Des enfants de dirigeants d’Erilia occupent des logements du bailleur social à Paris

Enquête
le 26 Jan 2023
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Selon une enquête de Marsactu, deux enfants de cadres dirigeants d'Erilia occupent des logements du groupe à Paris, dont l'un est un HLM. Le premier bailleur social de la région assure que l'attribution de ces logements respecte le cadre légal.

Des enfants de dirigeants d’Erilia occupent des logements du bailleur social à Paris
Des enfants de dirigeants d’Erilia occupent des logements du bailleur social à Paris

Des enfants de dirigeants d’Erilia occupent des logements du bailleur social à Paris

Premier groupe de logement social en PACA, le groupe Erilia peut se féliciter depuis juin dernier d’avoir inscrit dans ses statuts sa qualité de “société à mission”. Pour reprendre ses éléments de communication, Erilia veut “rendre le logement accessible à tous pour changer la vie et contribuer à l’attractivité des territoires”. D’après les informations que Marsactu a rassemblées, cette “mission” profite étonnamment aux enfants de cadres dirigeants de la société qui peuvent bénéficier d’un “parcours résidentiel épanoui”, alors qu’ils sont montés à Paris, poursuivre leurs études ou se lancer dans la vie active.

Déjà forte dans la région, la tension sur le marché locatif atteint son comble quand on souhaite vivre à la capitale. Avoir une mère qui travaille comme directrice des ressources humaines d’une entreprise sociale pour l’habitat peut donc faciliter les choses. Bien entendu, Sergio* indique “avoir fait [sa] demande par internet” et ne pas “avoir eu besoin de sa mère” pour obtenir un logement social rue de Ménilmontant, dans le XXe arrondissement.

Quand on l’interroge sur la façon dont il a décroché ce logement social, le jeune homme met en avant sa qualité “d’intérimaire” dont les faibles revenus justifieraient l’attribution dudit logement. Très vite, il écourte la conversation en se disant “pas intéressé” par nos questions.

Deux attributions en 2021

Pourtant, sur son profil public sur Linkedin, le jeune homme se présente comme étudiant en relations internationales et met en tête de ses expériences professionnelles, sa qualité de responsable communication du bureau des élèves de son école. S’il ne revendique aucun coupe-file, il apparaît comme particulièrement chanceux. En effet, selon les données publiées par le gouvernement, en 2021, il y avait 3391 demandes de logements de type 2 en attente dans cet arrondissement de l’Est parisien.

Sur les 31 logements qu’Erilia y possède, seulement deux ont été attribués cette année-là. Ô surprise, parmi les deux demandes satisfaites, le fils de la DRH… Ce dernier bénéficie donc d’un appartement de deux pièces dans une rue agréable de ce quartier populaire pour la modeste somme de 554 euros, hors aide pour le logement et réduction de loyer.

Un T3 en colocation à moins de 1000 euros

Mais Sergio n’est pas seul enfant de cadre dirigeant d’Erilia à avoir droit à un appartement à la capitale. Lena*, la fille d’un directeur général adjoint du groupe, chargé de l’immobilier et notamment du patrimoine en Ile-de-France, n’a pas eu à beaucoup chercher pour trouver un toit acceptable. Elle est en colocation avec une camarade qui a fait les mêmes études qu’elle, dans une école d’animation 3D à Valenciennes.

Au moment de prendre son envol dans le monde professionnel, elle a obtenu un logement d’Erilia dans une résidence de Montrouge, commune limitrophe de Paris. Cette fois-ci, le coupe-file est plus simple à actionner puisque ce logement est de type intermédiaire. Il relève donc de la gestion directe d’Erilia et s’il donne lieu à une attribution en fonction des revenus déclarés, elle reste à la discrétion du bailleur social. Contactée par Marsactu, Léna coupe court à toute question, renvoyant vers son père pour toute question plus précise sur la façon dont elle a pu avoir accès à ce T3, pour 953 euros.

Très peu de candidatures retenues

Contacté par Marsactu, Erilia confirme l’absence de procédure particulière pour ce dernier appartement. Quant au logement social, elle assure avoir suivi les règles.“La région parisienne favorise la location de logements aux étudiants en vue de la mixité sociale et générationnelle. Les attributions que vous citez ont été effectuées dans le cadre de la législation applicable”, indique le service de communication du bailleur social, confirmant ainsi l’existence de ces attributions. Pour l’office HLM, filiale de la Caisse d’épargne, “l’attribution du logement social a été validée par la commission d’attribution de logements et d’examen de l’occupation des logements (CALEOL) de Paris composée de représentants de la société, du représentant des locataires, d’un élu et d’un représentant de l’État”.

