autres accusations. Dans une police de machine à écrire, l’auteur décrit “un système mis en place pour détourner des sommes considérables non pas pour financer des campagnes électorales ou un parti politique, mais pour enrichir personnellement deux hommes et leurs complices”. Après une longue liste d’exemples, il conclut : “Si je venais à signer ce courrier, je n’engagerais pas que moi, mais aussi mes proches, et cela je ne le puis.”

L’affaire judiciaire qui s’ouvre prend très vite un tour public. Renaud Muselier fait de la communauté urbaine le théâtre de ses dénonciations d’un système de corruption semblable à l’emprise mafieuse en Italie. Le dossier transpire largement dans la presse, dans l’hebdo satirique Bakchich, sur Mediapart, dans les colonnes de La Provence et à l’occasion dans le tout jeune Marsactu. Tout ce qui est relaté n’est pas forcément illégal, la justice elle-même en écartera une bonne partie, mais les contenus jettent une lumière crue sur les mœurs politiques d’un des deux hommes les plus puissants du département.

Les “Bouches-du-Nord”

La déflagration ne se fait pas attendre. Les gardes à vue, notamment celle d’Eugène Caselli en février 2011, et les perquisitions s’enchaînent. Au sein du Parti socialiste, l’inquiétude monte mais l’édifice tient. Jean-Noël Guérini contrôle la puissante fédération départementale. Ses 10 000 cartes revendiquées lui permettent d’influer grandement sur les votes internes et les trajectoires nationales et locales des unes et des autres. “On appelait cela les Bouches-du-Nord, se remémore avec le sourire Michel Amiel, compagnon de route de toujours de Guérini et actuel maire des Pennes-Mirabeau. Avec la fédération du Nord, nous pouvions faire et défaire les congrès.”

À Paris, on hésite. Le secrétaire national à la rénovation du parti qui rêve de représenter les siens à la présidentielle se sent pousser des ailes. Rendu le 8 décembre 2010, le brûlot d’Arnaud Montebourg, nourri de témoignages directs, d’articles de presse et de quelques fuites du dossier judiciaire est une salve contre les pratiques politiques de Jean-Noël Guérini. Pour le député et président du conseil général de Saône-et-Loire, pas de doutes : “un système de pression féodal reposant sur l’intimidation et la peur” s’est mis en place dans les Bouches-du-Rhône. Le cas Guérini est un enjeu national à moins de deux ans de la présidentielle.

Jusqu’au sommet de l’État

Le rapport est accueilli bien froidement, notamment par Martine Aubry, première secrétaire de l’époque. Le PS tarde à réagir et ne semble pas décidé à remettre de l’ordre dans la “fédé” et encore moins au conseil général. En mars 2011, Guérini est toujours le candidat du parti à la présidence du département. Si quelques-uns de ses fidèles perdent des plumes et leur siège dans la bataille, l’institution reste socialiste. Ceux qui veulent éteindre les contestations font entendre leur petite musique : les affaires, c’est beaucoup de bruit mais ça n’effraie pas les électeurs.

Cette inertie ressemble à un laisser-faire coupable. “J’ai apporté les preuves, 50 documents prouvant les pressions, et la manière dont on terrorisait les élus. Martine Aubry a refusé de les lire. Plus que du déni, c’était une manière de couvrir les pratiques pour moi illégales et de terreur qu’exerçait la famille Guérini sur le Parti socialiste marseillais”, se souvient aujourd’hui encore Arnaud Montebourg.

À l’en croire, l’épisode est de telle ampleur qu’il marquera durablement le parti et peut-être même l’histoire de la Ve République en faisant de François Hollande le candidat socialiste.

“Lors des primaires pour la présidentielle de 2012, je suis arrivé troisième. J’avais à choisir de m’allier au vainqueur. On m’a beaucoup reproché d’avoir choisi Hollande plutôt qu’Aubry. L’élément central de la décision fut l’affaire Guérini. Je ne pouvais suivre une candidate qui avait soutenu les pratiques mafieuses dans la fédération du PS des Bouches-du-Rhône. J’avais été lanceur d’alerte, mais avais subi 6 procédures (victorieuses pour moi) de Guerini et Aubry est allée jusqu’à témoigner contre moi pour avoir violé le secret de l’instruction. J’ai finalement eu un non-lieu mais l’affaire Guerini et ses complicités au sommet du PS de l’époque étaient très préoccupantes. Hollande n’était peut-être pas le meilleur choix politique mais j’ai suivi mes convictions éthiques. Quand nous nous sommes vus avec Martine Aubry pour tenter un accord entre les deux tours, la discussion n’a quasiment porté que là-dessus. Et la discussion a tourné à la franche engueulade..”

