Dans la cité, "ils s'imaginaient être les rois du monde"
Dans la cité, "ils s'imaginaient être les rois du monde"
Loin de la connotation péjorative souvent liée aux "bandes de jeunes" des cités, Youssouf Djibaba – alias Claude – leur rend un vibrant hommage dans son premier roman, Comme des rois, qui vient de paraître aux éditions Wildproject. Dans ce roman où anecdotes de vie et fiction s'entremêlent, chacun des six jeunes porte un peu en lui une partie de l'auteur.
Mais c'est aux "grands des magasins" que Youssouf Djibaba a choisi de dédier son livre, "ces grands-frères présents dans toutes les cités, qui donnent une certaine philosophie aux jeunes. Ceux qui m'ont aidé dans mon cursus". Et de fait, le parcours de l'auteur reste atypique : travailleur social mais aussi champion de boxe "pour le loisir" et une envie d'écrire qui se manifeste à travers un atelier de hip hop mais surtout, plus tard, pour tuer l'ennui, le soir, dans les chambres d'hôtel entre deux matches.
Au départ, l'auteur qui récuse le titre d'écrivain – "attendez que je sorte mon deuxième livre" dit-il – écrit des textes pour ses amis rappeurs. "Ils trouvaient que j'étais trop narratif, j'écrivais des histoires. Du coup, je me suis retrouvé avec plein de feuilles, des pages et des pages et je me suis dit que j'allais tenter de captiver le lecteur. J'ai envoyé des manuscrits à plusieurs maisons d'édition. Au départ, personne n'était intéressé, ce qui est normal : j'avais une écriture brouillonne. Je n'aimais pas lire et j'avais arrêté l'école très tôt".
"Objet de fabulation"
Si le récit s'ancre dans la cité imaginaire "Carter", celle-ci ressemble à tant de cités marseillaises – et même d'ailleurs – avec leur univers clos, bien que pour l'auteur celui-ci reste "objet de beaucoup de fabulation". Surtout, Youssouf Djibaba souhaite se souvenir qu'au milieu d'une violence certes réelle apparaissent des îlots de solidarité, des gestes de soutien auprès d'une mère désespérée. La dureté de l'histoire marquée par la violence, les trafics, l'omerta inhérente aux règlements de compte n'annihile pas toute couleur. Au détour des pages, celle-ci jaillit par un trait d'humour ou une émotion, à mesure que l'auteur décrit ce monde restreint, porteur d'une identité propre.
"On a l'impression que ces cités sont des villes part entière, que l'on n'est pas à Marseille. C'est comme si le boucher était un élu, que le boulanger était le maire, c'est très cosmopolite : tout le monde a son accent, ses recettes, ses saveurs" estime Youssouf Djibaba. Dans ce décor, les jeunes en sont les héros ordinaires, magnifiés par une écriture simple et percutante. "Dans leur espace, ils s'imaginaient être les rois du monde", glisse Youssouf Djibaba, dont l'usage de l'imparfait vient encore fragiliser la frontière entre vécu et fiction.
Comme des rois, aux éditions Wildproject, 20 €.
Commentaires
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“Claude” Djibaba est un grand Monsieur du sport et du monde éducatif. J’ai eu le plaisir de le connaître comme médecin du sport, comme pratiquant de boxe, et je l’admire. Il devrait être reconnu comme il le mérite!
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Ton grand frère est fier de ton parcourt qui commence a peine et tu le mérite bien.felicitation monsieur youssouf.madie
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L’interview de Claude-Youssouf Djibaba (que je ne connaissais pas du tout, pour ignorer systématiquement les rubriques “sports” dans nos médias…) m’a entièrement convaincue de lire au plus vite “Comme des rois”, tant sa parole résonne juste aux oreilles de la sociologue de terrain que je suis et qui a beaucoup travaillé dans les cités. Avant même de lire le commentaire de M Bourgat, qui est ,de plus, pour moi (sans être de son bord politique), une sérieuse caution d’engagement pour la valorisation et l’émancipation des jeunes des cités.
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je vais me répéter claude je suis fière de toi, et je suis sur que ta carrière d’écrivain et bien partie bisous
nadia
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J ai connu Claude au lep de mécanique bateau en 94je l ai admiré tout de suite étant moi même des cités ce qui m a interpellé c est sa modestie en tant que champion.jamais de mauvais orgueuil mais déjà bon narrateur et médiateur.bien que l ayant perdu de vue depuis,je suis content de le retrouver tel quel.bravo Claude!bises,jean michel
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