Comment Maryse Joissains a recasé à la métropole son ex adjoint mis en examen

Enquête
le 2 Déc 2020
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En janvier dernier, l’adjoint de Maryse Joissains (LR), Alexandre Gallese, renonçait à se présenter à ses côtés aux municipales après sa mise en examen. En octobre, le voilà propulsé "directeur de projets" à la métropole. Après une petite lettre de recommandation signée par Maryse Joissains et adressée à Martine Vassal.

Alexandre Gallese est mis en examen pour trafic d’influence et prise illégale d’intérêts. (Photo JV)
Alexandre Gallese est mis en examen pour trafic d’influence et prise illégale d’intérêts. (Photo JV)

Alexandre Gallese est mis en examen pour trafic d’influence et prise illégale d’intérêts. (Photo JV)

“Tu trouveras en pièce jointe, la candidature d’Alexandre Gallese sur un poste d’administrateur hors classe en qualité de chargé de mission du DGS du territoire dans les domaines des infrastructures de transports, je pense qu’il pourrait également s’occuper du CPER [contrat de plan État-région, ndlr].” C’est une lettre courte et limpide, en date du 16 juillet 2020, que Marsactu a pu consulter. En quelques lignes, Maryse Joissains, qui vient alors d’être réélue maire Les Républicains d’Aix-en-Provence, y demande sans détour à Martine Vassal – reconduite à la tête de d’Aix-Marseille-Provence métropole – un poste au sein de l’administration métropolitaine, pour son protégé Alexandre Gallese.

L’ancien élu, par ailleurs secrétaire général adjoint de la fédération LR des Bouches-du-Rhône, n’a pas pleinement savouré la quatrième victoire du clan Joissains à la mairie au soir du 28 juin. Lui, le compagnon de route de Maryse Joissains depuis 2001, élu au bureau de la métropole de mars 2016 à juillet 2020, n’a pas pu se représenter à ses côtés. Alors qu’il vise une place de 4e adjoint en charge de l’environnement, il est mis en examen pour trafic d’influence et prise illégale d’intérêts le 31 janvier 2020 dans le cadre d’investigations sur les conditions d’attribution de marchés publics de l’urbanisme aixois.

Marchés immobiliers suspects
Le 31 janvier 2020, Alexandre Gallese, est mis en examen dans le cadre d’une information judiciaire ouverte pour “prise illégale d’intérêts” et “trafic d’influence”, au terme de 30 heures de garde à vue. Comme le révèle Marsactu en février 2019, des perquisitions ont été menées à la fin de l’année 2018 dans deux sociétés publiques locales – la Semepa et Pays d’Aix territoires–, de même que chez plusieurs promoteurs locaux. Les enquêteurs cherchent à établir un lien entre des opérations immobilières dans les quartiers de la Duranne et de la Beauvalle et le financement du micro-parti présidé par Alexandre Gallese, Réflaixion.
Interrogé à l’époque par Marsactu, Alexandre Gallese affiche sa “sérénité totale”, arguant : “Je suis adjoint à l’urbanisme. Ce n’est pas moi qui suis visé, c’est la fonction.” Dans le cadre de cette affaire, deux autres personnes sont présentées au juge. La première est également mise en examen pour corruption, la seconde est placée sous statut de témoin assisté.

 

Dans la foulée, celui qui est encore adjoint en charge de la planification urbaine et de l’urbanisme annonce son retrait de la liste pour que la campagne puisse se dérouler dans “la sérénité”, écrit-il dans un communiqué non sans rappeler l’affection et l’amitié qui le lient à la maire.

Un recasage sur mesure

En juste retour des choses, son amie Maryse récompense ses bons et loyaux services en requérant pour lui ce poste taillé sur mesure au sein du conseil de territoire du Pays d’Aix, subdivision métropolitaine qu’elle préside. Le cousu main va même plus loin. Alexandre Gallese qui a travaillé au sein des services de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur de 1998 à septembre 2020 bénéficie de par son parcours dans l’institution du grade d’administrateur hors classe, l’un des plus élevés dans la fonction publique territoriale.

Il convient donc d’aménager pour lui une place idoine au sein de l’administration métropolitaine. Ce que Maryse Joissains formule très clairement auprès de la présidente d’AMP : “Si tu le valides, il conviendrait de créer un poste d’administrateur hors classe – ou d’en transformer un – lors d’un prochain conseil de métropole.”

L’affaire est rondement menée. Depuis le 1er octobre, Alexandre Gallese, titulaire d’un DEA en droit européen, bénéficie donc d’un CDI sur un poste d’agent contractuel rattaché directement à la direction générale des services du conseil de territoire aixois. L’ancien élu n’a pas manqué d’actualiser sa fiche LinkedIn comme l’a souligné La Provence dans son édition d’Aix. Celle-ci indique une fonction de “chargé de mission projets coordination mobilités, infrastructures et contrat de projets chez métropole Aix-Marseille-Provence”. Plus loin sur la même page le poste est décrit comme celui de “directeur des projets coordination mobilité”. À la métropole, les contours de son emploi ne sont pas encore définis sur le logiciel interne. Le poste, en revanche, est basé à Aix-en-Provence.

