[Mer intérieure] Les jours gris

(Photo : Véronique Esterni)

Cher étang,
J’ai toujours aimé m’envelopper dans la douceur de tes jours gris. Avec le temps, la valeur de ces jours-là augmente. Ils se font en effet de plus en plus rares. Malgré la richesse de notre vocabulaire, il n’y a pas de mot pour dire cette joie à contre-courant, la joie apportée par le jour gris. Il me faut faire sans. Alors, je les photographie.

Ces jours-là, la poésie vibre plus fort. Certes, le ciel donne écho à la nostalgie. Certes, la lumière fait résonner la mélancolie. Mais d’autres forces agissent aussi. La poésie, c’est l’endroit où il se dit ce que les autres n’entendent pas. Libérés du soleil qui nous écrase, ces ciels-là nous invitent à tendre l’oreille. Tout est alors propice à écouter mieux. Et puis les jours gris, l’espoir ne semble pas interdit. Il accompagne nos dérives, dans les remous.

Gronde les gris
Quand les nuages seront volatilisés
restera le cœur bouleversé
Certains entendront les cris
La tempête de griefs.
La splendeur foudroie
Et rendait le jardin merveilleux.