En année capitale, les artistes galèrent toujours pour trouver du boulot

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le 1 Sep 2013
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En année capitale, les artistes galèrent toujours pour trouver du boulot
En année capitale, les artistes galèrent toujours pour trouver du boulot

En année capitale, les artistes galèrent toujours pour trouver du boulot

Dix ans après le grand mouvement des intermittents du spectacle, la question de leur statut reste sensible. D'autant plus quand celle-ci croise la route d'une capitale européenne de la culture dont les mérites en termes de retombées économiques sont déclinés à toutes les sauces. La semaine dernière, Jacques Pfister, le président de l'association Marseille-Provence 2013 – et de la Chambre de commerce et d'industrie – présentait les résultats d'une étude sur "les retombées des deux premiers épisodes de l'année capitale européenne de la culture sur le territoire – tourisme, consommation, notoriété, emploi, image…" S'il a loué les taux de fréquentation, il n'a pas voulu dire un mot de ses effets sur l'emploi. 

Or, cette question de l'emploi culturel a mobilisé les acteurs locaux de longs mois avant le coup d'envoi mais, pour l'heure, aucun bilan n'existe. Interrogée par nos soins, MP2013 préfère ne pas émettre de chiffres pour le moment, préférant attendre une étude plus approfondie qui devrait être publiée en décembre. Le secrétaire régional du syndicat national des professionnels du théâtre et des activités culturelles, Jean-Michel Cerdan tire un bilan sombre pour les intermittents : "La tendance nationale à la baisse aurait dû être contrecarrée par la capitale européenne or ce n'est pas le cas".

Des effectifs en chute libre

Les premiers éléments dont nous disposons tendent à lui donner raison. La conjoncture était déjà morose en 2008, alors que le label capitale européenne de la culture venait tout juste d'être obtenu, comme le relevait l'agence des arts du spectacle (Arcade) : "Depuis 2005, le nombre de salariés intermittents est en baisse, et ce quel que soit le type d'employeurs". 2013, et les années de préparation de l'évènement n'ont semble-t-il pas permis de redresser la barre.

Entre 2007 et 2013, les données de Pôle emploi  – qui de plus se situent à l'échelon régional – tiennent du texte à trous. Mais la comparaison est nette : tous statuts confondus, le nombre de salariés employés par des entreprises issues du monde du spectacle a été divisé par deux, tombant à 10 000. Pour les employés hors spectacles, l'autre catégorie recensée par Pôle emploi, leur nombre a été divisé par trois.

En revanche, le nombre d'intermittents indemnisés dans la région a augmenté mais lentement. En août 2013, il y avait 7 600 indemnisés en PACA et 3800 dans le département selon Pôle emploi, soit 3% de plus que l'année précédente. "Cela signifie que 92 techniciens et 22 artistes de plus que l'an dernier ont atteint le nombre d'heures demandé pour obtenir le statut d'intermittent", tempère Marie-Claude Zolési, directrice territoriale de Pôle emploi pour les Bouches-du-Rhône

Autrement dit, les effectifs du secteur ont fondu, mais un nombre à peu près constant d'artistes parviennent à décrocher le Graal pour tout intermittent : les cachets suffisants pour bénéficier de l'indemnisation et donc d'une rémunération-plancher en cas de périodes creuses. "Il faut prendre en compte une autre variable, celle du turn over qui est très fort et masque des effets d'autant plus à la baisse, avertit Jean-Michel Cerdan. Les intermittents historiques sont de moins en moins nombreux ici, même les plus connus".

Des emplois, mais pas pour les artistes

À quel niveau la mécanique coince-t-elle ? Dans une note trimestrielle publiée en avril, la Maison de l'emploi fournissait un indice, avec un rapide bilan du guichet spécial MP2013 mis en place par Pôle Emploi. Sur les "575 créations d'emplois à fin mars 2013", seuls 4% concernaient le domaine du spectacle. La note relève que "trois familles de métiers sont les plus demandées par les employeurs dans le cadre des besoins en main d’oeuvre issus des événements relatifs à MP2013. Il s’agit des métiers de l’hôtellerie-restauration, tourisme, loisirs et animation (33% du total des besoins)". L'événement crée donc des emplois, mais pas forcément dans le domaine artistique.

"On a basé la capitale européenne uniquement sur le tourisme, accuse Catherine Lecoq, secrétaire régionale adjointe du syndicat français des artistes interprètes (SFA). En dehors de quelques compagnies, nous n'avons pas eu de retombées. Pire, dans la région, nous aurons à assumer la lourde dette de la capitale qui va s'étaler sur des années". Autrement dit, les budgets accordés à la culture pourraient être grignotés par les rallonges nécessaires pour équilibrer le budget de MP2013. Pour elle, les intermittents sont les grands perdants de cet événement qui a fait la part belle aux bâtiments :

Certes on a un Mucem magnifique mais tous les petits lieux qui sont susceptibles d'employer des artistes n'ont plus un sou.