“La relative autonomie du pays aixois”

La prise de fonction est passée inaperçue au yeux de certains. “Je l’apprends de votre bouche”, répond, franchement surpris, Henri Pons, maire (Divers centre) d’Eyguières et vice-président d’AMP en charge des transports, de la mobilité durable, qui remarque l’air de rien “la relative autonomie du pays aixois” au regard de la chose métropolitaine. L’élu ne doute pas que la recrue aixoise saura avoir “les compétences qu’il faut du fait de son long parcours d’adjoint”. Est-il normal de la part d’une collectivité de recruter une personne mise en examen ? Henri Pons évacue : “Je ne suis pas juriste mais la présomption d’innocence s’applique. S’il est condamné, ce sera autre chose.” Quant à la question de voir désormais officier dans l’administration d’une collectivité un homme qui y a siégé quatre ans durant comme conseiller métropolitain, Henri Pons ouvre le parapluie : “Moi, je suis élu. Je ne suis pas le patron du personnel et je ne procède pas aux recrutements. Mais s’il posait un problème de l’ordre d’un conflit d’intérêt, je peux vous garantir que l’administration comme la présidente, ne le laisserait pas passer.” Un porte-parole d’AMP confirme à Marsactu que ce mercato a été effectué dans les règles de l’art : avec jury et validation des prérequis du recruté pour le poste.

Contactée hier par Marsactu, Maryse Joissains n’était pas disponible. Alexandre Gallese était injoignable. Sur sa page LinkedIn, l’ex-édile annonce son “plaisir” de rejoindre la métropole dans un petit texte : “Une nouvelle vie commence dans des domaines que je connais bien.” Une nouvelle vie, mais toujours à l’ombre de Maryse Joissains.

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Commentaires

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  1. vékiya vékiya

    Pourquoi se gêner ? quand l’exemple vient du plus haut de l’état.

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    • Jacques89 Jacques89

      Le Droit est si bien fait que ceux qui le connaissent peuvent à peu près tout se permettre (voir par exemple Art. 24 de la loi sur la sécurité globale). Suffit d’éviter de trop préciser les choses et permettre d’emprunter des chemins “détournés” pour détourner plein d’autres choses.

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    • Magnaval Magnaval

      Quel rapport avec feu l’article 24 ? Le militantisme des insoumis d’opérette se cache désormais dans tous les sujets, surtout dans ceux qu’ils ne connaissent pas. En premier lieu la langue française, en confondant “diffuser” et “filmer”, par exemple… Mais cela permet de camoufler la complaisance des communistes et de leurs alliés méluchiens avec Joissains et ses magouilles.

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    • Jacques89 Jacques89

      « Feu l’article 24 » c’est un euphémisme de bienséance ?! Je vous rappelle qu’il a été voté notamment par E. Ciotti et A. Genevard ( groupe LR à l’assemblée) qui ont indiqué pour le premier que la portée juridique de cet article était « nulle » et pour la seconde, qu’il était mal « rédigé ». En toute logique nos chers élus auraient pu rejoindre les « insoumis » ou les « communistes » comme vous dites, mais non, ils l’ont votée cette loi… Possible que le groupe LR du Sénat se ravisera, mais je crois que LREM prépare une commission qui va le soulager de cette position très inconfortable dans laquelle le Monarc a mis tous ces partisans des lois liberticides « mal rédigées ». Votez braves gens, votez !

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    • Jacques89 Jacques89

      M’étonnerais que “Sacha” en reste à la grille indiciaire… Ceci dit, je ne voudrais pas être à la place de son DGS.

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  2. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    Ce qui est bien avec l’argent du contribuable, c’est qu’il n’est pas trop cher à obtenir et qu’on peut en faire n’importe quoi : quand il n’y en a plus, il y en a encore.

    Mais on n’est pas étonné de ne pas trouver de morale à cette histoire, qui relève simplement du copinage entre une condamnée et un mis en examen.

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    • Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

      J’ajoute, à l’intention de Jean Peuplus, que Mme Vassal est en réalité tout à fait cohérente avec son discours : elle entendait être la vassale des maires et faire de la métropole un simple club non contraignant destiné à donner du fric à ceux-ci. Dont acte.

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  3. Happy Happy

    Elle n’a pas pensé à le recaser comme chauffeur hors classe ?

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  4. Happy Happy

    Marsactu pourrait pour suivre l’enquête pour découvrir qui composait le jury qui a couvert ce pantouflage et s’il y avait d’autres candidats ?

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    • Jacques89 Jacques89

      Dans les collectivités les questions de personnels sont directement sous l’autorité du Président (ou des maires pour les communes). La désignation d’une commission est facultative.

