Cirque sur les plages du Prado : les acrobaties de la Ville de Marseille

Décryptage
le 28 Avr 2022
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Ce lundi, les policiers municipaux ont barré l'accès aux plages du Prado au convoi du cirque Muller. Pourtant, celui-ci bénéficiait d'une autorisation d'occupation. Opposée à la présence d'animaux sauvages dans les cirques, la mairie a dû faire des pirouettes pour les voir plier bagage.

Le chapiteau du cirque Muller. (Illustration : abac077/Flickr)
Le chapiteau du cirque Muller. (Illustration : abac077/Flickr)

Le chapiteau du cirque Muller. (Illustration : abac077/Flickr)

D’énormes camions jaunes et rouges ont tenté de s’installer sur les plages du David lundi 25 avril. Le cirque Muller comptait en effet y déplier son chapiteau, avant que les policiers municipaux n’interviennent. “La police bloque l’installation d’un cirque avec animaux”, révèle ainsi le jour-même France 3 Provence-Alpes. Des embouteillages se créent alors sur l’avenue du Prado, les circassiens menacent de “bloquer la ville” si on ne les laisse pas passer.

Sur le moment, la mairie rappelle haut et fort qu’elle est opposée à la présence de cirques avec animaux sur la commune mais Alexandre Muller refuse de quitter les lieux. Et pour cause, le gérant dispose d’une autorisation d’occupation temporaire délivrée par… la mairie elle-même. D’où vient le cafouillage ? Retour sur le coup manqué d’une collectivité dont le combat peine à s’appuyer sur un fondement légal.

Les policiers municipaux bloquent l’accès aux camions du cirque Muller sur le Prado II ce lundi. (Photo : Rick G.)

“Un accord momentané”

L’autorisation accordée par arrêté municipal le 14 avril à Alexandre Muller a le mérite d’être claire : “La Ville de Marseille accorde l’autorisation d’installer un cirque composé d’un chapiteau 30 m x 20 m et de toutes ses annexes techniques, avec présence d’animaux domestiques, sur les plages du Prado.” Pourtant, dans la presse, dès le lendemain du cafouillage, la municipalité n’hésite pas à jurer qu’elle n’a jamais délivré d’autorisation. “En tout cas, pas moi !”, réajuste Christine Juste, élue écologiste à la condition animale, interrogée par Marsactu. “Mon service a aussi émis un avis défavorable”, ajoute à son tour Hervé Menchon, élu EELV à la mer et au littoral, consulté pour cette demande.

Quant à l’élu en charge des emplacements publics, Roland Cazzola, il se fait moins catégorique et avoue du bout des lèvres qu’“un accord momentané” a pu être délivré. Accord momentané qui a duré assez longtemps pour que le propriétaire du cirque s’acquitte d’une redevance de 3451 euros, le tout pour une occupation allant du 27 avril au 8 mai. L’autorisation a-t-elle été finalement refusée ? Dans les couloirs de la mairie, on explique que cette autorisation a été corrélée à l’interdiction de certains animaux, comme les animaux dits sauvages par exemple.

Aucun cadre légal

Une condition qui ne semble, pour l’heure, pas légale. Pour bénéficier d’une autorisation d’occupation temporaire, les organisateurs d’événements sont censés déposer une demande en ligne sur une plateforme de la Ville de Marseille. Selon le type de demande, celle-ci est redirigée vers les services concernés. En théorie, les mairies peuvent refuser ou accepter, à leur bon vouloir, les dossiers au cas par cas. Mais elles ne peuvent édicter de principe général, selon lequel un type d’événement est interdit sur son territoire.

Une proposition de loi qui vise à lutter contre la maltraitance animale, notamment en interdisant les animaux non domestiques dans les cirques, a été adoptée en novembre 2021. Mais elle prévoit un délai de sept ans avant d’être applicable. Ainsi, rappelle une circulaire du gouvernement du 8 décembre 2021, “le cadre juridique en vigueur ne permet pas aux maires de prendre des interdictions générales d’installations fondées sur la simple présence d’animaux [sauvages].” Pour le moment, la volonté de la mairie de Marseille bute régulièrement sur ces limites juridiques.

“On ne peut pas légalement les refuser pour ce motif, mais on peut décider de l’endroit où on les place par exemple, et les plages du Prado, c’est non !”, s’agace Christine Juste qui refuse de voir un cirque avec animaux avoir pignon sur rue à Marseille. Ce mercredi matin, les services de la mairie et des représentants d’associations circassiennes se sont retrouvés pour “une commission départementale des professions foraines et circassiennes”. “Il a été effectué un rappel général de la loi à tous. Les cas individuels n’ont pas été débattus”, indique la préfecture de police qui a chapeauté le rendez-vous. Les camions jaunes et rouges avaient de toute façon déjà plié bagages la veille, après une première réunion infructueuse avec la mairie.