L'impact en terme d'emplois des grandes expositions et des événéments phares est plus limité qu'il n'y paraît. "Beaucoup d'évènements étaient basés sur le bénévolat, illustre Catherine Lecoq. C'est gravissime de faire une capitale européenne sur le bénévolat. Parfois même les artistes bossent gratis". La seule éclaircie selon elle concerne les techniciens, qui forment la moitié des intermittents, car "il a fallu équiper beaucoup de lieux". Selon Pôle Emploi, les effets de la capitale européenne de la culture ne sont de toute façon pas encore visibles : "L'impact de MP 2013 sur le nombre d'intermittents est pour le moment impossible à évaluer. Du fait de l'obligation de cumuler 507 heures travaillées au cours des 10 mois, nous ne pourrons savoir qu'en 2014 si le nombre d'intermittents a évolué significativement", conclut Marie-Claude Zolési pour Pôle emploi. 

Si l'année n'est pas finie, elle a déjà un goût amer pour une partie du monde culturel. Pour eux, l'année 2013 aura également été synonyme de fermeture du Gyptis, de petites salles de concert qui ferment, des fêtes de quartier en péril, du Bureau des compétences et des désirs qui disparaît… La capitale n'y est pas forcément pour grande chose mais cela écorne un peu la carte postale.

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Commentaires

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  1. Anonyme Anonyme

    C’est la crise pour tout le monde et le régime des intermittents arrange bien certains qui accumulent indeminités et travail au noir..sincèrement, ils ne sont pas à plaindre..y a pire.

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  2. toto toto

    Il faudrait se poser aussi la question: n’y a-t-il pas trop de personnes qui se considèrent comme artistes?

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  3. savon de Marseille savon de Marseille

    RECTIFICATIF : les intermittents du Spectacle ! :un système à réformer ,et par respect pour les autres travailleurs.
    Marsactu ne donne pas les chiffres : je vous les donne , c’est raide :
    http://www.montesquieuvolvestre.com/article-intermittents-du-spectacle-l
    On n’a pas à financer ce gouffre , surtout dans le SUD , ou avec les Festivals , il est possible de cachetonner 4 mois juin/juillet/aôut/septembre pour toucher 8 mois de chômage plein après. Sans compter les boites de production qui détournent le système.

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  4. loulouvert loulouvert

    C’est fou comme il y a des lecteurs qui peinent à lire ….
    merci Marsactu pour nous rappeler que la capitale européenne de la culture n’a pas permis de développer les pratiques culturelles et de permettre à des artistes résidant locaux d’y contribuer en étant rémunéré !
    La magie du bénévolat a encore frappé pendant toute l’année.
    Plutôt que d’embaucher des gens pour l’accueil et l’information du public on a préféré embaucher des bénévoles qui sont fier de l’être …
    C’est un choix politique
    le débat sur le régime de l’assurance chomage des intermittents est un sujet suffisamment complexe est sérieux pour mériter mieux que des commentaires scabreux, trop rapide et libéraux !

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  5. joliette13 joliette13

    Il n’y pas que les intermittents du spectacle, il y a aussi des responsables de structures culturelles, de centres d’art, de spectacles de rue qui sont obligés de fermer la porte (2 ont déjà fermé cette année) car ils n’ont pas eu de financements de la part de la ville, de la région ou du département et que 2013 ne les as pas soutenus. Il faudrait aussi réfléchir à tous ces lieux qui ont été créés, rénovés, agrandis… et qui n’auront pas les moyens d’être animés l’année prochaine et tous ces gens qui ont été embauchés cette année pour animer, accueillir, mettre en place ces événements qui vont pointer à la fin de l’année. Et ils ne sont pas intermittents

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  6. Dazibaos Dazibaos

    A part Marseille Downtown … Qui a profité de MP2013 ? surement pas les artistes de Marseille … Amer constat .

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  7. Anonyme Anonyme

    Contrairement à Aix, Marseille n’est pas une ville qui a une tradition culturelle, c’est une ville de “mercanti”. On confond culture avec tourisme, avec spectacle et avec agitation désordonnée. Du moment qu’on fait du bruit ou qu’on accroche des croutes aux murs, on est un “artiste”. D’où la piètre qualité des manifestations marseillaises ou leur totale inadéquation. Je n’ai rien contre les moutons mais présenter un défilé de bestiaux comme le clou d’une année culturelle me semble un peu ridicule. L’exposition Grands Ateliers du Midi se rapproche plus à mon sens de la thématique mais il aurait peut-être fallu soigner l’environnement : la saleté autour du Palais Longchamp est désespérante. Ce ne sont que des exemples : pas de plan d’ensemble, pas de cohésion et surtout pas de suivi dans les actions. A l’arrivée une année brouillonne qui, mal organisée, n’a pas eu les retombées prévues. C’est vraiment un beau gâchis.

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