Insécurité à Marseille : des libéraux piquent le masque de Batman

Insécurité à Marseille : des libéraux piquent le masque de Batman

De bon matin, on aurait pu penser à un délire entre amis qui survit à une nuit un peu trop arrosée : "Faudra-t-il un Batman pour sauver Marseille ?". On s'y voyait déjà, la batmobile déboulant sur le Vieux-Port, le bat-signal au dessus de Notre-Dame de la Garde, l'homme chauve-souris évitant un énième règlement de comptes et remettant les coupables à la police. Bim, retour à la réalité avec la vision de Jean-Louis Borloo en simili cuir.

Créé dans la nuit, suite à la visite ministérielle d'hier, le collectif "Un batman pour Marseille" est le dernier-né de cette mode des collectifs citoyens qui fleurissent dans la ville. L'entité emprunte toutes les caractéristiques de cette nouvelle forme de mobilisation : un nom accrocheur, un visuel frappant pour leur blog, une pétition en ligne et un collectif citoyen, apolitique et anonyme derrière.

Chauve-souris libérales

Après les Marmottes, qui demandaient l'extension des horaires nocturnes de transport en commun, les chauve-souris débarquent, espérant connaîtrele même écho médiatique et surtout politique.Depuis, des collectifs fusent sur de nombreux thèmes, des plus généraux aux plus précis. Souvent le fruit d'un coup de gueule, d'une poussée d'indignation. Dans le cas présent, c'est contre la "surenchère de communication opportuniste et de la réunionite politique qui n’ont jamais été la solution attendue". Soucieux de ne pas rester sur une pure opposition, tout collectif se doit de formuler quelques propositions. "Un Batman pour Marseille" appelle à "une prise de conscience et une réelle collaboration entre les élus sur le sujet de la sécurité", selon Sylvain Dijon, un des initiateurs. Déjà, les journaux du groupe Hersant – La Provence, puis Nice Matin, Var Matin et Corse Matin – s'emboîtent mutuellement le pas en surfant sur les ailes de la chauve-souris.

Pourtant en parcourant le site, la dimension collective intrigue à la rubrique "Qui sommes nous". Aucun indice sur l'identité des initiateurs ni sur ce qui les rassemble n'apparaît. En revanche, en cliquant sur le logo Paypal qui permet de soutenir financièrement leur initiative, on tombe sur la page de Liberté Chérie, une association qui se définit comme un club "désireux de voir la France se libérer pour mieux appréhender l'avenir". Un autre détail trahissait l'origine de ce mouvement prétendument citoyen : un mail envoyé ce mercredi dès 7h, contenant un message de soutien envoyé par Sylvain Dijon, vice-président de l'Union des Démocrates et Indépendants (UDI) des Bouches-du-Rhône et responsable du parti libéral démocrate PACA. En réalité, il fait partie du trio rédacteur, bien plus qu'un soutien donc.

Chevalier masqué

Autre contributeur à la rédaction des textes, Jean-Baptiste Jaussaud est lui aussi un militant libéral, porte-parole de Liberté Chérie. Il commente : "L'idée est née hier dans la journée. Nous étions 7 jeunes actifs et étudiants. Nous avons planché à trois toute la nuit sur le projet". Interrogé sur l'engagement politique des membres fondateurs du collectif, il commente vaguement :

Il se trouve que l'un de nous est vice-président de l'UDI. Un autre est du Parti radical de gauche. Nous sommes de tendances politiques différentes mais d'accord sur le thème de la sécurité.

Quand on signe une pétition – c'est déjà le cas pour 673 personnes – surtout sur un thème tel que la sécurité, il est toujours mieux de savoir de qui elle émane… Au sein du collectif, on assure que le recours à Liberté Chérie pour récolter des fonds n'est que le fruit de l'urgence. Sans leur faire un procès d'intention, les libéraux auraient pu éviter d'avancer masqué comme le personnage qu'ils ont choisi comme nom…