“Lui, c’est lui ; moi, c’est moi”

Attendue, la convocation en vue d’une mise en examen de Jean-Noël Guérini intervient finalement le 8 septembre 2011. Reçu par les juges Charles Duchaîne et Pierre Philippon, Jean-Noël Guérini lance un refrain qu’il développera des années durant : “Lui, c’est lui ; moi, c’est moi”. Le discours ne convainc pas ses interlocuteurs qui poursuivent dans leur volonté. La confirmation de leur décision crée des déflagrations. Au conseil général, plusieurs élus dont les anciens députés Michel Pezet et Jeanine Ecochard mais aussi Marie-Arlette Carlotti lui demandent de démissionner. “Sa faute est, en se maintenant coûte que coûte à la tête de l’exécutif départemental, de ne pas assumer ses responsabilités et de mettre en danger le parti et l’institution”, écrit cette dernière à ses collègues.

Sous pression, Jean-Noël Guérini nomme un président délégué chargé d’une grande partie de ses prérogatives. Décidée hors de tout cadre légal, l’opération est cassée par le tribunal administratif saisi par l’opposante de droite d’alors, Martine Vassal. Bravache, Jean-Noël Guérini décide de revenir à plein-temps et résiste même à son parti, qui demande désormais sa démission. Dès lors, sa stratégie devient claire : survivre politiquement tout en n’oubliant pas de glisser quelques cailloux dans la chaussure du Parti socialiste qui se réveille à l’approche des municipales 2014.

Le coup de Trafalgar de 2014

Le sortant de droite, Jean-Claude Gaudin paraît usé, lâché par Renaud Muselier qui a pris une éphémère retraite politique. En 2013, Solférino met sous tutelle la fédération socialiste pour tenter de sortir l’élection des griffes de Jean-Noël Guérini. Désigné après des primaires internes mortifères, Patrick Mennucci sait que le président du conseil général va tout faire pour lui savonner la planche. Une tête de liste de secteur se souvient : “Ça a commencé par une liste de bric et de broc [menée par Jacques Soubeyrand et Lisette Narducci, ndlr] pour nous faire lever un point, un point et demi. Puis il y a eu cet accord scélérat et ridicule.”

Entre les deux tours, la maire sortante des 2e et 3e arrondissements Lisette Narducci, fidèle parmi les fidèles de Jean-Noël Guérini, choisit l’alliance avec Jean-Claude Gaudin. Le PS perd tout espoir de remporter le secteur et ne garde que deux mairies de secteur.

La gauche locale est en miettes, fracturée en mille égos. Les affaires s’accumulent contre les barons socialistes du département. Une dizaine de parlementaires ou d’ex-parlementaires sont poursuivis par la justice dans des affaires de probité, à la faveur d’un grand lavage de linge sale en place publique. Le parti, libéré de sa tutelle, est toujours à la main de Jean-David Ciot, un ancien membre du cabinet de Jean-Noël Guérini devenu député d’Aix en surfant sur la vague rose en 2012. Aux sénatoriales, le PS se fait tailler des croupières par La Force du 13, le parti créé par Guérini. Trois sièges sur huit sur son seul nom et statut, autant que la droite de Jean-Claude Gaudin et Maryse Joissains. La gauche unie ne sauve sur le fil qu’un maigre siège.

Jean-Noël Guérini lors de sa campagne départementale en 2015. (Photo : JML)

La chute du département

Aux départementales suivantes, le parti socialiste ne peut pas ou ne veut pas se séparer de Jean-Noël Guérini. S’il soutient pour la forme l’ex-juge d’instruction Laurence Vichnievsky dans le canton du Panier face à lui, un peu partout ailleurs il laisse le champ libre à ses fidèles, socialistes ou communistes, parfois allié à des candidats investis par la Force du 13. Au Panier, en binôme avec Lisettte Narducci, Jean-Noël Guerini reste conseiller départemental. Mais il doit laisser son fauteuil de président à la droite. Martine Vassal, jusqu’ici adjointe discrète de Jean-Claude Gaudin, obtient, en ce mois de mars 2015, son titre de “tombeuse de Guérini”. Une révolution politique : la gauche locale détenait l’institution sans discontinuer depuis plus d’un siècle.

Ce qui a conduit à la disparition presque entière du parti socialiste dans les Bouches-du-Rhône, c’est l’affaire elle-même et le comportement de Jean-Noël Guérini.

Patrick Mennucci

Quelques mois plus tard, elle ne gère plus aucune des institutions importantes du territoire. En un an et demi, bien aidée par un quinquennat Hollande qui déçoit ses électeurs, la gauche a perdu la métropole, le conseil général et la région dont Michel Vauzelle a quitté la présidence. “Ce qui a conduit à la disparition presque entière du parti socialiste dans les Bouches-du-Rhône, c’est l’affaire elle-même et le comportement de Jean-Noël Guérini. Il n’a eu de cesse de chercher l’auteur de la lettre anonyme et prendre les uns pour taper sur les autres”, regrette Patrick Mennucci.