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  5. BRASILIA8 BRASILIA8

    hors classe pas d’indice le salaire se négocie
    pour le recrutement le choix est laissé au maire seule obligation le poste doit faire l’objet d’une publicité cf Mr Muselier qui a fait la publicité du poste au Canal de Provence alors que “l’heureux élu” était déjà désigné

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  6. Haçaira Haçaira

    N’avons-nous pas élu tous ces menteurs, tricheurs, voleurs ? Et une partie de leurs électeurs ne rêve-t-elle pas d’être aussi compétente dans le mensonge, la tricherie et le vol ? Nous avons les gouvernants que nous méritons.

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    • fsgrt fsgrt

      Vous avez La Provence qui reçoit 1,2 million d’euros du conseil départemental des Bouches-du-Rhône (principalement) et de la métropole Aix-Marseille-Provence, avec à sa tête Franz-Olivier Giesbert et Bernard Tapie, qui ne sont pas connus pour leur amour de la neutralité, sans parler de Jean-Christophe Serfati qui est un ami proche du directeur de cabinet de Martine Vassal… On est en droit de se demander si les électeurs ont été bien éclairés par la presse locale. Non, on a pas les gouvernants que l’on mérite, lorsque le système est installé dans la corruption.

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  7. petitvelo petitvelo

    S’il y avait eu une quelconque insérénité sur ce dossier, nul doute que rien n’aurait été écrit : les acteurs de cet épisode sont donc résolument sereins.

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  8. kukulkan kukulkan

    une honte, qu’il se barre

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  9. Manipulite Manipulite

    En effet ,Happy il serait intéressant de connaître la composition du jury croupion. Il ne suffit pas de publier (vite fait mal fait) le poste, encore faut-il démontrer qu’aucun fonctionnaire titulaire ne remplissait les conditions pour recruter finalement un contractuel. Ce qui est impossible, pour peu que le poste soit publié dans les règles (Centre de gestion, revues professionnelles) avec un profil.
    Nous sommes là dans un cas de recrutement de complaisance non conforme au au principe de l’égalité d’accès aux emplois publics. L’individu n’a pas le grade qu’il énonce mais a la rémunération.
    Bien sûr le contrôle de légalité du préfet roupille comme pour les nombreux cas au conseil régional Paca révélés par la CRC.
    Conseil régional Paca d’où sort l’individu et où il a été collaborateur du groupe UMP pendant de longues années puis…surtout élu à la ville d’Aix : la boucle est bouclée.
    il aurait pu tout aussi bien s’occuper de la cause animale au cabinet de la maire d’Aix.

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    • BRASILIA8 BRASILIA8

      la Métropole va prendre une délibération pour la création du poste en indiquant que personne dans la fonction publique n’est apte à remplir ce poste
      le contrôle de légalité ne trouvera rien à redire et le tour est joué
      quand on lit les délibérations des Délégation de Service on a comme argument les études montrent que cette solution est la plus avantageuse pour le délégataire et cela sans fournir aucune étude !!!
      on ne va tout de même pas demander des comptes à nos petits monarques

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  10. Alceste. Alceste.

    je ne vais pas être sympa , mais la métropole n’est ‘elle pas en charge du recyclage des gens usés?

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    • Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

      Il est certain que parmi ses attributions se trouvent le ramassage et le traitement des déchets produits sur son territoire.

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  11. fsgrt fsgrt

    Dites @Marsactu vous pourriez nous faire un trombinoscope de tous les élus et ex-élus mis en examen et/ou condamnés restant en fonction dans la métropole Aix-Marseille ? Il y en a tellement qu’on s’y perd à la fin… Bon sinon pour en revenir à l’article, en tant qu’usager métropolitain des transports je peux témoigner qu’ils sont dans un sale état, tout est fait pour nous pousser à acheter une voiture. C’est dramatique que pour s’occuper de ce dossier qui devrait être prioritaire on choisisse une personne qui a démontré sa capacité à enterrer les propositions des citoyens sur le PCAET et dont on comprend qu’il va passer plus de temps à ses fonctions politiques chéries et aux juteux marchés qu’il aura à passer qu’à se pencher sur les aspirations de la population de la métropole en matière de transports durables.

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    • Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

      On voit l’intérêt de nos “élites” métropolitaines pour la mobilité à la position protocolaire du vice-président ad hoc : M. Pons, par ailleurs maire d’une commune rurale de 7000 habitants, est 19ème vice-président sur 20.

      À la métropole de Lyon, le vice-président chargé de la mobilité est 5ème sur 23.

      Remarquez, ici le vice-président chargé de l’emploi et de la “cohésion sociale” est 20ème sur 20. Ce sont ces petits symboles qui montrent où sont les priorités politiques.

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    • Alceste. Alceste.

      À ce propos d’élus de la métropole mis en examens ou condamnés, il serait peut être opportun de déménager le siège de l’insafin de

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  12. Alceste. Alceste.

    À ce propos d’élus de la métropole mis en examens ou condamnés, vu le nombre, il serait peut être opportun de déménager le siège de l’institution et afin de faire des économies et assurer une meilleure mobilité, de les installer à Luynes, directement.

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