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Commentaires

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  1. MarsKaa MarsKaa

    Qui donc à donné l’autorisation ? Un élu ? Ses services ? Manque de communication, de rigueur ou division sur ce sujet… en tout cas, un cafouillage pas très sérieux.

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    • BRASILIA8 BRASILIA8

      Les arrêtés sont signés par les élus mais ces derniers peuvent déléguer au travers d’une délibération du Conseil Municipal à un fonctionnaire en général le directeur su service la signature d’un certain nombre d’acte mais la responsabilité reste celle de l’élu qui a lui reçu délégation du maire
      En l’occurrence les autorisations d’occupation du Domaine Public étant très nombreuses c’est souvent le directeur qui a la délégation
      Dans le cas du cirque il y a également l’avis de la commission de sécurité : établissement recevant du public et zone submersible

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  2. AlabArque AlabArque

    L’arrêté d’autorisation me semble clair, puisqu’il précise ‘avec présence d’animaux domestiques’ : ce n’est PAS une ‘interdiction générale d’animaux sauvages, mais leur présence éventuelle peut justifier une éviction au motif de ‘non-conformité à l’autorisation accordée’ … Enfin, il me semble !
    Après, est-ce que la vie des chiens de cirque, des chevaux et poneys de cirque, est conforme à leur ‘bien-être animal’, c’est encore un autre débat …

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    • Jean Pierre RAMONDOU Jean Pierre RAMONDOU

      Il me semble que vous avez eu accès à l’autorisation.
      Où peut on la consulter ?

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  3. Tarama Tarama

    Qui commande à la Ville de Marseille ?
    Encore une fois la question est posée.

    Il semblerait que Madame Fortin, chargée de la réforme de la gouvernance, ait du mal.

    La police municipale a reçu le renfort de nombreux policiers nationaux, toute la journée.

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  4. barbapapa barbapapa

    Qui passe outre les avis défavorables des adjoints Christine Juste et Hervé Menchon ? Ah le vieux PS qui croit que la ville lui appartient encore…

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  5. BRASILIA8 BRASILIA8

    “élue écologiste à la condition animale” sauf erreur de ma part il n’y a plus d’abattoir à Marseille, le gavage des canards de Borély n’est pas à l’ordre du jour. Voilà une délégation qui sent bon son renvoi d’ascenseur pour service rendu à l’élection de Mme Rubirola .

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    • MPA Eco-hotes MPA Eco-hotes

      La condition animale en ville c’est désormais plutôt liée à celle des animaux domestiques (chiens, chats, et autres animaux de “compagnie), ainsi qu’à la faune “sauvage” (oiseaux, rats, souris, etc…) qui subsiste) et franchement il y a beaucoup à faire à Marseille avec les milliers d’animaux domestiques qui sont abandonnés, laissés à la rue, les chats qui se reproduisent par millier et souffrent, la fourrière animale qui est tellement mal gérée depuis des années via la SPA de Marseille, puis “la fondation Clara” = le groupe SACPA, puis SPA, puis SACPA… et là il y a des centaines de milliers d’euros qui sont dépensés! Mal dépensés car on ne prend pas le souci à la base: aider et favoriser la stérilisation à la base, avant que les chats se reproduisent (10 000 est l’estimation aujourd’hui)

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    • petitvelo petitvelo

      Le problème des chats errants semble effectivement toujours ignoré, avec les ravitaillements inciviques alors que ce sont des prédateurs d’oiseaux, des vecteurs de maladies, … et leur apparence laisse souvent deviner la dureté de leur vie.

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  6. MPA Eco-hotes MPA Eco-hotes

    Alors le Cirque Muller pas au Prado mais par contre il a réussi à rester du côté Nord de Marseille au parc en dessous de Grand Littoral, propriété de M GIOCANTI Xavier, le mari de Christine LAGARDE
    Foresta qui est le parc partagé et l’asso qui gère les animations sur le parc n’a pas pu empêcher l’arrivée de ce cirque… des chiens du cirque étaient lâchés, dans le parc mais aussi sur la rue, des chiens parfois dangereux…
    Au Nord ça gêne moins n’est-ce pas ? Pas d’élu qui habite là

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    • BRASILIA8 BRASILIA8

      surtout trop loin pour la police municipale

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  7. julijo julijo

    https://one-voice.fr/fr/blog/nouvelle-enquete-jumbo-et-ses-compagnons-de-misere-toujours-enfermes-au-cirque-muller-vus-du-ciel.html

    super ce cirque !!
    ca doit évidemment moins géner au nord, mais c’est une histoire lamentable.
    les “acrobaties” de la ville sont incroyables et consternantes !

    https://www.cirques-de-france.fr/ou-sont-ils/muller
    ah ca donne envie d’aller voir ….. pas triste le cv du cirque.

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  8. Patafanari Patafanari

    Tous ces animalistes qui préfèrent voir des acrobates se viander sous chapiteau pendant que les hippopotames se prélassent sur la plage…

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