La justice enquête sur la course aux masques de la métropole en 2020

Info Marsactu
le 9 Déc 2022
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Le siège de la métropole Aix-Marseille-Provence a été perquisitionné ce mercredi dans le cadre d'une enquête préliminaire diligentée par le parquet de Marseille. Les investigations portent sur plusieurs marchés de fournitures de masques passés par l'institution en pleine épidémie de Covid, en 2020.

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L'usine Fil rouge, installée dans un hall du parc Chanot en mai 2020. (Photo : Emilio Guzman)

L'usine Fil rouge, installée dans un hall du parc Chanot en mai 2020. (Photo : Emilio Guzman)

Dans la rue et les transports en commun, les masques sont de retour. Le regain épidémique remet au goût du jour cet accessoire désormais banal. Les passants masqués de bleu pour la plupart, nous tous, avons oublié la folie des premiers mois de l’épidémie, en 2020. L’outil de prévention était alors bien rare. En plein entre-deux-tours des élections municipales, il est même devenu support d’une course à l’échalote entre collectivités pour être le premier à équiper sa population du tissu protecteur.

Cette course et son versant financier intéressent à présent la justice. Ce mercredi, des enquêteurs de la police judiciaire ont perquisitionné la tour La Marseillaise où la métropole a installé la majeure partie de ses bureaux dont ceux de sa présidente et de son cercle rapproché. Selon nos informations, au 14e étage de la tour, ils ont demandé plusieurs pièces liées aux marchés passés par la métropole en 2020. Certaines de ces pièces ont été saisies, indique-t-on du côté de la métropole. Cet acte d’enquête intervient dans le cadre d’une enquête préliminaire, ouverte par le parquet de Marseille, a confirmé à Marsactu la procureure de la République Dominique Laurens.

Selon nos informations, la procédure fait suite à une dénonciation anonyme visant plusieurs fonctionnaires de l’institution intercommunale. Pour l’heure, rien ne filtre sur le périmètre exact de cette enquête préliminaire et les infractions qu’elle cherche à mettre à jour.

La ruée vers les masques

On se souvient qu’à la même époque, la Ville de Marseille achetait des masques à prix d’or, pour 5,50 l’unité, fabriqués en Bosnie par la marque HOM, comme Marsactu l’avait révélé. Ce prix prohibitif n’avait pas empêché la collectivité d’en commander pour 1,35 million d’euros. Dans le même temps, à la région, Renaud Muselier faisait jouer ses relations avec la CMA-CGM pour dérouter des cargaisons vers Marseille.

Martine Vassal, avec sa casquette départementale, s’était pour sa part fait souffler une livraison de masques en provenance de Shanghaï par la préfète de la région Grand-Est. Mais, après la fièvre du jetable, le masque réutilisable fabriqué en France a eu les faveurs des édiles. La métropole a alors eu recours à une belle idée, au moins sur le papier : la fabrication maison via un atelier d’insertion.

La métropole avait installé une usine de confection dans un hangar du parc Chanot.

Comme Marsactu en avait fait le récit, l’institution, aussi présidée par Martine Vassal, avait loué pour plusieurs centaines de milliers d’euros un des hangars du Parc Chanot. Une usine de confection y avait été installée par le bureau d’études Le fil rouge, dirigé par Anne Carrai, qui était intervenue selon les dires de l’élue comme “formatrice” dans l’entreprise de son père, où cette dernière a fait ses premières armes.

Se renflouer avec des masques triple épaisseur

Selon nos informations, les enquêteurs s’intéressent particulièrement à ce marché qui avait permis d’équiper les agents du département comme ceux de la métropole. Les pièces en surjet avec petit drapeau tricolore devaient également être distribuées aux communes qui en faisaient la demande.

Là encore, le prix était prohibitif puisque Anne Carraï reconnaissait avoir vendu 30 000 masques à 5,25 euros l’unité. À terme, l’atelier semi-industriel de Chanot était censé faire tomber les coûts de moitié. Mais, la manne prophylactique siglée aux logos des deux institutions se mélangeait allègrement à des masques d’autres provenances, achetés via d’autres marchés par la métropole. L’élan de générosité avait toutefois permis au bureau d’étude d’obtenir de confortables commandes, révélées quelques mois plus tard par la cellule investigation de Radio France, qui écrivait alors :

“La petite société de confection de vêtements qui, elle aussi, avait rencontré des difficultés financières ces dernières années avant de se renflouer, a fourni à la métropole 272 000 masques en tissu, pour un montant de 696 000 euros hors taxes. Quant au conseil départemental des Bouches-du-Rhône, il a acheté à la société marseillaise 216 000 masques entre début du confinement et le 20 novembre 2020, facturés 504 000 euros hors taxes.”

C’est l’ensemble de ces montages où urgence et vieilles connaissances se nouaient fil à fil que la justice cherche à démêler. Dans la fièvre post-déconfinement, le rêve de relancer la filière textile locale avec les masques triple épaisseur a vite été oublié.

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Commentaires

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  1. Alceste. Alceste.

    Cela sent l'”engambi” a plein nez.Bas les masques !

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  2. GingerPoco GingerPoco

    Les fameux en bec de canard, bleu turquoise. Masquez- vous et fermez-la. Encore une histoire drôle.

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  3. MarsKaa MarsKaa

    Comment dire ? En fait, plus rien ne nous surprend. Ce que relate l’article nous paraît banal et évident. On sait que ça se passe comme ça à Marseille, dans les Bouches-du-Rhône. On se lasse de s’indigner à chaque nouvelle révélation.
    Ce qui est un symptôme grave ; on ne devrait pas s’habituer, pas se résigner.

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