La tâche inachevée du juge Duchaîne

Judiciairement, le juge Charles Duchaîne, dans deux instructions distinctes, a poursuivi Jean-Noël Guérini sur tous les dossiers qui lui sont tombés sous la main. Décharges, marchés publics, maisons de retraite… Pour lui, Jean-Noël Guérini, dont il a obtenu la levée de l’immunité parlementaire deux ans auparavant, est notamment partie prenante d’une “association de malfaiteurs en vue du trafic d’influence”, une infraction punie de dix ans d’emprisonnement. Il lui reproche d’avoir “toléré les immixtions sans titre de son frère Alexandre dans le règlement d’affaires relevant de la compétence du département à des fins de clientélisme servant leurs intérêts communs”.

Mais le juge Duchaine est parti en septembre 2014 en laissant des dossiers touffus mais inachevés. Le dossier dit des décharges, celui-là même qui arrive à l’audience ce 15 mars 2021 est le plus avancé. Charles Duchaîne a eu le temps de signifier la fin de l’enquête au parquet mais celui-ci ne rend pas de réquisitions, comme il aurait dû. Aucun renvoi devant un tribunal n’est donc décidé. Les avocats des différents mis en examen poussent de nombreux recours. L’instruction est transmise à une nouvelle juge Christine Saunier-Ruellan. Celle-ci ne se hâte pas, le parquet met près de deux ans à rendre ses réquisitions dans lesquelles il demande des actes d’enquête supplémentaires et commence à élaguer.

Un bouchon dans le marigot local

Pendant que la justice traîne, Jean-Noël Guérini flotte tel un bouchon dans le marigot politique local. Il assiste aux séances du département mais se garde bien de toute intervention publique. Tout aussi discret à la chambre haute où il est réélu le 27 septembre dernier, il fait pourtant toujours vivre ses réseaux auprès des élus, grands électeurs des sénatoriales. Patrick Mennucci, qui ne compte pas parmi ses amis, ne peut que constater l’efficacité politique de cette stratégie : “Au fond, l’acharnement qu’il a eu à rester et se protéger lui a réussi. Il faut souligner sa force de caractère qui fait qu’il est toujours sénateur.”

Il faut attendre 2017 et un troisième juge, Fabrice Naudé, pour que l’enquête redémarre. Le juge d’instruction se voit confier une serpe. Sa mission ? Couper toutes les herbes folles du dossier pour ne garder que les plantes les plus enracinées. Les avocats des mis en examen comme des parties civiles notent son pragmatisme et sa minutie.

Renvoyé pour prise illégale d’intérêts

Sa mission s’achève au début de l’année 2020 et, conformément aux réquisitions du parquet, Jean-Noël Guérini n’est finalement que peu inquiété. L’association de malfaiteurs n’est plus. Le pan sur l’immixtion de son frère dans les affaires du conseil général est envoyé à la corbeille. Au sujet du bailleur social du département, 13 Habitat, le juge Naudé note ainsi :

“Les échanges téléphoniques interceptés, à l’origine des décisions de mise en examen intervenues en
l’espèce, en dépit de leur contenu non équivoque, souvent spectaculaire et en tout état de cause symptomatique de la pratique des passe-droits et au-delà d’une certaine façon “de faire de la politique”, apparaissent cependant à eux seuls insuffisants à caractériser la matérialité des délits de corruption et/ou trafic d’influence poursuivis en l’espèce”.

Ce lundi 15 mars 2021, Jean-Noël Guérini va ainsi se présenter à un procès qui porte certes son nom, mais ne devrait le concerner directement que quelques jours. On lui reproche seulement une prise illégale d’intérêts, à savoir la préemption au titre du département d’un terrain à proximité de la décharge du Mentaure. Le tout au profit supposé de son frère. Une accusation dont il espère encore se défaire et ainsi enrayer sa chute. Après tout, en juin, le canton du Panier est encore remis en jeu, 70 ans après la première élection de son oncle.

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Jean-Marie Leforestier
Journaliste | jm.leforestier@marsactu.fr
Benoît Gilles
Journaliste

Commentaires

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  1. Ysabel Bels Ysabel Bels

    Il doit en tenir plus d’un par la barbichette pour avoir pu se maintenir

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  2. Ysabel Bels Ysabel Bels

