Malika Moine vous présente
Cuisine à croquer

Les coquelets farcis et autres merveilles de Rime

Chronique
le 18 Juin 2022
2

Pour Marsactu, Malika Moine va à la rencontre des gens dans leur cuisine et en fait des histoires de goût tout en couleurs. Aujourd'hui, elle part à la rencontre de Rime qui lui promet "un repas comme les Marocains".

Les coquelets farcis et autres merveilles de Rime
Les coquelets farcis et autres merveilles de Rime

Les coquelets farcis et autres merveilles de Rime

Rime en cuisine. Dessin Malika Moine.

Ma quête de personnes qui aiment – ou pas -, manger et cuisiner, m’a conduite ce mois-ci chez Rime, voisine et amie de Lama. Je me rends donc après une baignade aux Catalans, dans un de ces hauts immeubles de l’avenue Pasteur pour la rencontrer.

Elle m’explique, tout en façonnant avec dextérité des kaaks, gâteaux égyptiens fourrés au caramel de miel et aux noix ou aux pistaches… “Je vais faire un repas comme les Marocains : à 18 ans, je me suis rendue à un mariage au Maroc et j’ai découvert l’opulence. Sur chaque table il y avait un plateau de crustacés, suivi d’un tajine de poulet, puis d’un plat d’agneau… J’ai grandi au Caire en Egypte. Petite fille, j’étais très difficile – pas comme mes enfants qui goûtent tout ! Ma mère cuisinait et aussi une dame de temps en temps. Je ne mangeais que peu de plats : la viande grillée au charbon de bois, la monokeïa, une feuille verte que l’on émince et dont on fait une soupe avec du bouillon de poulet ; le riz oriental au vermicelle… J’aimais grignoter des concombres, des tomates…”

Elle dispose au fur et à mesure les kaaks sur du papier sulfurisé posé sur la grande plaque du four. Soudain, elle regarde l’heure. “Mais il faut que je m’occupe des coquelets !”
Elle enfourne les gâteaux et sort les coquelets du frigo. C’est cette recette pour six personnes qu’elle a promis de donner :

– 3 coquelets
– 400 g de riz brun complet à faire tremper la veille
– des cèpes secs
– une branche de cèleri émincé
– du persil
– des baies de cranberry
– de la poudre de colombo
– du ghee (beurre clarifié)
– des foies de veau : facultatif.

Les ingrédients de Rime. Dessin : Malika Moine.

Elle apporte le saladier de riz brun mélangé avec les cèpes et le colombo et le fait revenir. “L’idée, c’est que le riz soit mi-cuit quand on en farcit les coquelets… Mon père cuisinait un poulet farci aux vermicelles « langues d’oiseaux » avec plein d’épices et d’oignons autour.” Elle lave les coquelets le temps que le riz refroidisse. L’un d’entre eux lui fait faire la grimace. “Je fais confiance à mon odorat, on va pas prendre de risque…” Et hop ! À la poubelle. “Le meilleur, c’est la farce… que j’invente ! J’aime cuisiner depuis mon retour du Maroc. Ma grand-mère syrienne était folle de cuisine mais obsédée par ses recettes qu’elle ne donnait à personne, pas même à sa petite-fille ! Mariée jeune à mon grand-père artiste et fabriquant d’ écharpes en soie vendues uniquement en Suisse, ma grand-mère n’en était pas amoureuse et elle divorça, se remaria et resta en Égypte. Elle a toujours été nostalgique de la Syrie. Je ne lui en veux pas, elle n’a pas eu une vie facile. Grâce à elle, je suis libre dans ma cuisine et je créé des recettes inspirées par la bonne cuisine saine de ma mère.”

Attilio, le mari de Rime, arrive avec leurs deux jumeaux, Roméo et Sandro. Ils hument les odeurs et se réjouissent du festin qui se prépare. Car, un couscous mijote aussi sur le feu…
Rime émince le cèleri, le persil et les cranberries, mélange le tout au riz et en farcit les coquelets qu’elle enduit de ghee, et dispose le riz qu’il reste autour des volailles. Elle enfourne le plat recouvert de papier alu à four tiède. “Je mets le thermostat à 220 degrés et après, je baisserai.”

Elle se souvient :  “Ma mère était prof de français, écrivaine, journaliste et critique de cinéma, mon père, architecte, musicien et peintre. J’ai fait mes études au Caire par correspondance en télé-enseignement avec la France. J’allais dans les librairies, les grandes bibliothèques. Les lieux m’ont marquée car ils étaient souvent anciens et frais dans la chaleur du Caire. À 20 ans, j’ai commencé à enseigner l’arabe aux enfants dans le lycée français. Après la Révolution, j’ai rejoint Attilio qui est capitaine d’un vieux gréement, à Marseille. Ma maman vit toujours au Caire. Là-bas, les gens sont dans une autre urgence de vie et ils ont une philosophie différente d’ici. Ils se disent “Si Dieu veut, j’aurais le Covid, Inshallah…“.

Il reste de la pâte pour les gâteaux, Rime se remet aux kaaks et les enfants se joignent à la cuisinière. Elle leur explique : “Il faut rouler la pâte à la main, mettre une pastille de caramel, deux pistaches et recouvrir, puis il faut rouler, aplatir un peu et faire des petits dessins avec une fourchette.” Le geste est savant, rapide et sûr, et pas évident pour moi qui m’y essaie…

Repas familial chez Rime. Dessin Malika Moine

Tandis qu’elle enfourne les kaaks, elle déclare “J’ai aussi prévu des couteaux ! Je vais les faire cuire en persillade… C’est comme ça que j’aime l’ail, croustillant, ou cru !” Moi qui suis si gourmande et parfois même vorace, je commence à m’inquiéter de la profusion de mets délicieux qui composent le festin. D’autant plus que Rime va faire griller des merguez pour ajouter au couscous d’agneau qui mijote…

Lama arrive : “J’allais pas louper ça !” On se met à table et Attilio, jovial, pose les couteaux sur la table. Les saveurs marines ouvrent l’appétit. Puis, Rime apporte le couscous, délicieux. L’agneau est fondant, les légumes goûteux, la graine parfaite. Mais ce n’est pas fini ! Les coquelets farcis font leur apparition… La gourmandise honore la cuisinière. Le riz cuit à étouffé est fondant et parfumé, la viande savoureuse et la compagnie vivante et enjouée. Les enfants, comme les adultes, se délectent du festin. Et je ne vous parle pas des délicieux kaaks saupoudrés de sucre glace. Attilio prend sa guitare, les enfants l’accompagnent en chantant et Roméo joue un morceau de trompette sans se faire prier, comme pour un point d’orgue à cette magnifique soirée.

Dessin Malika Moine

Commentaires

L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.

  1. aurélie guermonprez aurélie guermonprez

    Mais au final, ils ont cuit combien de temps ces coquelets?

    Signaler
    • Malika Moine Malika Moine

      Demie heure 3/4 d’heure, le temps qu’ils soient bien dorés et tendres à l’intérieur….

      Signaler

Vous avez un compte ?

Mot de passe oublié ?


Ajouter un compte Facebook ?


Nouveau sur Marsactu ?

S'inscrire