La CGT appelle l’État à sauver Ascometal, usine “en avance” sur la décarbonation

Actualité
le 26 Avr 2024
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En redressement judiciaire, l'aciérie emploie 330 personnes à Fos. La CGT et la CFE-CGC demandent aux pouvoirs publics de s'impliquer dans la poursuite de l'activité via une enveloppe de 150 millions d'euros. Ils considèrent l'usine comme un modèle de la décarbonation que l’État devrait soutenir.

Les syndicalistes d
Les syndicalistes d'Ascometal unis pour la poursuite d'activités le 25 avril 2024. (Photo : PID)

Les syndicalistes d'Ascometal unis pour la poursuite d'activités le 25 avril 2024. (Photo : PID)

330 emplois directs sont en jeu, 1000 en tout sur le bassin de Fos avec ceux des sous-traitants selon la CGT. Les syndicats CGT et CFE-CGC se mobilisent pour la poursuite de l’activité de l’usine Ascometal de Fos-sur-Mer qui produit des aciers spéciaux à partir de ferrailles recyclées. Fin mars, le tribunal de commerce de Strasbourg a placé Ascometal, filiale lorraine de Swiss Steel – qui a d’autres sites dans le Nord et l’Est de la France – en redressement judiciaire. Ce jeudi 25 avril avant midi, la juridiction devait recevoir les éventuelles offres de reprises. Faute de quoi, elle pourrait déclarer la liquidation d’Ascometal.

En écho à cette échéance, les syndicats ont invité la presse pour expliquer leur manifestation d’intérêt déposée dans le cadre de ce dossier, pour tenter de convaincre de tribunal d’étudier un plan de continuation de l’activité et éviter la fermeture de l’usine.

Gouvernance partagée avec les pouvoirs publics

Midi passé de quelques minutes à la maison des syndicats de Fos, les journalistes sont reçus avec un léger retard dans le bâtiment anguleux de béton, enveloppé dans un léger mistral. “Nous sommes toujours plus en avance que ceux qui ont amené l’usine de Fos et le groupe Ascometal dans cet état”, grince Olivier Mateu, le secrétaire général de la CGT des Bouches-du-Rhône. La société vit son troisième redressement judiciaire en une décennie. Le syndicaliste enjoint l’État à s’impliquer pour permettre la poursuite de l’activité.

Dans le cadre de la manifestation d’intérêt déposée par les syndicats, ils proposent “une gouvernance élargie aux représentants des salariés, au maire de Fos et au député de la circonscription, sous l’égide du préfet”, expose Olivier Mateu. De quoi permettre “un état transitoire qui ferait perdurer la continuité de l’activité avant qu’un repreneur ne se manifeste”, explique Serge Bestion, élu CFE-CGC au comité social et économique (CSE) d’Ascometal Fos. “Ce plan de continuation de l’activité sert à ne pas laisser l’usine sans solution de poursuite d’activité, sans toutefois faire de l’ombre à des offres de reprises qui pourraient avoir été déposées ce jeudi”, affirme François Barges, le délégué CGT du site.

150 millions quand on parle d’industrie, ce n’est rien. Le gouvernement nous annonce des milliards pour la décarbonation et sacrifierait une usine qui est en avance sur son temps, ce serait un scandale.

Olivier Mateu

La réussite de la proposition syndicale passerait aussi par l’intervention financière des pouvoirs publics. “Nous avons estimé qu’il faudrait investir 150 millions d’euros pour Ascometal Fos, détaille François Barges. 50 millions de recapitalisation, 20 millions pour assainir les dettes, 50 millions d’investissements et 30 millions pour la trésorerie.” Le syndicaliste compte sur l’État, ainsi que la banque publique d’investissement, pour remplir l’enveloppe et se porter garants. Des collectivités pourraient aussi selon lui participer. “Les plans nationaux et régionaux pour le financement de l’industrie existent et devraient participer aux besoins de financement d’Ascometal Fos”, considère la CGT dans un communiqué. “150 millions quand on parle d’industrie, ce n’est rien. Le gouvernement nous annonce des milliards pour la décarbonation et sacrifierait une usine qui est en avance sur son temps, ce serait un scandale. Ce n’est pas une question d’argent, c’est une question de volonté politique”, tonne Olivier Mateu.

“Souveraineté industrielle”

L’usine de Fos fait en effet figure de poisson pilote dans le domaine de la décarbonation des industries voulue par le gouvernement, avec l’objectif d’une neutralité carbone en 2050. Son four électrique – remis à neuf depuis quelques mois – permet une production moins carbonée que les équipements sidérurgiques traditionnels fonctionnant au charbon. Comme chez l’usine voisine d’ArcelorMittal, qui prépare d’ailleurs l’électrification d’une partie de sa production, Ascometal Fos dispose d’un capteur expérimental de CO2 dans ses fumées de combustion. Le carbone ainsi récupéré entre dans la composition d’un méthane de synthèse, injecté dans le réseau de gaz.

La “souveraineté industrielle” est l’autre thème sur lequel Olivier Mateu appelle le gouvernement à “passer de la parole aux actes”. Parce que le ministre de l’Industrie, Roland Lescure, affiche une volonté de relocalisation en France de la production industrielle, il serait de bon ton pour le syndicaliste que ce dernier soutienne l’usine de Fos. Il la considère comme une partie prenante d’un “secteur stratégique pour la souveraineté du pays”. Outre l’automobile, Ascometal a notamment comme client des industries de l’armement. Un secteur dans lequel le ministre des Armées Sébastien Lecornu souhaite faire de l’interventionnisme, envisageant depuis fin mars d’adresser des réquisitions aux firmes du secteur pour orienter leur production.

Contactés, ni la préfecture, ni le ministère de l’Industrie, n’ont répondu à nos sollicitations dans le temps imparti à la publication de cet article. Ce jeudi soir, au moment du bouclage de cet article, nous ne disposions pas d’informations concernant d’éventuels repreneurs déclarés auprès du tribunal de commerce de Strasbourg. L’avenir d’Ascometal Fos et de ces travailleurs est plus que jamais incertain.

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