    De la part de J-N Guérini, tous les moyens sont ou ont été bons pour écarter les curieux, les furieux les indignés et ceci dès qu’il a été adoubé maire de secteur du 2-3 lors de l’élection de 1983, année où Gaston Deferre avait failli perdre la mairie de Marseille pour cause de programme commun. rappelez-vous . Acheter à vil prix, écarter les gêneurs , les faire muter, Exemple : en1983, Changement de direction à la MPT de l’évêché Léo Lagrange ! Comme c’est étrange ; mutation d’office d’un éducateur de rue … Tout ça parce qu’un petit collectif d’habitants venait de se constituer … Ooh pas bien dangereux mais bon vaut mieux tout contrôler.
    Il faut avoir du courage, physique comme moral pour s’opposer et pour dénoncer ou bien il faut voir la politique comme un sport de combat . et là c’est vrai comme dit Patrick Menucci cité dans l’article, Guérini a fait preuve d’un grande ténacité et d’une grande force de caractère ! Tout ça pour quoi ? Acheter une paix sociale dégueulasse qui ne réglait rien et surtout pas les problèmes de fond.

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  3. MarsKaa MarsKaa

    Vous êtes au top Marsactu ! Timing parfait.
    Très bon article, qui expose clairement les faits, les acteurs, le contexte et les évolutions.
    Où je découvre personnellement que l’affaire Guerini a eu un impact sur la victoire de Hollande au sein du PS !
    Et où l’on voit que la justice a trop traîné pour finalement ne pas garder grand-chose contre JN Guerini. C’est dingue.

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  4. TINO TINO

    Merci pour cet article fouillé et instructif.

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  5. Jacques89 Jacques89

    Chapeau à l’Equipe ! Il fallait au moins ça pour remettre les pendules à l’heure avant que sonne le glas. Mais je m’avance peut-être un peu… nous verrons bien si le petit Jean-No fera autant de simagrées que le grand Nico. Faut dire qu’il n’a pas la même équipe de manipulateurs derrière lui… et que le PS ne peut vraiment pas tomber plus bas qu’il n’est. Probablement encore un test pour la justice, mais avec des juges qui n’ont pas à faire la démonstration de leur intégrité.

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  6. Pussaloreille Pussaloreille

    Bravo en effet pour votre suivi tenace du dossier et pour ce décryptage à point nommé. Mais apprendre au final que le procès de JNo n’est plus vraiment le sien… Ça décourage !

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  7. Dark Vador Dark Vador

    C’est une véritable litanie à laquelle nous sommes malheureusement habitué : les procès des hommes politiques s’étirent sur des années. Nos chers élus savent (bien conseillés) jouer à merveille avec toutes les procédures (et astuces) mises à la disposition du justiciable dont le commun des mortels ne bénéficie pas. A l’arrivée? Presque rien souvent. JN Guérini sera sans doute condamné à une peine aménageable, beaucoup de sursis, un peu d’argent et même s’il est déclaré inéligible (c’est rarement le cas reconnaissons le), il s’en contre fou. A soixante dix ans il aura largement réussi sa vie professionnelle avec la cagnotte qui va avec. Retraité heureux, il aura eu raison d’avoir “toujours fait confiance à la justice de son pays”…

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  8. Zumbi Zumbi

    Beau boulot que ces articles qui remettent tout en perspective, car dans les semaines à venir ces gens feront tout pour nous perdre dans les détails et nous embrouiller dans les artifices de procédure ; c’est toujours là dernière ligne de défense, chez tous les chefs de bande ou anciens présidents…

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  9. Alceste. Alceste.

    Nous sommes dans un pays de Droit , et heureusement. Bien sûr que “notre” ami Jean NONO va jouer sur toutes les ficéles , mission au Procureur de démonter ce système et de le faire condammer en étant encore plus accrocheur. Par chance c’est dans l’air du temps.

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  10. didier L didier L

    La fin d’un système ou simplement la fin d’un baron local et de ses proches.

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  11. Andre Andre

    Une affaire qui en dit long sur les pressions, les jeux d’influence, les calculs à court terme, les passes droit qui parfois résument la vie politique.
    Pourquoi sept ans entre l’instruction et le procès avec une telle inertie judiciaire pour une si grosse affaire?
    Pourquoi le soutien de Martine Aubry, la grande prêtresse de la rigueur politique?
    Au passage, on rappellera que Lisette Narducci, ancienne maire du deuxième secteur et proche de Guerrini fait aujourd’hui partie de la majorité municipale au titre de la liste Samia Ghali, elle aussi issue de l’entourage du prévenu….
    Je ne sais quel sort sera fait à ce dernier après que les chefs d’accusation aient été élagués: inéligibilité ?(il a fini sa carrière ) une forte amende ?( lui et son frère en ont de côté pour la payer), le bracelet électronique pendant un an? ( il en rigolera )….
    Finalement, ce ne sera pas si grave pour lui pendant que ses anciens acolytes politiques pourront continuer leur carrière. La vie politique locale ne s’en trouvera que peu changée…

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  12. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    10 000 cartes “revendiquées” par le PS 13 en 2010. 550 aujourd’hui. Sic transit gloria mundi.

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