En 2018, l’agence de contrôle du logement social, l’Ancols, avait pointé de nombreuses irrégularités dans l’attribution des logements sociaux, notamment sur des logements relevant du même dispositif que celui occupé par Sergio. En 2017, en moyenne deux candidats ont été proposés par logement au lieu des trois imposés par la réglementation, “alors même que 90 % du parc est situé en zone tendue”, écrivait l’Ancols. Dans 57% des cas, le logement était attribué avec un seul candidat, note encore l’agence de contrôle. Il suffit de savoir…

* Les prénoms des deux enfants de dirigeants d’Erilia ont été modifiés pour préserver leur anonymat.

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Commentaires

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  1. Lacoste P. Lacoste P.

    Bravo pour cet article très documenté!
    C’est bien connu que dans l’expression “bailleur social”, le seul social c’est le locataire.

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  2. Jeanne 13 Jeanne 13

    Comme c est étrange ces attributions opportunistes ….
    Je participe aux caleol dans le 13 et même si ça c est bien arrangé il n en demeure pas moins que chacun défend ses candidats par contre sur les attributions bailleur direct il y a un gros flou ….Il serait nécessaire de redéfinir les procédures car n oublions pas que les bailleurs sont financés par des fonds publics….les attributions des logements en fonction des origines des locataires représentent la base des replis communautaristes et des différences de traitement quartiers sud quartiers nord de Marseille par exemple…..

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  3. Richard Mouren Richard Mouren

    Une fois de plus, nous sommes en présence du duo infernal illégalité/injustice. On habille l’injustice de la fine enveloppe de la procédure légale (demande dans les formes, conditions de revenu “remplies”) pour pouvoir prétendre ensuite que ce n’est pas illégal puisque les formes ont été respectées. Par contre ça devient une manoeuvre pour obtenir un avantage injuste. Ah! ces dirigeants salariés qui se croient propriétaires de leurs entreprises….

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  4. Forza Forza

    Je peux pas y croire, tous ces bailleurs sociaux sont pourtant irréprochables :p
    D’ailleurs dans mon immeuble ce sont les seuls avec les propriétaires des locaux commerciaux à ne jamais payer leurs charges : ô pôvres… Dire que certains envisagent de leur confier la gestion des copropriétés en pensant qu’elles seront mieux gérées que par des copros privés : j’aimerais bien voir ça (enfin non en fait).
    https://marsactu.fr/enquete-ouverte-pour-escroquerie-sur-le-parachute-dore-dun-ex-patron-de-logirem/

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  5. polipola polipola

    Ce qui m’atterre le plus, c’est que ça ne semble pas choquer les enfants, dignes produits de leurs parents. Si les noms ne sont pas cités, c’est par peur de diffamation @marsactu ?

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  6. Magnaval Magnaval

    Pour parler de “rue agréable” au sujet de la rue de Menilmontant, il ne faut pas y avoir souvent mis les pieds ou avoir une notion de l’agréable un peu faussée. C’est très trafiqué et bruyant (mais en se penchant, on, voit la tour Eiffel au loin, derrière le voile de pollution), et les cités gangrénées par le trafic n’y manquent pas. Mais face au scandale profond de l’immobilier en France, il est plus facile de taper sur les gens qui arrivent à se débrouiller qu’à s’attaquer aux vrais fautifs : les profiteurs et les spéculateurs qui entretiennent artificiellement la pénurie et la névrose si rentable de ce pays.

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    • Manipulite Manipulite

      D’accord avec vous, il y a des dénonciations un peu faciles

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    • julijo julijo

      oui, certes un peu facile. mais si on ne “dénonce” personne, les mécanismes en place dureront….
      et ils durent.
      que ce soit chez erilia, et aussi ds les sociétés d’hlm départementaux ou municipaux, les passe-droit et les abus en tout genre sont largement monnaie courante.
      les commissions d’attributions travaillent sur des listes établies de manière opaques depuis toujours.
      et depuis toujours certains logements sociaux sont très prisés, les hlm en bord de mer, ceux sur le bd michelet, les petites cités…ils hébergent, les familles de privilégiés, parents ou enfants, les “vip” élus ds les secteurs…. bref le commun des mortels qui ne connait personne n’a qu’à patienter….

      alors oui, en dénonçant, le fils de… on ne se trompe pas de cible, mais ce n’est pas la principale. les profiteurs (la drh et le dga d’erilia en sont), et les spéculateurs qui eux ne font rien pour construire des logements sociaux en nombre suffisant, sont particulièrement responsables.

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  7. Melanisette Melanisette

    Écœurant une fois de plus …
    Combien de personnes en besoin d’un logement? combien de gens dans la rue ? …

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    • Lacoste P. Lacoste P.

      Bonne question :
      40 000 demandeurs inscrits en attente à Marseille, sans compter les milliers qui ont renonce à s’inscrire pour la 10e fois…

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  8. PromeneurIndigné PromeneurIndigné

    La fin de la période hivernale approche à grands pas ! Pourtant il serait surprenant qu’on expulse ces jeunes gens de bonne famille.

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  9. kukulkan kukulkan

    mais quelle honte, j’espère qu’il y aura des poursuites en justice !

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