CP à douze élèves, le jour J
Retour à l'école Kléber, une école du réseau d'éducation prioritaire qui accueille désormais des CP à 12 élèves par classe. Premières heures de classe sous l'œil attentif d'une enseignante à qui rien n'échappe... Presque trop présente.
La cour de l'école Kléber à l'heure de la récréation des plus petits. (Photo : B.G.)
Debout sur une chaise, Djenna ne sait plus quelle main tient le petit chien. Sa maîtresse, Samia Belmimoun, prend calmement le temps de tout reprendre depuis le début. “En haut, à gauche”, fait-elle en hissant le bras de la jeune enfant très haut. “Tout en bas”, poursuit-elle, accroupie, en espérant être suivie. La petite paraît un peu paralysée par ce premier jour de classe et cette convocation au tableau. Elle finit par poser le petit chien au mauvais endroit sur le tableau.
Pourtant l’exercice est censé réviser un des acquis de la grande section de maternelle : apprendre à se repérer dans l’espace. Mais en ce jour de rentrée, tout est tourneboulé. Nous sommes de retour à l’école Kléber (3e) que la Ville a choisi pour montrer les aménagements réalisés afin d’assurer l’accueil de classes de 12 élèves dans les écoles inscrites dans les réseaux d’éducation prioritaires, dits REP+.
Les nombreux journalistes qui passaient par là en ce jour de rentrée n’ont pas facilité la concentration. La classe de de Samia Belmimoun est une des 287 du réseau prioritaire REP+ à Marseille à être passée à 12 élèves. En l’occurrence, en ce jour de rentrée, ils sont même neuf puisque le groupe qui doit compter 13 élèves a enregistré quatre absents dès la rentrée. “Ils sont peut-être arrivés en retard, explique Samia Belmimoun. C’était l’Aïd, ce week-end, ils sont arrivés un peu fatigués.” Beaucoup d’enfants arborent dans le creux de la main la tache de henné traditionnelle.
Dire la girafe
Et certains ont les paupières lourdes et les mains pataudes quand il faut trouver la trousse, la paire de ciseau et la colle pour poursuivre l’exercice avec les animaux à coller dans leur cahier tout neuf. Chaque étape de l’exercice est une occasion de révision des règles de la vie collective sur la prise de parole, l’écoute des consignes ou la tenue assise. Ce premier jour permet aussi le repérage des difficultés. Petit bout de gars à crête qui se tortille de timidité, Youssef n’arrive à pas dire “girafe”. Il bute sur le R qui prend des accents liquides. “Tape des mains à chaque syllabe”, insiste la maîtresse. “Gi-Ra-Fe”, il bute, tape et passe sous les encouragements de la maîtresse.
Une fois, les enfants partis s’égayer dans la cour de récréation en compagnie des CE1, Samia Belmimoun prend le temps de donner ses impressions à chaud. “C’est un peu tôt pour juger, explique-t-elle dans le brouhaha des jeux d’enfants. La rentrée est un moment particulier : on révise des acquis de l’an dernier, on rappelle les règles de vie commune et nous allons mettre quelques jours avant d’entrer dans le travail d’apprentissage.”
“l’œil sur tout, presque trop”
Mais l’enseignante chevronnée a déjà repéré un effet pervers de cette nouvelle réforme de l’enseignement. “Je les sollicite beaucoup trop, reconnaît-elle. Cela permet d’aider les élèves les plus en difficulté. J’ai pu prendre le temps de montrer comment on tenait des ciseaux, de faire le geste avec elle, ce que je n’aurai pas pu faire avec une classe à 23 comme l’an dernier. Mais, d’un autre côté, cela tue les interactions entre élèves qui permettent beaucoup d’apprentissage. Là, on a l’œil sur tout, presque trop.”
Le directeur refuse d’entrer dans le débat sur le bon nombre d’élèves pour “créer la bonne dynamique de classe”. “Je pense que c’est l’enseignant d’abord qui la crée cette dynamique, commente-t-il. Et puis il faut se souvenir que cette limitation du nombre d’enfants par classe est une très ancienne revendication des enseignants et des syndicats, quasi-unanimement partagée. Il faut donc se réjouir quand elle arrive.”
Dans une autre salle, Anne Laucci souffle un peu après les premières heures de CP en co-enseignement avec une de ses collègues. Elle refuse de tirer des bilans à si court terme d’une expérience inédite mais partage l’impression commune : “Avec deux enseignants pour 24, nous sommes constamment à l’écoute, hyper attentives. On ne les lâche pas. L’effet pervers c’est que ça interdit la rêverie”. Si on peut plus rêver en cours, alors…
Commentaires
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Je suis un peu déçu par cet article qui, à mon sens, met beaucoup trop en avant le coté négatif tout au long des prises de paroles. Pourquoi faut-il voir toujours le verre à moitié vide? Une classe de 12, un enseignant trop présent, trop à l’écoute, trop attentif à chaque élèves , mes filles en auraient rêvé en CP…
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12 élèves par classe ça fait rêver ! Il y a certainement de nouvelles approches à avoir mais cela ne semble pas insurmontable et plutôt porteur de promesses.
On espère un autre article bientôt !
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